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Libye : des milliers de personnes dans les rues de Benghazi pour dénoncer le soutien turc au GNA

Plusieurs milliers de personnes ont manifesté le 5 juillet à Benghazi contre ce qu'ils considèrent être une ingérence turque dans les affaire du pays. Ils accusent Ankara de soutenir sur le terrain les forces du GNA menées par Fayez al-Sarraj.

Plusieurs milliers de personnes ont défilé le 5 juillet à Benghazi en Libye, pour dire «non» à ce qu'ils estiment être une ingérence turque dans les affaires intérieures du pays. Ils accusent Ankara d'envoyer des armes et des mercenaires aux forces du Gouvernement d'union nationale (GNA), reconnu par l'ONU. Les manifestants ont multiplié les messages virulents à l'égard du chef du gouvernement, Fayez al-Sarraj, et du président turc Recep Tayyip Erdogan.

Erdogan : un «sale membres des Frères musulmans» et un «chien» pour les manifestants

«Je dis au peuple turc que vous avez détruit vos intérêts en Libye. Votre réputation a été ternie. La réputation des turcs était bonne ici : nous avons des bâtiments et des entreprises turques, des restaurants turcs, des travailleurs turcs, mais maintenant, votre image a été détruite par Erdogan car c'est un sale membre des Frères musulmans, un sale chien et il n'a rien à voir avec notre pays», explique Ahmed, un manifestant.

Pour Mansor, un autre manifestant : «Le peuple libyen est un peuple libre. Le peuple libyen continue à suivre le chemin de la marche des martyrs. Nous, en tant qu'institution de la société civile et peuple libyen libre, sommes conscients et connaissons l'ampleur de la conspiration de que le monde mène contre nous.»

Mona, qui participait également à la manifestation, assure : «Nous [les libyens] sommes contre la conquête turque, contre le gouvernement de concorde nationale à Tripoli et si Dieu le veut, nous serons victorieux grâce à la vigueur de notre jeunesse.»

Discorde entre Paris et Ankara

La Libye est minée par les violences et les luttes de pouvoir depuis la chute de Mouammar Kadhafi, en 2011, consécutive à l’intervention controversée de l'OTAN. Depuis 2015, deux autorités rivales se disputent le pouvoir : le Gouvernement d'union nationale (GNA) de Fayez al-Sarraj, établi en vertu d'un accord parrainé par l'ONU et ayant son siège à Tripoli (ouest), et un pouvoir incarné par le maréchal Khalifa Haftar dans l'est.

La communauté internationale avait déjà auparavant massivement réagi face aux agressions turques. Dans un communiqué commun, Paris, Rome et Berlin avaient appelé en juin à la fin de «toutes les ingérences» d'acteurs étrangers en Libye et avaient exhorté les parties libyennes à «cesser immédiatement et sans condition les combats».

Le 29 juin, Emmanuel Macron avait accusé la Turquie d'avoir «massivement réimporté des combattants djihadistes depuis la Syrie». Pour le président français, la Turquie de Recep Tayyip Erdogan «ne respecte aucun de ses engagements de la conférence de Berlin [organisée en janvier]». Il avait déjà accusé Ankara, le 22 juin, de jouer un «jeu dangereux» en Libye, dans lequel il voyait une nouvelle démonstration de la «mort cérébrale» de l'OTAN.

Le 1er juillet, la France s'était même retirée temporairement de l'opération Sea Guardian et avait accusé la Turquie de violer l’embargo sur les armes à destination de la Libye ainsi que d'avoir visé une de ses frégates lors d'un contrôle de navires.

Ces manifestations ont eu lieu alors que le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, doit se rendre en Turquie ce 6 juillet, pour «discuter des problèmes et des propositions de solutions aux questions». La France a de son côté demandé l'ouverture d'un débat sur les contentieux entre l'Union européenne et la Turquie lors de la prochaine réunion des ministres des Affaires étrangères européens le 13 juillet.