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Le président algérien par intérim a-t-il rendu des comptes à Poutine ? Retour sur la polémique

Abdelkader Bensalah a récemment évoqué devant son homologue russe la situation politique qui prévaut dans son pays. Très vite, ces propos ont engendré une vive polémique en Algérie, à laquelle Moscou a coupé court.

Le 24 octobre, dans le cadre du sommet Russie-Afrique organisé dans la ville balnéaire de Sotchi, le président algérien par intérim Abdelkader Bensalah s’est entretenu avec son homologue russe Vladimir Poutine.

La rencontre est intervenue dans un contexte politique particulier côté algérien : en effet, Abdelkader Bensalah reste, à l'instar d'une grande partie de la classe politique, très contesté par la rue depuis sa prise de fonction à la suite de la démission d'Abdelaziz Bouteflika. Sa rencontre avec un responsable étranger de premier plan allait de fait constituer un événement politique majeur scrupuleusement suivi dans le pays. 

«Si j’ai demandé à vous rencontrer, c’est pour vous rassurer sur la situation en Algérie»

«Si j’ai demandé à vous rencontrer, c’est pour vous rassurer sur la situation en Algérie qui est maîtrisée et [vous dire] que nous sommes capables de dépasser cette conjoncture», a déclaré en préambule de son allocution le dirigeant algérien face à Vladimir Poutine, minimisant au passage le mouvement de contestation dans son pays.

Si pour le Kremlin cette déclaration (captée par la chaîne de télévision arabophone du groupe RT) ne prêtait pas à polémique, en Algérie, elle n'a guère laissé indifférent. En effet, à l'inverse de la déclaration de Vladimir Poutine qui a exprimé le souhait de voir le peuple algérien «surmonter les difficultés de la période de transition», les propos d’Abdelkader Bensalah ont engendré ni plus ni moins qu'une tempête médiatique et dans ce sillage agité la toile. 

De nombreux Algériens ont en effet vu dans cet épisode un acte de soumission face à la Russie. D'autres ont comparé la prestation des deux hommes à un jeu de rôle dans lequel Vladimir Poutine tiendrait celui du professeur et Abdelkader Bensalah celui de l’élève.

«Allo Poutine, tire moi d’affaires. Le peuple me rend fou», pouvait-on en outre entendre dans les rues d'Alger lors du dernier vendredi de protestation.

«On ne peut pas parler de comptes à rendre»

Ce 29 octobre, lors d’un point presse, le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov a coupé court à cette polémique naissante, soulignant qu’il était infondé de parler «de comptes à rendre» : «C’était une conversation tout à fait normale entre deux interlocuteurs lors d’une réunion bilatérale. Tout le monde sait qu'il y a actuellement en Algérie des préparatifs pour les élections à venir, il y a beaucoup de candidats. Bien évidemment, tout chef d’Etat, que ce soit un président par intérim ou non, assure ses interlocuteurs que dans son pays tout se passe absolument normalement, de manière prévisible et dans la légalité. C’est une pratique toute à fait courante. Donc, on ne peut pas parler de comptes à rendre.»

Si dans leur critique d’Abdelkader Bensalah certains ont assimilé la Russie à un Etat s’arrogeant un droit de regard dans les affaires internes de ses partenaires, Moscou a, depuis le début des événements, réitéré l'importance de laisser les Algériens résoudre eux-même la crise politique. 

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