Jeudi 20 décembre
Selon Vladimir Poutine, les deux principaux événements de l'année en Russie ont été la Coupe du monde de football et l'élection présidentielle.
Vladimir Poutine a reconnu qu'il avait existé un problème de dopage en Russie mais nié une implication des autorités. «Nous n'avons pas su organiser la lutte contre le dopage de manière efficace», a-t-il toutefois reconnu, notant que le problème n'était cependant pas limité à la Russie mais touchait le monde entier. Il a en outre dénoncé le problème de la «politisation» de la lutte antidopage.
Affirmant qu'il souhaitait améliorer et développer les relations entre Moscou et Washington, le président russe s'est arrêté un instant sur les obstacles existants. «On voit que la composition du Congrès américain change, on peut donc s'attendre à ce que il y ait de nouvelles attaques contre le président. Je ne sais pas si on va pouvoir avoir un dialogue direct», a-t-il fait valoir.
«Au sein du monde anglo-saxon, il y a un certain nombre de secousses tectoniques qui se produisent. Donald Trump a gagné mais certains ne veulent pas reconnaître cette victoire, c'est un manque de respect envers les électeurs américains. Ils font tout pour délégitimiser le président en exercice», a-t-il noté, dressant un parallèle avec le résultat du vote sur le Brexit en Grande-Bretagne, que beaucoup ne veulent pas respecter.
«C'est un processus grave», a encore jugé le président russe.
«Est-ce que vous voulez dominer le monde ?», a demandé une journaliste du Wall Street Journal au président russe. «Vous savez très bien que les Etats-Unis dépensent plus de 700 milliards de dollars par an pour la défense. Pour les pays de l'OTAN, le budget est de 600 milliards. Nous sommes à 46. Vous croyez que c'est nous qui voulons diriger le monde?», a répliqué Vladimir Poutine.
«Pour qu'il y ait une cohésion au sein d'un bloc, disons par exemple des pays de l'OTAN, il faut qu'il y ait une menace extérieure. Sinon cette cohésion ne se maintient pas», a poursuivi le président russe, dénonçant la «russophobie» qu'une telle logique entraînait.
Interrogé sur la «dédollarisation de l'économie russe», le président russe a noté que les transactions en dollar avaient légèrement diminué, selon les chiffres du FMI. Il a affirmé la volonté du gouvernement de favoriser les règlement en roubles qui est «fiable» et, à la différence du dollar, «n'entraîne aucun coût supplémentaire».
En juillet 2018, trois journalistes russes avaient été retrouvés morts dans une voiture criblée de balles en République centrafricaine. Commentant l'affaire, Vladimir Poutine a fermement condamné leur assassinat, considérant qu'il s'agissait d'une «tragédie».
Il a précisé qu'ils s'y étaient rendus en tant que touristes, et non en leur qualité de journalistes. Selon les premières données révélées par l'enquête, ils auraient été tués par un groupe de militants locaux.
Un journaliste a demandé au président russe quand il se marierait. «En tant qu'honnête homme, je devrai un jour le faire», a répondu Vladimir Poutine dans un sourire.
Le président russe s'est exprimé à propos du Brexit, et de la crise que traverse le gouvernement britannique, qui peine à mener le processus à son terme.
«Il y a eu un référendum. Les gens ont exprimé leur volonté, il faut respecter leur vote. Ou alors ce n'est pas un référendum», a-t-il déclaré. «Cela m'intéresse de voir quelles seront les critiques si le Brexit fait l'objet d'un nouveau référendum», a-t-il poursuivi avant de s'interroger : «C'est la démocratie ça ? Quel est le sens de la démocratie directe ?»
Et de conclure : «Enfin c'est leur affaire, ce n'est pas la nôtre.»
Sur les Gilets jaunes, le président russe a estimé que l'augmentation des tarifs des carburants était un «détonateur» de l'ensemble des mécontentements. «Ce sont généralement des Français de souche qui manifestent», a-t-il poursuivi, soulignant qu'ils étaient soutenus par une large majorité de la population.
«Le comportement des autorités est à mon avis très peu approprié», a-t-il poursuivi, s'interrogeant sur le choix du gouvernement français d'augmenter les taxes sur le carburant.
Vladimir Poutine est revenu sur les sanctions qui touchent les habitants de Crimée, dénonçant la logique occidentale sur la question. «Vous vous êtes l'objet de sanction, de limitation de visas, concernant les opérations financières, d'assurances, etc... Ceci concerne pratiquement tous les habitants de Crimée. Ils tombent sous le coup de sanctions. Non pas contre les dirigeants seulement mais contre tous les habitants de Crimée», a-t-il rappelé.
«De l'extérieur, on parle d'annexion de la Crimée par la Russie. Qu'est que c'est que une annexion ? C'est une occupation manu militari. Si c'était une occupation manu militari, alors les habitants de Crimée n'y seraient pour rien», a poursuivi le président russe. «Pourquoi est-ce que les sanctions vous visent ?», s'est-il alors interrogé avant de répondre à sa propre question : «Si c'est à cause de votre vote, c'est qu'il faut reconnaître que le vote a eu lieu.»
«Nous progressons dans la voie du règlement politique», a expliqué le président russe concernant la situation en Syrie, soulignant les récentes avancées sur la mise en place d'un Comité constitutionnel dans le pays.
Il a rappelé qu'en concertation avec le président Bachar el-Assad mais aussi la Turquie et l'Iran, une liste de personnes avaient été établie pour constituer ce Comité. «Nous avons présenté cette liste à l'ONU», a-t-il précisé, espérant que la situation pourrait avancer d'ici le début de l'année.
Sur la situation en Syrie, le président russe a tout d'abord déclaré qu'il était d'accord avec le président américain concernant la victoire sur Daech. «Nous avons procédé à des frappes décisives», a-t-il précisé.
Il a toutefois signalé la menace que représentait le déplacement des combattants de l'Etat islamique dans d'autres régions et dans des pays voisins : «C'est un grand danger pour nous tous.»
«Concernant le retrait des troupes américaines, je ne sais pas ce que cela implique. Les troupes américaines sont présentes en Afghanistan depuis 17 ans et chaque année, ils disent qu'ils vont quitter le pays, mais ils sont toujours là», a déclaré le président russe en référence à l'annonce de Donald Trump sur un retrait de ses troupes en Syrie.
«Nous n'avons pas d'informations sur le retrait des américains de Syrie», a-t-il précisé.
Le président russe a souligné l'importance de la bonne entente entre la Russie et la Chine, dont la coopération est un «facteur de stabilité dans le monde». «Nous ne coopérons pas seulement dans le domaine économique mais aussi dans celui de la défense. Nous coopérons sur la scène internationale», a-t-il précisé, notant que cela rendait «le monde plus prévisible».
Interrogé sur les relations russo-japonaises, Vladimir Poutine a fait part de son inquiétude quant au déploiement d'un système balistique américain sur le territoire japonais, précisant que les questions de sécurité étaient extrêmement importantes dans le traité de paix avec Tokyo.
La Russie ne se fait pas d'illusions sur la nature «défensive» des ces systèmes, qui travaillent de façon synchronisée avec les armes offensives, selon le président russe.
Le président russe a souligné la différence de traitement par la communauté internationale entre l'affaire Skripal et l'affaire Khashoggi. Notant que l'ex-agent double russe n'était pas mort, contrairement au journaliste saoudien, il a souligné que seule Moscou avait été visée par des sanctions. «L'objectif est de freiner autant que possible le développement de la Russie», a-t-il expliqué.
«Nous sommes perçus comme un rival», a poursuivi le président russe, relancé sur le sujet des sanctions. Il a ajouté que la Russie avait du faire face à des sanctions «à travers son histoire». «La "russophobie politisée" est utilisée par l'Occident pour contenir la Russie en tant que concurrent sur la scène internationale», a-t-il analysé.
Sur la question de l'incident de Kertch en Crimée, Vladimir Poutine a répété qu'il s'agissait d'une «provocation», laissant entendre qu'elle avait principalement une visée électoraliste. «Porochenko a fait monter sa cote de popularité préélectorale au détriment des intérêts du pays, c'est un mauvais moyen. Les provocations sont toujours mauvaises, elles aggravent la situation», a-t-il affirmé.
Le président russe a ajouté que Kiev avait envoyé des soldats ukrainiens dans le détroit «dans l'espoir qu'ils mourraient, mais Dieu merci, cela ne s'est pas produit». Il a précisé qu’ils avaient violé la frontière maritime russe et que, une fois l’enquête pénale terminée, il ne serait plus facile de savoir que faire des militaires détenus.
«La tentative de résoudre des problèmes manu militari, que nous constatons de la part de Kiev depuis des années, est vouée à l'échec. C'est une impasse», a-t-il ajouté.
Concernant une course aux armements dénoncée par les Etats-Unis, le président russe a déclaré que la Russie avait certes obtenu un avantage grâce à de nouvelles armes, mais qu’il s’agissait en général de maintenir la parité.
Il s'est par ailleurs inquiété du retrait de Washington du traité INF. «Il est difficile de dire ce qui va arriver», a-t-il déclaré, avant de revenir sur un éventuel conflit nucléaire. «Le danger d'un tel scénario dans le monde est occulté, alors que cela peut entraîner la disparition de la civilisation et même de la planète», a-t-il souligné.
«Pour la première fois depuis 2011, nous avons un excédent budgétaire», a noté le président russe, expliquant qu'il s'établissait à 2,1% du PIB. «En tant que pays producteur de pétrole, ne ne devons pas oublier que nous avons un déficit en matière d'hydrocarbure», a-t-il toutefois souligné.
Le président russe a commencé par donner des indicateurs économiques du pays, notant que le chômage avait baissé pour atteindre un niveau record de 4,8%, et que le PIB avait augmenté de 1,7% en 2018.
Il ensuite pris la première question, qui porte sur la politique intérieure et les projets de dépenses publiques du gouvernement. Vladimir Poutine a expliqué que des fonds allaient être alloués pour des «projets d'envergure nationale».
Des projets qui concernent les infrastructures du pays mais aussi d'autres domaines comme l'enseignement, la science, ou encore «le capital humain». «Sans capital humain nous ne pourrions pas développer notre économie», a soutenu le président russe.
Les journalistes attendent le début de la plus importante conférence de presse de l'année du président russe, qui devrait commencer d'un instant à l'autre. La durée de celle-ci est, comme toujours, l'objet de spéculation. La plus courte, en 2001, avait duré 95 minutes, alors que lors de la plus longue, en 2008, Vladimir Poutine avait répondu aux questions pendant 4 heures et 40 minutes.
Plus de 1 700 journalistes en provenance de la quasi-totalité des régions russes, d'Asie, d'Europe et d'Amérique ont été accrédités pour la traditionnelle conférence de presse de fin d'année du président russe, qui se tient au Centre international du commerce à Moscou. Il s'agit de la quatorzième pour Vladimir Poutine.
L'avancée vers une résolution politique du conflit en Syrie, d'où les Etats-Unis ont annoncé leur retrait, le regain des tensions avec Kiev suite à l'incident de Kertch en Crimée, le confrontation avec Washington qui menace de se retirer du traité sur les armes nucléaires à portée intermédiaires, sont quelques uns des sujets sur lesquels le président russe devrait être interrogé.