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Biélorussie : Paris condamne le retrait d'accréditations à des journalistes de médias étrangers

La diplomatie française a condamné les mesures prises par les autorités biélorusses à l'encontre de journalistes, dont de l'Agence France Presse, les qualifiant d'«arbitraires» et de «répressives».

Le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a condamné, ce 30 août, les «mesures arbitraires» prises par les autorités biélorusses qui ont retiré l'accréditation de plusieurs journalistes de médias étrangers, dont l'AFP.

Ces mesures sont «contraires à la liberté de la presse», a-t-il déclaré dans un communiqué. «L'urgence en Biélorussie va à la mise en place d'un dialogue national inclusif. Des mesures répressives contre des journalistes ne peuvent pas y contribuer», a-t-il ajouté. 

Berlin va convoquer l'ambassadeur de Biélorussie

L'Allemagne, qui assure la présidence de l'Union européenne, va convoquer l'ambassadeur biélorusse à Berlin pour cette même raison, a indiqué une source gouvernementale allemande à l'AFP.

«L'ambassadeur du Bélarus [Biélorussie, Ndlr.] sera bientôt convoqué au ministère des Affaires étrangères» a indiqué cette source, alors que le ministre Heiko Maas a condamné déjà le 29 août une mesure «inacceptable» des autorités du pays

Les autorités biélorusses ont retiré, le 29 août, l'accréditation de plusieurs journalistes de médias étrangers, dont l'AFP, à la veille d'une nouvelle grande manifestation organisée par l'opposition, qui conteste les résultats de la présidentielle du 9 août.

Selon le porte-parole de la diplomatie biélorusse Anatoli Glaz, cette décision a été prise sur la base d'une recommandation de la Commission interministérielle de lutte contre l'extrémisme et le terrorisme. Il n'a pas précisé combien de journalistes sont concernés par cette mesure, mais des médias étrangers dont la BBC et Radio Liberty ont fait état du retrait de l'accréditation de plusieurs de leurs journalistes.

Les journalistes biélorusses de l'AFP se sont vu dire par le gouvernement que leurs accréditations avaient été annulées

«Les journalistes biélorusses de l'AFP se sont vu dire par le gouvernement que leurs accréditations avaient été annulées. Aucune explication n'a été fournie et nous ne sommes pas au courant des raisons du retrait des accréditations. Nous demandons aux autorités de rétablir leurs accréditations afin qu'ils puissent continuer à fournir une couverture indépendante et impartiale des événements», a réagi le directeur de l'Information de l'Agence France-Presse, Phil Chetwynd.

L'agence Associated Press (AP) a également dénoncé l’expulsion, le 29 août, de deux de ses journalistes vers la Russie. 

«Associated Press s'élève dans les termes les plus forts contre cette attaque contre la liberté de la presse en Bélarus [Biélorussie, Ndlr.]. AP appelle le gouvernement bélarusse à rétablir les accréditations des journalistes indépendants et à les autoriser à continuer à rapporter au monde ce qui se passe en Bélarus», a fait savoir Lauren Easton, directrice des relations avec les médias de l'agence américaine.

Nous condamnons dans les termes les plus forts cet étouffement du journalisme indépendant

«Nous condamnons dans les termes les plus forts cet étouffement du journalisme indépendant», avait réagi plus tôt réagi un porte-parole de la BBC, appelant les autorités biélorusses à «révoquer leur décision» et à permettre aux journalistes de «faire leur travail».

«Retirer à nos journalistes leur accréditation sans cause ou justification est une mesure désespérée d'un gouvernement autoritaire pour étouffer les médias indépendants et contrôler impitoyablement la disponibilité d'une information crédible au Bélarus», a pour sa part dénoncé la présidente de Radio Free Europe/Radio Liberty, Daisy Sindelar, dans un communiqué.

L'opposante Svetlana Tikhanovskaïa a déclaré pour sa part voir dans cette décision «un nouveau signe que le régime est en banqueroute morale et ne tente de s'accrocher au pouvoir que par la peur et l'intimidation».

Outre la réaction de la diplomatie française, l'ambassade américaine s'est dite «inquiète» par le fait que les journalistes soient pris pour cible de «manière continue» en Biélorussie, dénonçant aussi le «blocage des médias indépendants ou d'opposition», les «coupures intermittentes d'Internet» et les «arrestations arbitraires de citoyens pacifiques». Elle a appelé Minsk à la «retenue».

Nouvelle manifestation de l'opposition

Ce 30 août, des dizaines de milliers de manifestants sont descendus dans les rues de Minsk, pour le troisième week-end consécutif et malgré une présence policière massive, pour dénoncer la réélection d'Alexandre Loukachenko. 

Les forces de l'ordre sont intervenues en début de manifestation arrêtant 140 personnes, selon le ministère de l'Intérieur cité par les agences russes. Mais elles n'ont pas fait usage de gaz lacrymogènes, de grenades assourdissantes ou de balles en caoutchouc, comme elles l'avaient fait contre les premiers rassemblements après le scrutin contesté du 9 août.

Le président biélorusse, au pouvoir depuis 1994, fait face à un mouvement de contestation inédit depuis l'élection contestée du 9 août, qui l'a donné gagnant avec 80% des suffrages et que l'opposition dénonce comme frauduleuse.