Dans son rapport trimestriel au Congrès américain publié le 31 octobre, le SIGAR (Special Inspector General for Afghanistan Reconstruction), un organisme public américain chargé de contrôler l'action des Etats-Unis en Afghanistan, dresse un constat d'échec sans concession dans la lutte menée par Washington contre la production et le trafic de drogue.
«Aucun programme de lutte contre les drogues entrepris [2002-2017] par les États-Unis, leurs partenaires de la coalition ou le gouvernement afghan n'a entraîné de réduction durable de la culture du pavot ou de la production d'opium», juge ainsi le rapport.
Pourtant, les autorités américaines n'ont pas lésiné sur les moyens pour venir à bout de cette source de financement des talibans. Entre 2002 et septembre 2018, les Etats-Unis ont dépensé pas moins de 1,5 millions de dollars par jour à cet effet. Au 30 septembre 2018, le montant des aides au gouvernement afghan pour lutter contre les stupéfiants a atteint un total de 8,88 milliards de dollars.
«Le trafic de drogue reste enraciné et se développe»
Mais en dépit de ces dépenses faramineuses, «le trafic de drogue reste enraciné et se développe en Afghanistan», déplore la rapport, chiffres à l'appui. Il note ainsi que d'après l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC), la culture du pavot à opium a augmenté de manière significative pour atteindre un record de 328 000 hectares en 2017. Lorsque les Etats-Unis ont entamé leur programme de lutte contre la drogue en Afghanistan en 2002, la culture de pavot à opium s'étendait sur 74 000 hectares selon l'ONUDC, soit plus de quatre fois moins.
Le SIGAR estime également que l'impact économique de l'opium dans le pays a explosé, sa seule culture représentant 590 000 emplois à plein temps. Rapportant entre 4,1 et 6,6 milliards de dollars, le trafic d'opium permet ainsi à de nombreux fermiers de survivre, «mais les rentrées d'argent viennent aussi remplir la trésorerie des talibans, qui poursuivent leurs efforts pour renverser le gouvernement internationalement reconnu basé à Kaboul», souligne le SIGAR.
Pas étonnant dans ces circonstances que la situation aille en s'aggravant sur le terrain pour les autorités afghanes, et ce en dépit d'une présence militaire américaine forte de plusieurs milliers d'hommes. Selon le rapport du SIGAR, à peine plus de la moitié (55,5%) des districts afghans sont sous le contrôle du gouvernement de Kaboul. Il s'agit du chiffre le plus bas depuis que le SIGAR a entamé cette estimation en novembre 2015.