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La CEDH condamne l'Ukraine pour la révocation de fonctionnaires après Maïdan

La démission forcée de cinq fonctionnaires ukrainiens à la suite de la destitution de Viktor Ianoukovitch a été condamnée par la Cour européenne des droits de l'Homme ce 17 octobre.

La Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) a condamné, ce 17 octobre, l'Ukraine pour la révocation de cinq fonctionnaires dans le cadre de la vaste purge de l'administration menée à la suite de la destitution du président ukranien Viktor Ianoukovitch.

Les juges de la CEDH ont conclu, à l'unanimité, que la loi promulguée en octobre 2014 par le président Petro Porochenko pour lutter contre la corruption et purger la fonction publique des cadres de l'ancien régime avait violé le droit à la vie privée de ces cinq fonctionnaires.

Cette loi dite «de lustration» ne tenait «aucun compte du comportement individuel ou d'une quelconque implication des personnes concernées dans des activités anti-démocratiques», ont-ils souligné.

Elle constituait l'une des revendications majeures des contestataires du mouvement du Maïdan, dont la mobilisation avait abouti en février 2014, à la fuite en Russie du président Viktor Ianoukovitch et au coup d’Etat.

Par cette loi de lustration, le nouveau président Petro Porochenko avait lancé une vague massive de contrôles des fonctionnaires et responsables politiques.

Parmi les cinq personnes qui avaient saisi la CEDH, trois avaient été révoquées pour avoir travaillé dans la fonction publique entre l'accession de Viktor Ianoukovitch à la présidence, en 2010, et son départ en 2014.

Une quatrième se voyait reprocher de ne pas avoir rempli à temps une déclaration de lustration et la cinquième d'avoir exercé des fonctions au sein du Parti communiste de l'ex-République socialiste soviétique d'Ukraine avant 1991.

«La Cour ne doute pas qu'à l'époque où l'ancien chef de l'Etat Viktor Ianoukovitch était au pouvoir, la fonction publique et le gouvernement démocratique ukrainiens étaient effectivement confrontés à des défis considérables qui appelaient une réforme», souligne la CEDH dans un communiqué.

Toutefois, elle constate que le champ «très large» d'application de la loi de lustration, la distingue «d'autres dispositifs de lustration plus étroitement ciblés mis en place dans un certain nombre d'États d'Europe centrale et orientale».

La CEDH souligne que les lois de lustration antérieures «concernaient des personnes accusées d'avoir collaboré avec les services de sécurité d'États totalitaires, tandis que les quatre premiers requérants travaillaient au service d'un État censé être fondé sur des principes constitutionnels démocratiques».

Des règles de «lustration» ont été introduites dans les arsenaux législatifs de la plupart des Etats de l'ancien bloc communiste pour empêcher les anciens membres du Parti communiste ou des polices politiques d'accéder aux fonctions administratives.

Dans ce dossier, la CEDH a également condamné l'Ukraine pour avoir violé le droit des trois premiers requérants à un procès équitable dans un délai raisonnable. Ils contestent leur révocation devant la justice ukrainienne depuis plus de quatre ans et demi.

La Cour a condamné Kiev à verser à chacun des cinq requérants 5 000 euros pour «dommage moral».