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La France appelle les Etats-Unis à ne pas réduire leur engagement militaire au Sahel

Le souhait de Washington de réduire sa présence au Sahel inquiète Paris. Ce 27 janvier, le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a formulé le souhait que les Etats-Unis maintiennent leur «partenariat» avec la France dans la région.

«Nous espérons qu'ils prendront conscience que l'enjeu du terrorisme se passe aussi là et seront suffisamment lucides pour garder ce partenariat.» L'appel lancé ce 27 janvier par le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, est clair : la France a besoin de l'appui militaire américain au Sahel dans le cadre de son opération antiterroriste. Cette déclaration, prononcée par le patron du Quai d'Orsay lors de ses vœux à la presse, vient en écho aux annonces des Etats-Unis d'une potentielle réduction de leurs forces militaires sur le continent africain. 

La ministre française des Armées, Florence Parly, s'est également exprimée sur le sujet, à l'issue d'un entretien avec son homologue américain Mark Esper à Washington. Elle a déclaré que le soutien des Etats-Unis apporté aux soldats de l'opération Barkhane était «essentiel». Une réduction du soutien américain «limiterait gravement» l'efficacité des efforts français contre le terrorisme au Sahel, a-t-elle insisté.

Le 13 décembre dernier, le chef d'état-major américain, le général Mark Milley, avait en effet évoqué la réduction des ressources que le Pentagone consacre à l'Afrique et au Moyen-Orient. Celles-ci pourraient, selon lui, «être réduites et ensuite redirigées, soit pour améliorer la préparation de nos forces aux Etats-Unis soit vers le Pacifique». Une éventualité qui avait alors immédiatement fait réagir Emmanuel Macron.

A l’issue du dernier sommet du G5 Sahel organisé à Pau, soit quelques heures après l’intervention du général américain, le président de la République avait dit espérer «pouvoir convaincre le président [Donald] Trump que la lutte contre le terrorisme se joue aussi dans cette région [le Sahel] et que le sujet libyen n'est pas séparable de la situation au Sahel et dans la région du lac Tchad». En outre, les pays du G5 Sahel avaient aussi, dans leur déclaration finale, «exprimé leur reconnaissance à l'égard de l'appui crucial apporté par les Etats-Unis et [avaient] exprimé le souhait de sa continuité».

Washington fournit notamment à Barkhane − nom donné depuis août 2014 à l'opération militaire française au Sahel − des capacités de renseignement grâce à ses drones ainsi qu'une aide logistique, pour un montant de 45 millions de dollars par an.

Une stratégie militaire américaine floue 

Selon des chiffres rapportés par l'AFP, l'armée américaine déploie, par rotations, en Afrique quelque 7 000 soldats des forces spéciales qui mènent des opérations conjointes avec les armées nationales contre les djihadistes, notamment en Somalie.

Cependant la stratégie militaire américaine sur le continent reste floue : selon le site d’investigation américain The Intercept, qui dit s’appuyer sur des documents officiels, Africom (le commandement militaire américain coordonnant toutes les activités militaires et sécuritaires des Etats-Unis en Afrique) disposerait de 34 sites à travers le continent. Les documents obtenus auprès d'Africom mentionneraient «des sites non-confirmés dans des zones sensibles comme la Libye, le Niger et la Somalie». Un état des lieux qui contredit le discours officiel martelant une volonté de désengagement. 

En attendant, et malgré le déploiement de ces dispositifs militaires importants, les activités terroristes se multiplient dans la bande sahélienne. Autrefois épargnées, des régions situées en lisière de ce territoire long de plusieurs milliers de kilomètres ont été secouées par de nombreuses attaques terroristes au cours de ces dernières années. La résurgence des conflits inter-communautaires, notamment au Mali, est venue détériorer davantage un climat sécuritaire déjà délétère dans lequel l’armée française ainsi que les différentes armées nationales évoluent non sans en payer un lourd tribut

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