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Alexeï Pouchkov : «Nous vivons aujourd’hui dans un monde où l’information est à 50% fausse» (VIDEO)

Dans un entretien à Thinkerview, le sénateur russe Alexeï Pouchkov est revenu sur plusieurs sujets d'actualité brûlants : Gilets jaunes, accusation d'ingérence de la Russie dans des élections occidentales ou encore ferme à trolls.

Alexeï Pouchkov est un sénateur russe, président de la Commission pour l'information et la coopération avec les médias du Conseil de la Fédération (chambre haute du Parlement russe) et ancien président de la Commission des affaires internationales de la Douma, la chambre basse du Parlement russe. Il a accordé une interview à la chaîne YouTube Thinkerview.

Les Gilets jaunes vus de Russie

«Beaucoup de personnes disent que le mouvement des Gilets jaunes n'aurait jamais pu s'opérer en Russie parce que Vladimir Poutine n'aurait jamais laissé faire ça», lui demande l'intervieweur.

Je ne pense pas qu'en Russie ce seront des Gilets jaunes copiés sur les Gilets jaunes français

«Je pense que les Gilets jaunes deviennent une culture internationale parce que j'ai entendu qu'en Israël c'est les casques jaunes déjà. Dans plusieurs pays comme la Belgique, il y a également des Gilets jaunes. Donc si ça devient une culture de protestation comme le #Meetoo [..] ça peut venir en Russie puisque dans le monde entier on en parle», répond alors Alexeï Pouchkov. Pour lui, «les gens qui protestent aujourd’hui [en Russie] sans Gilets jaunes vont désormais protester avec des Gilets jaunes». Néanmoins, il ne pense pas que cela va «changer la donne» car «c'est une question de forme, pas de substance». «Je ne pense pas qu'en Russie ce seront des Gilets jaunes copiés sur les Gilets jaunes français», a encore estimé le sénateur russe.

La Russie derrière les Gilets jaunes ?

«Des journaux britanniques ont accusé la Russie d'être derrière les Gilets jaunes. J'ai vu un article dans le Times qui a dit : Ah, mais c'est les Russes !», a expliqué à ce sujet le parlementaire, en référence aux accusations portées par certains médias occidentaux.

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Que des Ukrainiens viennent expliquer aux Gilets jaunes que ce sont les Russes qui sont derrière : je veux voir [leur] réaction

«Les services spéciaux ukrainiens ont également dit que oui, ce sont les service secrets russes qui sont derrière les Gilets Jaunes ! Ce que je veux proposer, c'est que des Ukrainiens viennent expliquer aux Gilets jaunes que ce sont les Russes qui sont derrière : je veux voir la réaction des Gilets jaunes ! Parce que je ne pense pas qu'ils aient vu un seul russe pendant toutes ces manifestations et même avant», a-t-il poursuivi.

Accusations d'ingérence russe dans les élections européennes

«La Russie est accusée d'ingérence, par exemple de soutenir la Ligue de Monsieur Salvini : dans tous les pays où il y a eu développement qui ne convient pas aux élites traditionnelles libérales, la Russie est accusée de faire partie de ce changement. Mais, à vrai dire, la Russie n'a rien à voir avec ça : je pense qu'en fait les élites traditionnelles n'ont pas de réponses à apporter aux questions qui sont posées par les élites traditionnelles européennes», a fait savoir Alexeï Pouchkov, estimant que la Russie était «un bouc émissaire». Il a également donné en exemple les élections fédérales allemandes de 2018.

On a également dit que la Russie avait participé au Brexit. Mais non, ce sont les britanniques qui ont fait le Brexit !

«Quand il y a eu cette élection, il y a eu beaucoup de rumeurs qui disaient que les Russes allaient essayer d'influencer l'élection, et puis il y a eu une déclaration des services spéciaux allemand qui ont dit qu'il n'y avait pas eu d'ingérence. Et là, le Bild a titré en 1ère page : "Mais où sont les Russes ?" Car on n'en a pas trouvé pendant les élections allemandes. On a également dit que la Russie avait participé au Brexit. Mais non, ce sont les Britanniques qui ont fait le Brexit !», a-t-il ainsi expliqué.

La question des fermes à trolls

Interrogé sur une ferme de trolls russes de Saint-Pétersbourg, Alexeï Pouchkov a évoqué «une chose assez douteuse». «Je ne peux pas vous garantir qu'il n'y avait pas 12 ou 15 personnes qui n'ont pas joué sur les réseaux sociaux», embraie le sénateur.

Vous voulez me dire qu'avec ce volume on peut influencer les élections américaines ? Je ne trouve pas cela sérieux

Relancé par l'intervieweur sur le fait que cette usine à trolls se serait agrandie, passant de 4 000m2 à 14 000m2, le parlementaire a expliqué, citant un rapport de la commission du renseignement du Sénat américain, que le volume de la participation des trolls russes au trafic sur les réseaux sociaux aux Etats-Unis était de 0,0004% du flux Facebook journalier. «Vous voulez me dire qu'avec ce volume, on peut influencer les élections américaines ? Je ne trouve pas cela sérieux», a tancé Alexeï Pouchkov.

La loi française sur les fake news

«On a pas de loi sur les fake news en Russie», a commenté Alexeï Pouchkov, expliquant par ailleurs que la liberté de la presse était «une notion relative» et ajoutant : «Nous vivons dans un monde aujourd’hui où l’information est à 50% fausse»

Je pense que toutes les lois qui limitent l'expression de la presse ont tendance à devenir de la censure

En Russie, il y a en revanche des lois contre la calomnie qui limitent la presse contre les attaques personnelles. «Je pense que toutes les lois qui limitent l'expression de la presse ont tendance à devenir de la censure», a-t-il estimé. «C'est aux Français de décider s'ils ont besoin de cette loi sur les fake news», a ajouté le membre de la chambre haute du Parlement russe.

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