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Le prince héritier saoudien a-t-il aidé au piratage du téléphone du PDG d’Amazon ?

Selon The Guardian, Jeff Bezos aurait vu son téléphone piraté après avoir reçu un fichier vidéo malveillant de la part du compte WhatsApp de Mohammed ben Salmane, conduisant à l'extraction de données. L'Arabie saoudite a immédiatement démenti.

Selon un article du journal britannique The Guardian, mis en ligne le 21 janvier, le téléphone du PDG d’Amazon, Jeff Bezos, a été piraté avec l’aide du prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane. D’après le quotidien, citant des sources anonymes proches du dossier, le compte de l'actuel vice-Premier ministre du royaume wahhabite a envoyé, en 2018, sur la messagerie WhatsApp, un fichier vidéo malveillant ayant permis à des pirates de s’introduire dans le téléphone mobile du fondateur de la plateforme d'achats.

Une information confirmée par une analyse numérique mise en avant par The Guardian. Selon celle-ci, il est «hautement probable» qu'une intrusion dans le téléphone de l’homme d’affaires américain ait été causée par ce fameux fichier vidéo infecté. D’après le quotidien d'outre-Manche, qui s’appuie sur des sources proches du dossier souhaitant conserver l’anonymat, les deux hommes s’étaient entretenus sur la messagerie, le 1er mai 2018, dans un échange «amical», avant que le fichier possiblement infecté ne soit transféré vers le mobile de Jeff Bezos.

Une source proche du dossier a également confirmée auprès du journal britannique que de grandes quantités de données avaient été extraites du téléphone de Jeff Bezos en l’espace de quelques heures, sans toutefois préciser le contenu des données récupérées.

Jeff Bezos est propriétaire du Washington Post, qui employait comme chroniqueur Jamal Khashoggi, un journaliste saoudien critique envers les autorités saoudiennes, assassiné en octobre 2018 au consulat saoudien à Istanbul.

Le 21 janvier également, deux responsables des Nations unies ont réclamé une enquête sur le piratage présumé du téléphone du patron d'Amazon. Dans un communiqué, Agnès Callamard, rapporteur sur les exécutions extrajudiciaires, et David Kaye, rapporteur sur la liberté d'expression, ont déclaré : «Le piratage présumé du téléphone de M. Bezos, et de ceux d'autres personnes, exige une enquête immédiate de la part des autorités américaines et des autres autorités compétentes, y compris une enquête sur l'implication [...] directe et personnelle du prince héritier dans les efforts visant à cibler les opposants présumés». Ils ont également fait savoir qu'ils possédaient des informations sur la «possible implication» du prince saoudien Mohammed ben Salmane dans la «surveillance» du PDG d'Amazon.

Ces révélations font en outre écho à la publication, fin janvier 2019, par le tabloïd National Enquirer, de messages privés appartenant à Jeff Bezos, dans lesquels était révélée une aventure extra-conjugale de l’homme d’affaires, qui a conduit à son divorce. Le patron américain avait engagé une société pour découvrir comment des messages et photographies privées avaient pu parvenir au journal people. Cette société, Gavin de Becker & Associates, avait mis en cause les autorités saoudiennes, sans désigner précisément le responsable de ce piratage au sein du gouvernement saoudien, ni donné de détails sur ce qui lui avait permis d'affirmer cela.

L'Arabie saoudite dément

Ces accusations ont été immédiatement démenties par le royaume des Saoud. Sur Twitter, l’ambassade d’Arabie saoudite aux Etats-Unis a assuré, ce 22 janvier, que «les récents rapports des médias qui suggèrent que le Royaume est derrière le piratage du téléphone de M. Bezos sont absurdes», soulignant demander une «enquête sur ces allégations afin de pouvoir connaître précisément les faits».

Une ligne de défense reprise par le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Faiçal ben Farhan al Saoud, s’adressant à l'agence Reuters ce 22 janvier depuis Davos. «L'idée que le prince héritier pirate le téléphone de Jeff Bezos est complètement idiote», a-t-il fait valoir, qualifiant les accusations portées à l’encontre de Mohammed ben Salmane «d’absurdes».

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