Sa réaction ne s'est pas fait attendre : alors que le projet de loi controversé sur la laïcité de l'Etat a été déposé le 28 mars par le gouvernement du Québec, le Premier ministre canadien a fait montre le même jour de sa désapprobation. Pour Justin Trudeau, chantre du «progressisme» et promoteur assumé du multiculturalisme au Canada, le contenu du texte proposé par le Premier ministre québecois François Legault – démocratiquement élu à la majorité absolue en octobre 2018 – est «impensable».
Il prévoit d'interdire le port de signes religieux à plusieurs catégories de fonctionnaires dont les policiers, les juges mais aussi les enseignants. Selon lui, cette initiative, l'une des principales promesses de campagne de la Coalition avenir Québec, revient à «légitimer la discrimination contre des citoyens en raison de leur religion». Bien qu'il ait reconnu n'avoir pas encore lu le texte législatif, il a estimé qu'il menaçait la «société libre», selon une retranscription de l'AFP.
Je suis très préoccupée par le message qu'envoie ce projet de loi, qui porte atteinte aux droits fondamentaux de certains individus
Prenant les devants et afin de se prémunir de toute contestation juridique, le gouvernement a invoqué une clause constitutionnelle qui lui permet de soustraire, pour une période de cinq ans, son projet de loi de l'application de la Charte canadienne des droits et libertés.
La maire de Montréal soutient Justin Trudeau
Ce document constitutionnel garantit «la liberté de religion» et, à ce titre, le port de signes religieux. Le chef de l'exécutif canadien a trouvé un soutien de poids en la personne de Valérie Plante, la maire de Montréal, plus grande ville du Québec.
«Je suis très préoccupée par le message qu'envoie ce projet de loi, qui porte atteinte aux droits fondamentaux de certains individus», a-t-elle déclaré le même jour. «Déjà, le projet de loi sur l'immigration avait envoyé un message négatif envers les populations immigrantes de la métropole et de l'ensemble du Québec», a-t-elle encore tancé dans une allusion au plan du gouvernement de réduire les seuils d'immigration. «Certains trouveront que nous allons trop loin, d'autres pas assez. Pour notre part, nous sommes convaincus d'avoir trouvé le juste équilibre», s'est pour sa part défendu devant la presse Simon Jolin-Barrette, ministre de l'Immigration et responsable de la réforme.
Ce projet de loi constitue un véritable geste d'affirmation. Il s'agit d'inscrire pour la toute première fois dans les lois du Québec le principe de laïcité de l'Etat
Il a précisé que l’interdiction du port de signes religieux ne s'appliquerait qu'aux nouveaux employés des services publics, les fonctionnaires en position d'autorité déjà en poste conservant un droit acquis tant qu'ils occupent «la même fonction dans la même organisation». Le Premier ministre québécois François Legault a lui souligné qu'il souhaitait que ce débat se fasse «sans dérapage, ou avec le moins de dérapage possible». «Ce projet de loi constitue un véritable geste d'affirmation. Il s'agit d'inscrire pour la toute première fois dans les lois du Québec le principe de laïcité de l'Etat», a-t-il fait valoir.
Par ailleurs, les députés québécois ont voté à l'unanimité une motion selon laquelle le crucifix trônant à l'Assemblée nationale du Québec sera décroché en cas d'adoption du projet de la loi laïcité.