18 manifestants ont été écroués le 23 juin en Algérie pour «atteinte à l’unité nationale». Tous ont été interpellés en possession d’un drapeau berbère lors du dernier vendredi de mobilisation contre le pouvoir. Comme le rapporte l’AFP, qui s’appuie sur les déclarations des avocats des prévenus, 13 manifestants ont comparu devant le tribunal de Sidi M’hamed, dans le centre d'Alger, tandis que les cinq autres ont été présentés devant le tribunal de Bab El Oued, un quartier populaire de la capitale.
Selon ces avocats, leurs clients sont accusés sur la base de l’article 79 du Code pénal algérien. Celui-ci stipule que «quiconque, hors les cas prévus aux articles 77 et 78, a entrepris, par quelque moyen que ce soit, de porter atteinte à l’intégrité du territoire national, est puni d’un emprisonnement d’une durée d’un à 10 ans et d’une amende de 3 000 dinars [22 euros] à 70 000 dinars [518 euros]».
Des arrestations opérées après des «instructions strictes» données par l'armée
Ces décisions de justice surviennent quelques jours après l’avertissement lancé par le chef de l'état-major de l’armée, Ahmed Gaïd Salah. Alors qu’il réaffirmait l’engagement de l’armée à protéger le peuple algérien et à garantir la sécurité du pays «en toutes circonstances», le patron de l’armée avait fustigé la présence de drapeaux autres que celui de la nation algérienne lors des manifestations.
«Il est inacceptable de manipuler les sentiments et émotions du peuple algérien», avait-il prévenu, avant d’annoncer que «des instructions strictes» avaient été données aux forces de l’ordre pour «une application rigoureuse des lois en vigueur».
Ces propos ont été rapidement interprétés sur les réseaux sociaux et dans une partie de la presse comme une attaque à peine voilée à l’égard des Algériens berbérophones, qui représentent entre 20 et 30% de la population du pays. «Pas de régionalisme, tous frères !» ou «Gaïd Salah, dégage !», avaient scandé des milliers de manifestants en réponse au général algérien lors du dernier vendredi de contestation, le 21 juin.
Ce regain de tensions intervient alors que le pays ne parvient pas à sortir de l'impasse politique. Si Ahmed Gaïd Salah met en garde contre toute transition hors du cadre constitutionnel, estimant qu'elle aboutirait à la «destruction des fondements de l'Etat», l'opposition et les représentants de la société civile jugent inévitable la mise en place de nouvelles institutions afin de remettre à plat un système politique qu'elle honnit.