L'homme fort de l'est libyen, le maréchal Khalifa Haftar, a déclaré le 27 avril «accepter la volonté du peuple et son mandat» pour gouverner le pays.
Ses forces œuvreront à «mettre en place les conditions nécessaires pour la construction des institutions pérennes d'un Etat civil», a déclaré le commandant en chef de l'Armée nationale libyenne qui, comme le rapporte l'AFP, n'a ni précisé auprès de quelle institution il avait reçu ledit «mandat du peuple», ni détaillé les implications politiques de ce mandat.
Comme il l'avait déjà fait par le passé, le maréchal a par ailleurs annoncé une nouvelle fois «la fin de l'accord de Skhirat», signé fin 2015 au Maroc sous l'égide de l'ONU.
Cet accord pour un «gouvernement d'entente nationale» (aussi connu sous l'acronyme anglophone GNA), dont est issu l'actuel gouvernement Fayez el-Sarraj, avait été entériné par les gouvernements libyens rivaux de Tobrouk et de Tripoli dans un contexte d'instabilité politique majeure, héritage malheureux de l'intervention militaire de l'OTAN en 2011 qui a mené à la chute de Mouammar Kadhafi.
Un conseiller politique du GNA a estimé que le maréchal Haftar avait «révélé une fois de plus au monde ses intentions autoritaires» : «Il ne cherche plus à cacher son mépris pour une solution politique et pour la démocratie en Libye. Sa déclaration de ce soir est un dernier acte désespéré d'un homme vaincu», a déclaré Mohammed Ali Abdallah cité par l'AFP.
La Russie «surprise» par la déclaration du maréchal Haftar
Comme le rapporte l'agence Reuters ce 28 avril, Moscou a commenté la déclaration du maréchal Haftar, estimant qu'il n'y avait pas d'autre solution pour résoudre le conflit que de maintenir une communication politique et diplomatique entre toutes les parties.
«La Russie reste en contact avec tous les participants du dossier libyen», a déclaré le porte-parole du Kremlin Dimitry Peskov, affirmant par ailleurs avoir été surpris de la position annoncée publiquement par le maréchal Haftar.
«Lorsqu'elles se sont rencontrées à Paris en décembre, les parties ont décidé de faire chacune son devoir à la maison avant de se réunir une nouvelle fois à Berlin au plus haut niveau. Les devoirs n'ont pas encore été faits, alors, bien sûr, nous voulons savoir quand cela sera fait. Nous voulons savoir quand nous pouvons nous réunir au plus haut niveau pour évaluer le travail accompli. C'est une question extrêmement importante pour Moscou, pour Berlin et pour Paris», a déclaré Dimitry Peskov.
Chaos et émergence du terrorisme en Libye
La Libye continue d'être le théâtre d'affrontements entre les deux camps rivaux malgré plusieurs initiatives internationales pour mettre fin au conflit.
Le territoire libyen est divisé en deux : à l’ouest, sur une bande territoriale au sein de laquelle se trouve Tripoli, s'étend le pouvoir du GNA. Si cette entité politique, basée dans la capitale, est reconnue par la communauté internationale, elle parvient difficilement à imposer son autorité sur ses propres milices.
En face, le maréchal Khalifa Haftar, qui dit tirer sa légitimité du Parlement de Tobrouk, également reconnu par la communauté internationale, contrôle la totalité de la Cyrénaïque (est du pays), ainsi qu’une large partie de la Tripolitaine (ouest) et du Fezzan (sud-ouest).
A la faveur du ralliement de plusieurs tribus et d’officiers, dont des ex-kadhafistes, le maréchal Khalifa Haftar a multiplié les succès militaires mais a dû battre en retraite après avoir échoué à prendre Tripoli en avril 2019.
Cette dégradation du climat politique et sécuritaire a conduit à une résurgence du terrorisme. En effet, si elle a certes perdu son bastion de Syrte en décembre 2016, la branche libyenne de Daesh a réussi, depuis le sud du pays, à se reconstituer afin de perpétrer des attaques de grande ampleur.