C'est un événement inédit dans un pays musulman, où les fidèles chrétiens demeurent d'ordinaire relativement discrets : ce 5 février, à Abou Dhabi, le pape François a célébré une messe devant plus de 120 000 fidèles dans l'enceinte du stade Cheikh-Zayed des Émirats arabes unis.
Le souverain pontife a commencé sa visite dans le pays en rappelant qu'il priait pour les Yéménites, dont le pays est en proie à un conflit extrêmement meurtrier depuis plusieurs années, et a ensuite appelé, lors d'une rencontre interreligieuse internationale, à la paix dans ce pays pauvre par où le christianisme s'est introduit dans la péninsule arabique au XIXe siècle. Ce mouvement diplomatique était d'autant plus audacieux que les Emirats interviennent militairement au Yémen voisin, aux côtés de l'Arabie saoudite, pour soutenir le gouvernement en guerre contre des rebelles appuyés par l'Iran.
Une clameur immense s'est élevée dans le stade à l'arrivée du chef de l'Eglise catholique. La papamobile s'est arrêtée pour permettre à François de bénir deux fillettes sorties de la foule pour venir à sa rencontre. La ferveur était palpable dans la foule appartenant, selon l'église locale, à une centaine de nationalités et qui était installée à l'intérieur et à l'extérieur du stade où des écrans géants avaient été mis en place.
Quelque 4 000 musulmans étaient également présents et on a pu apercevoir des femmes en abaya noire portant des talons aiguille. Un drapeau palestinien s'est aussi détaché parmi la multitude de banderoles aux couleurs du Vatican.
Dans l'avion qui le ramenait à Rome après cette brève mais intense visite de moins de 48 heures à Abou Dhabi, le chef des quelque 1,3 milliard de catholiques est revenu sur le «document sur la fraternité humaine», co-signé la veille au soir avec le grand imam sunnite de l'institut égyptien Al-Azhar, cheikh Ahmed al-Tayeb.
Dans ce document sans langue de bois, le pape et l'imam ont notamment condamné ensemble terrorisme et guerres. Ils ont aussi appelé à la liberté de croyance et d'expression, à la protection des lieux de culte, et ont prôné une pleine citoyenneté pour les minorités discriminées. «Le document a été préparé avec grande réflexion et aussi en priant», a expliqué le souverain pontife. «Parce que pour moi, il y a un seul grand danger en ce moment : la destruction, la guerre, la haine entre nous. Et si nous, croyants, nous ne sommes pas capables de nous donner la main, nous embrasser [...], notre foi sera défaite», a-t-il commenté.
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