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«Indécente» : Paris dénonce une déclaration de l'ambassadeur du Mali visant des soldats français

L’ambassadeur du Mali en France a dénoncé le 27 février les «débordements» de la part de soldats français dans les rues de Bamako. La France a rapidement démenti cette mise en cause la jugeant dans la foulée d'«inacceptable».

La France a estimé le 27 février que la mise en cause du comportement de certains de ses soldats – accusés la veille par l'ambassadeur du Mali en France, Toumani Djimé Diallo, de «débordements» dans les quartiers chauds de Bamako – était «fausse, inacceptable et indécente». 

«Plutôt que de véhiculer et de propager de fausses accusations, nous attendons de l'ambassadeur du Mali qu'il mobilise toute son action pour la mise en œuvre des décisions du sommet de Pau et la réussite de tous», a réagi le cabinet de la ministre des Armées, Florence Parly, dans une déclaration transmise à l'AFP, rappelant dans la foulée qu'il n'y avait «quasiment plus de soldats français stationnés» dans la capitale malienne depuis août 2014.

«Cette mise en cause est non seulement fausse mais inacceptable», s'est le cabinet de Florence Parly avant d'ajouter : «Inacceptable et indécente quand la France s’est résolument engagée pour combattre les groupes terroristes qui menacent les populations du Sahel. Chaque jour, les militaires français risquent leur vie pour protéger les autres.»

Par moments, dans les "Pigalle" de Bamako, vous les retrouvez, tatoués sur tout le corps, en train de rendre une image qui n'est pas celle que nous connaissons de l'armée [française]

L'ambassadeur du Mali en France convoqué par le Quai d'Orsay

Signe du mécontentement des autorités françaises, le Quai d'Orsay a finalement convoqué le 27 février l'ambassadeur du Mali en France : «On lui a exprimé notre indignation devant ses propos sans fondement et choquants de la part d'un pays allié dans la lutte contre le terrorisme», a-t-on expliqué au ministère cité par l'AFP. 

Prenant part à la commission Défense du Sénat, à laquelle ont pris part les ambassadeurs des pays du G5 Sahel (Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger, Tchad), l'ambassadeur malien n'avait pas mâché ses mots à l'encontre de certains légionnaires français : «Par moments, dans les "Pigalle" de Bamako, vous les retrouvez, tatoués sur tout le corps, en train de rendre une image qui n'est pas celle que nous connaissons de l'armée [française]. Ça fait peur, ça intrigue», avait notamment-il affirmé en mentionnant explicitement les légionnaires. 

Et de renchérir : «C'est bien, parce qu'ils sont connus pour être âpres à la bataille, âpres au combat, mais ils sont aussi âpres au gain […] il y a des débordements qui posent problème», avait affirmé l'ambassadeur malien, ajoutant que certains d'entre eux faisaient «n'importe quoi dans les rues de Bamako, ce n'est pas bon pour l'image de la France.»

La présence française au Sahel contestée

Cette accusation d'écart de conduite avait été réfutée, le même jour, par le porte-parole de l'état-major, le colonel Frédéric Barbry : «Les légionnaires n'ont jamais été stationnés à Bamako, ils n'ont pas vocation à y aller et n'ont ni quartier libre ni temps de repos hors des bases opérationnelles» de Barkhane, situées dans le nord du pays, avait-il assuré à l'AFP.

Plus tard ce même jour, le Mali a décidé de rappeler son ambassadeur à Paris et de dépêcher son ministre des Affaires étrangères en France ont indiqué des responsables maliens. Celui-ci se rend à Paris «pour apaiser la situation», selon une source proche de la présidence.

La légitimité de la présence militaire de la France au Mali et plus largement au Sahel fait l'objet de nombreuses critiques. La persistance de la menace terroriste et certaines violences intercommunautaires exaspèrent une partie de l’opinion publique des pays sahéliens qui estime que l’action de Paris dans la région n’a guère contribué à un renforcement de la sécurité. Ainsi, le Mali et le Niger ont récemment été le théâtre, à plusieurs reprises, de manifestations contre la présence de la force Barkhane.

Au cœur des critiques figure notamment l’efficacité du dispositif militaire français incarnée par la Force Barkhane (5 100 hommes) qui peine à apporter des résultats probants sur le front sécuritaire.