Après l'électrochoc suscité par la sortie d'Emmanuel Macron sur l'OTAN début novembre – jugée en «état de mort cérébrale» – les déclarations du chef d'Etat français étaient très attendues à l'ouverture du sommet de l'Alliance atlantique. Et loin de s'excuser pour ses propos polémiques sur l'alliance ou de les minimiser, Emmanuel Macron a enfoncé le clou. «J'assume ces déclarations», a-t-il immédiatement lancé lors d'une rencontre avec Donald Trump en marge du sommet, ce 3 décembre.
S'il a pris toutes les précautions possibles pour ne pas froisser ses alliés, assurant que Paris serait «pleinement solidaire» des pays de l'est et du nord de l'Europe contre toute «menace extérieure», le locataire de l'Elysée a clairement exprimé sa volonté de réorienter la stratégie de l'Alliance, créée il y a 70 ans pour faire face à la menace soviétique. «L'Alliance s'est organisée pour faire face à la Russie historiquement. Aujourd'hui il nous faut regarder la nouvelle situation historique et aussi notre géographie», a-t-il affirmé. De fait, trois décennies après la fin de la Guerre froide, l'alliance atlantique laisse encore entendre qu'elle considère la Russie comme une menace. Moscou, de son côté, dénonce l'expansion de l'OTAN et les exercices militaires de l'alliance près de ses frontières.
Je pense qu'il y a un ennemi commun, c'est le terrorisme international, et en particulier le terrorisme islamiste. Soyons clair.
Dans ce contexte, le président français a fait valoir que l'ennemi des alliés de l'OTAN avait changé d'identité, et de nature : «L'ennemi commun aujourd'hui, ce sont les groupes terroristes. Et je suis désolé de le dire, mais nous n'avons pas la même définition du terrorisme [qu'Ankara]. Quand je regarde la Turquie, ils se battent à présent contre ceux qui ont combattu à nos côtés [en référence aux milices kurdes]. Et parfois ils travaillent avec des intermédiaires de l'EI.» Et de marteler : «Je pense qu'il y a un ennemi commun, c'est le terrorisme international, et en particulier le terrorisme islamiste. Soyons clair.»
Pour rappel, la sortie choc d'Emmanuel Macron début novembre faisait suite au désaccords entre ses membres, particulièrement Paris et Ankara, concernant l'intervention turque en Syrie. En amont du sommet, le chef d'Etat turc avait prévenu qu'il avait l'intention de bloquer un plan de l'alliance militaire concernant les pays baltes et la Pologne, tant que l'alliance ne reconnaîtrait pas comme «terroriste» la milice kurde des YPG combattue par Ankara en Syrie.
S'il a encouragé l'OTAN à faire évoluer sa position vis-à-vis de la Russie, soulignant l'importance «d'initier un dialogue stratégique» avec Moscou, Emmanuel Macron s'est par ailleurs défendu de toute «naïveté à l'égard de la Russie» lors de son intervention. Le président français a jugé nécessaire que certaines «préconditions» existent pour engager un tel dialogue. «Il faut des avancées sur le conflit entre la Russie et l'Ukraine», a-t-il dit, notant qu'une réunion au format Normandie était prévue dès le 9 décembre.