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Hospitalisation d'Alexeï Navalny : le Kremlin met en garde contre les «formulations hâtives»

Alors que plusieurs pays occidentaux enjoignent la Russie à lancer une enquête «transparente» sur l'empoisonnement supposé de l'opposant russe Alexeï Navalny, le porte-parole du Kremlin a mis en garde contre des conclusions hâtives.

S'exprimant sur l'hospitalisation de l'opposant russe Alexeï Navalny, le porte-parole de la présidence russe Dmitri Peskov a souligné le 26 août la volonté du Kremlin que cette affaire ne détériore pas les relations entre la Russie et l'Occident : «Nous ne voudrions pas que cela arrive», a-t-il déclaré en réponse à une question de journaliste, assurant en outre qu'il n'y avait «aucune raison à cela».

Moscou, a-t-il souligné, est opposé à ce que l'on «qualifie d’"empoisonnement" ce qui s’est passé sans que cela soit définitivement confirmé». «Comment peut-on parler d’un empoisonnement s’il n’y a pas d’agent toxique ?», a fait valoir Dmitri Peskov, à propos des causes du malaise qui a conduit Alexeï Navalny à être hospitalisé dans un état grave il y a près d'une semaine.

Les médecins allemands qui soignent l'opposant russe à Berlin, après que celui-ci a été hospitalisé dans un premier temps à Omsk (Russie), ont annoncé le 24 août qu'il avait été intoxiqué par «une substance du groupe des inhibiteurs de la cholinestérase», mais sans pouvoir préciser laquelle.

Selon l'AFP, ces produits sont susceptibles d'être utilisés, à faible dose, contre la maladie d'Alzheimer mais peuvent être très dangereux et produire des agents neurotoxiques puissants en fonction du dosage.

Le porte-parole du Kremlin a également déploré, ce 26 août, les «diverses formulations hâtives qui sont abondamment employées et selon lesquelles il y aurait une forte probabilité qu’il s’agisse d’un empoisonnement».

«Nous savons que, malheureusement, de nombreuses analyses effectuées par nos médecins n’ont pas contribué à trouver dans le corps du patient la substance qui aurait pu causer l’état dans lequel il s’est retrouvé. Nous ne savons pas si, à ce jour, les médecins allemands ont pu identifier cette substance. Les évaluations de son état par nos médecins et leurs collègues allemands sont les mêmes», a-t-il déclaré à la presse, tout en précisant que la Russie n'était «pas au courant des développements qui ont eu lieu ces dernières 24 heures car, comme on le sait, le patient a été transféré en Allemagne pour y être traité».

Enfin, Dmitri Peskov a tenu à rappeler que l'affaire, qui a pris une proportion internationale, concernait la Russie : «Cela nous concerne également, un citoyen russe est dans le coma. Et nous aimerions découvrir la cause de ce coma.»

L'Occident exige une enquête«transparente»

Ce même jour, Ulrike Demmer, porte-parole adjointe du gouvernement fédéral allemand, a martelé que les «résultats des analyses faites à l’hôpital de la Charité [de Berlin]» indiquaient qu'Alexeï Navalny avait été «empoisonné». Elle a également fait savoir que, dans une déclaration, la chancelière Angela Merkel et le ministre allemand des Affaires étrangères Heiko Maas avaient appelé les autorités russes «à faire tout leur possible pour assurer la transparence maximale de l’enquête sur ces événements».

De même, Londres a réclamé une «enquête complète et transparente». «Les auteurs doivent être tenus responsables et le Royaume-Uni se joindra aux efforts internationaux pour garantir que justice soit rendue», a déclaré le Premier ministre britannique Boris Johnson sur Twitter ce 26 août, considérant comme acquis qu'Alexeï Navalny avait été «empoisonné».

Une volonté également affichée par l'Otan. Le secrétaire général de l'Alliance atlantique Jens Stoltenberg a appelé ce 26 août à une «enquête transparente pour découvrir ce qui s'est passé et pour s'assurer que les responsables rendent des comptes», affirmant qu'il n'y avait «pas de raison de douter» des conclusions des médecins allemands.

La veille, le Quai d'Orsay avait pour sa part dénoncé un «acte criminel» et demandé une «enquête rapide et transparente qui permette d'établir les circonstances dans lesquelles cet acte a été commis.» 

Réagissant aux appels lancés par les Occidentaux depuis trois jours en faveur d'une enquête «transparente», Dmitri Peskov a jugé que le lancement d'une enquête sur un empoisonnement potentiel d'Alexeï Navalny «n'était pas une prérogative de l'administration présidentielle, du Kremlin» mais des forces de l'ordre et des services de la justice.

Alexeï Navalny a été admis le 20 août en réanimation dans un hôpital d'Omsk après un malaise dans un avion qui devait le ramener à Moscou depuis Tomsk, en Sibérie. L'opposant russe y est resté deux jours avant d'être évacué vers l'Allemagne, son entourage pensant qu'il a été empoisonné et refusant de faire confiance à l'hôpital russe où il était traité. Alexeï Navalny reste, actuellement, dans un état grave et placé dans un coma artificiel.