La Cour suprême israélienne a donné le 5 novembre son aval à l'expulsion d'Omar Shakir, citoyen américain et directeur de la branche locale de l’ONG Human Rights Watch (HRW). La décision ultime appartient désormais au gouvernement israélien, qui a mis fin en 2018 à son permis de séjour sur la foi d'informations selon lesquelles il soutiendrait une campagne prônant le boycott de l’Etat hébreu.
Tous ceux qui agissent contre Israël doivent savoir que nous ne leur permettrons pas de vivre, ni de travailler ici
Si le gouvernement l'approuve, il s'agira de la première expulsion de ce type selon une loi de 2017 autorisant l'expulsion des étrangers accusés de soutenir le boycott d'Israël. «J'aurais 20 jours pour partir et ce sera comme l'Iran, la Corée du Nord et l'Egypte qui bloquent l'accès des représentants de HRW [à leur pays]», a déclaré le directeur de l’ONG. Depuis la mise en place de cette loi, des personnes se sont déjà vu refuser l'entrée sur le territoire israélien.
Suite à cette annonce, le ministre israélien de l’Intérieur Arié Dery n’a pas caché son enthousiasme : «Je suis ravi que la Cour suprême ait validé ce matin ma décision de ne pas prolonger le visa d'Omar Shakir, l'un des dirigeants du mouvement BDS [Boycott, désinvestissement, sanctions], pour son soutien à l'entreprise de boycott contre Israël», a-t-il salué, avant d’ajouter que «tous ceux qui agissent contre Israël doivent savoir que nous ne leur permettrons pas de vivre, ni de travailler ici».
Des allégations contestées par HRW
L'ONG assure de son côté n'avoir jamais appelé au boycott d'Israël et qu'elle a «contesté avec vigueur» les allégations selon lesquelles Omar Shakir l'aurait fait depuis qu'il travaille pour HRW. Elle a expliqué qu'elle appelait les entreprises opérant dans les colonies israéliennes en Cisjordanie occupée, jugées illégales par l'ONU, à cesser de le faire, estimant qu'elles contribuaient aux violations des droits humains. Kenneth Roth, son directeur exécutif, a de son côté condamné la décision de la justice israélienne et prévenu que d'autres verdicts similaires suivraient, estimant que «la Cour suprême a déclaré dans les faits que la liberté d'expression en Israël ne couvre pas la défense des droits des Palestiniens». Le directeur exécutif de HRW a ajouté que «si le gouvernement expulse Omar Shakir pour avoir appelé les entreprises au respect des droits comme nous le faisons à travers le monde, on ne sait pas qui sera le prochain à être expulsé».
L'affaire visant Omar Shakir s'appuyait au départ sur des propos présumés en soutien du boycott qu'il aurait fait «dans un passé lointain», avant de travailler pour HRW, souligne l'ONG. Le gouvernement israélien a par la suite invoqué de nouveaux propos qui, selon lui, soutiennent la campagne de boycott d'Israël.
Le 9 mai 2018, le ministère israélien de l'Intérieur avait annoncé mettre fin au permis de séjour du directeur de l’ONG sur la foi d'informations selon lesquelles il est «depuis des années un militant du BDS soutenant le boycott d'Israël de manière active». Bête noire des autorités israéliennes, le BDS est une campagne mondiale de boycott économique, culturel ou scientifique d'Israël destinée à obtenir la fin de l'occupation et de la colonisation des Territoires palestiniens. Le gouvernement israélien considère qu'il s'agit d'une menace stratégique et dénonce l'entreprise de boycott comme une remise en cause de la légitimité d'Israël. Il accuse le BDS d'antisémitisme, ce que le mouvement dément.
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