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L'Iran libère le chercheur français Roland Marchal

L'Elysée a annoncé que Téhéran avait procédé à la libération du chercheur français Roland Marchal, emprisonné depuis juin 2019. Il pourrait en réalité s'agir d'un échange de prisonniers entre la France et l'Iran.

Après neuf mois et demi de détention, l'Iran a libéré le chercheur français Roland Marchal, en échange, selon Téhéran, de la libération par la France d'un ingénieur iranien menacé d'extradition aux Etats-Unis. L'annonce a été faite par Paris dans un bref communiqué diffusé dans la matinée du 21 mars. Il est attendu en France en milieu de journée. Si Emmanuel Macron s'est dit «heureux» d'annoncer sa libération, il a en revanche de nouveau «exhorté les autorités iraniennes à libérer immédiatement notre compatriote Fariba Adelkha», chercheuse franco-iranienne toujours emprisonnée en Iran.

Roland Marchal avait été arrêté en juin 2019, en même temps que sa compagne, Fariba Adelkhah, chercheuse comme lui au Centre de recherches internationales (CERI) de Sciences Po Paris. La France n'a cessé de réclamer leur libération depuis. 

Le 20 mars, jour du Nouvel An persan, l'Iran a annoncé un échange de détenus entre Paris et Téhéran. La République islamique a indiqué que la France avait libéré l'ingénieur iranien Jalal Rohollahnejad, dont la justice française venait d'accepter l'extradition vers les Etats-Unis, sans préciser le nom du Français libéré dans l'échange. La présidence française, de son côté, se garde d'évoquer un échange de prisonniers.

L'anthropologue franco-iranienne Fariba Adelkhah, spécialiste du chiisme, 60 ans, et son compagnon, l'africaniste Roland Marchal, 64 ans, venu la rejoindre pour une visite privée, avaient été arrêtés par les Gardiens de la Révolution le 5 juin 2019 à l'aéroport de Téhéran. Tous deux étaient accusés de «collusion en vue d'attenter à la sûreté nationale», un crime passible de deux à cinq ans de prison. La chercheuse est aussi poursuivie pour «propagande contre le système». L'accusation d'espionnage la visant, passible de la peine de mort, a en revanche été levée en janvier. Seule Fariba Adelkhah est apparue le 3 mars à l'ouverture de leur procès, aussitôt reporté à une date non précisée.

Isolement quasi-complet

A Paris, leur comité de soutien a toujours clamé leur innocence et réclamé leur libération immédiate, disant craindre pour leur vie en raison de leur état de santé. «Nous accueillons avec soulagement l'arrivée de Roland Marchal à Paris après près de neuf mois de détention arbitraire dans des conditions très dures. Mais seule la moitié du chemin est parcourue», a rappelé à l'AFP Jean-François Bayart, professeur à l'IHEID (Institut de hautes études internationales et du développement) de Genève et membre de ce comité.

Leurs inquiétudes se sont renforcées en raison de la propagation accélérée du Covid-19 en Iran, un des pays les plus touchés au monde avec un bilan de 1 433 morts le 20 mars. L'épidémie est particulièrement redoutée en milieu carcéral. Fariba Adelkhah a en outre été très affaiblie par une grève de la faim de 49 jours. Roland Marchal, en isolement quasi-complet, était pour sa part très affecté «mentalement et physiquement», selon son avocat. 

Aucune information n'a filtré sur les circonstances de sa libération. Mais les deux chercheurs étaient considérés comme une possible monnaie d'échange pour la libération de l'ingénieur iranien, détenu en France depuis février 2019 et dont les Etats-Unis réclament l'extradition. Jalal Rohollahnejad est accusé par Washington d'avoir tenté de faire entrer en Iran du matériel technologique en violation des sanctions américaines contre Téhéran. 

Au cours des derniers mois, l'Iran a procédé à plusieurs échanges de prisonniers avec des pays détenant des ressortissants iraniens condamnés, en attente de procès, ou menacés d'extradition vers les Etats-Unis. Téhéran a aussi libéré plusieurs prisonniers emblématiques à l'occasion du Nouvel An persan, sur fond de coronavirus, alors que l'Iran, déjà exsangue en raison des sanctions américaines, est encore affaibli par la pandémie. 

Un Américain détenu depuis 2018 a ainsi été libéré le 19 mars, officiellement pour «raisons médicales», tandis que l'Irano-Britannique Nazanin Zaghari-Ratcliffe, employée de la Fondation Thomson Reuters, a obtenu le 17 mars une permission de sortie temporaire de la prison de Téhéran.