Alors que les médias russes RT France et Sputnik, longtemps mis à l'écart par la présidence française, devraient enfin pouvoir couvrir les événements et les conférences de presse de l'Elysée, la chaîne américaine CNN a attaqué en justice, ce 13 novembre, l'administration Trump pour avoir retiré l'accréditation de l'un de ses journalistes après un échange houleux avec le président. «CNN a assigné l'administration Trump en justice devant un tribunal fédéral de Washington», a ainsi annoncé une des journalistes de la chaîne. «Elle demande le rétablissement de l'accréditation de son correspondant en chef à la Maison Blanche, Jim Acosta», a-t-elle en outre ajouté. «Il est très clair que la décision a été prise à cause du contenu de sa couverture», a déclaré en direct Ted Boutrous, l'avocat de CNN qui estimait alors que la décision de la Maison Blanche portait atteinte au premier amendement.
La Maison Blanche se défend de toute atteinte à la liberté de la presse
«C'est encore de la démagogie de la part de CNN, et nous allons nous défendre vigoureusement», a répliqué la porte-parole de la Maison Blanche Sarah Sanders dans un communiqué, en soulignant que CNN détenait au total près de 50 accréditations. CNN, dont la relation conflictuelle avec Donald Trump est une constante depuis l'arrivée du milliardaire au pouvoir, a assuré avoir tout fait pour éviter d'aller devant les tribunaux, intercédant depuis le 7 novembre auprès de l'administration Trump pour qu'elle rende ladite accréditation.
La Maison Blanche avait annoncé le retrait de l'accréditation de Jim Acosta – une sanction inédite – après un échange particulièrement houleux le 7 novembre entre le journaliste et le président américain, lors d'une conférence de presse. Jim Acosta avait, dans ses questions, critiqué notamment la façon dont Donald Trump, pendant la campagne pour les législatives américaines du 6 novembre, présenté comme une menace la «caravane» de plusieurs milliers de migrants centraméricains qui prenait la direction de la frontière américano-mexicaine. «CNN devrait avoir honte de vous employer, vous êtes très impoli et vous êtes une personne horrible» avait rétorqué Donald Trump, en réponse au journaliste qui refusait de rendre le micro.
La Maison Blanche avait ensuite annoncé la suspension de l'accréditation de Jim Acosta «jusqu'à nouvel ordre», invoquant non les questions insistantes du journaliste, mais ce qu'elle avait présenté comme un comportement déplacé envers une jeune stagiaire chargée de récupérer le micro.
Ce 13 novembre, l'administration au pouvoir n'a pas repris cet argument, soulignant uniquement le refus de Jim Acosta de rendre le micro après plusieurs questions. «Le Premier amendement n'est pas honoré lorsqu'un seul journaliste, sur plus de 150 présents, tente de monopoliser la parole», a estimé Sarah Sanders. «S'il n'y a pas de sanction pour ce genre de comportement, cela nuit à la capacité du président, du personnel de la Maison Blanche et des membres des médias de faire leur travail».
Donald Trump et les médias : une relation électrique
Depuis son arrivée au pouvoir, le président américain critique en particulier CNN – mais aussi de nombreux autres médias américains, la chaîne conservatrice Fox News exceptée – pour leur couverture qu'il considère comme négative de sa présidence. L'association des journalistes de la Maison Blanche a annoncé «soutenir fermement» CNN dans cette affaire.
Révoquer l'accréditation «constituait une réaction disproportionnée aux évènements du [7 novembre]», a estimé l'association dans un communiqué. «Le président des Etats Unis n'a pas à choisir les hommes ou les femmes qui le couvrent.» L'institut Knight de l'université Columbia, spécialisé dans la défense de la liberté de la presse, a également estimé que l'assignation en justice était «entièrement justifiée».
En attendant une réaction de Donald Trump lui-même, CNN a rediffusé des extraits d'un enregistrement audio du milliardaire, lorsqu'il n'était encore que candidat à la présidence mais déjà très critique des médias, au point de bannir plusieurs médias de ses meetings électoraux. Dans cet enregistrement, il assurait que s'il était élu président des Etats-Unis, ce serait différent, il ne prendrait jamais une telle mesure. L'avocat de CNN a souhaité obtenir rapidement une injonction temporaire de restitution de l'accréditation de Jim Acosta en attendant une décision à plus long terme.