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L'Otan et Poutine félicitent Recep Tayyip Erdogan, l'Europe plus prudente

Le secrétaire général de l'Otan a congratulé le président turc pour sa réélection, tout comme Vladimir Poutine. Mais l'Europe, hormis Viktor Orban qui n'a pas tardé à saluer ce résultat pour la stabilité du continent, s'est montrée plus prudente.

Le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg a félicité le 25 juin le président turc Recep Tayyip Erdogan pour sa réélection, tout en rappelant les «valeurs fondamentales» sur lesquelles l'Alliance a été fondée : démocratie et Etat de droit. 

«Je vais féliciter le président Erdogan pour sa réélection en tant que président. Je félicite aussi le peuple turc pour la participation élevée aux élections», a déclaré le Norvégien à son arrivée à une réunion des ministres des Affaires étrangères et de la Défense à Luxembourg.

Cette déclaration favorable n'est qu'une demi-surprise après la validation d'un récent accord des Etats-Unis avec l'armée turque mi-juin pour le contrôle des abords de la ville syrienne de Minbej. Celui-ci a montré que les Américains étaient capables de s'entendre avec les Turcs après une période émaillée de tensions, quitte à composer avec leurs exigences pour continuer à peser dans l'issue du conflit syrien. La Turquie est en outre un membre important au sein de l'Alliance atlantique de par sa situation stratégique sur son flanc Sud et sa proximité géographique avec la Russie, et joue un rôle clé dans le combat contre le groupe Etat islamique dans la zone irako-syrienne.

Les félicitions de Vladimir Poutine

Le président russe Vladimir Poutine a aussi salué le succès du président turc et a appelé à un renforcement des liens entre Moscou et Ankara au cours d'un appel téléphonique. Dans un télégramme de félicitations, il a souligné que «les résultats de l'élection [attestaient] pleinement de la grande autorité politique de Recep Tayyip Erdogan». Un communiqué du Kremlin a fait savoir que la réélection du président turc dès le premier tour témoignait «du large soutien accordé au cap fixé sous sa direction sur les questions sociales et économiques à laquelle la Turquie est confrontée, et au renforcement de la position du pays en termes de politique étrangère». Le rapprochement entre Moscou et Ankara est manifeste. Les deux pays se sont liés par un contrat d'achat de missiles de défense aérienne russes par la Turquie en septembre 2017.

La Hongrie et la Bulgarie, premières à se manifester en Europe

Mais l'Europe est restée prudente dans ses réactions. La Commission européenne a ainsi fait savoir qu'elle attendait l'évaluation finale de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) sur la tenue des élections.

«Nous espérons que sous la direction du président Erdogan la Turquie restera un partenaire engagé avec l'UE sur des sujets majeurs d'intérêt commun, comme la migration, la sécurité, la stabilité de la région et la bataille contre le terrorisme», a déclaré le porte-parole de la Commission, Margaritis Schinas, sans plus de commentaires.

Seuls les Premiers ministres hongrois et bulgare ont été prompts à livrer leurs commentaires. Viktor Orban a ainsi écrit, dans une lettre au président fraîchement réélu, que «la stabilité de la Turquie [était] une bonne nouvelle pour l'ensemble de l'Europe». «Notre continent est confronté à de sérieux problèmes de sécurité et il est essentiel de les surmonter par une coopération prévisible et efficace avec la Turquie», a-t-il poursuivi. De son côté, le Premier ministre bulgare Boïko Borissov a téléphoné à Recep Tayyip Erdogan et a dit souhaiter travailler avec lui «pour la consolidation des relations» entre les pays dans le domaine de la migration, ainsi que pour la paix et la stabilité dans la région.

L'OSCE déplore l'absence d'égalité entre les candidats

Dans un rapport préliminaire lu lors d'une conférence de presse à Ankara le 25 juin, la mission commune d'observateurs de l'OSCE et du Conseil de l'Europe, a fait part de quelques réserves : «Même s'il n'y avait pas d'opportunités égales, la plupart des compétiteurs ont pu transmettre leurs messages au public.»

«Les organes médiatiques, dont l'audiovisuel public, n'ont pas offert aux électeurs des informations équilibrées sur les différents candidats», affirme encore l'OSCE, qui déplore par ailleurs des «mesures légales importantes [...] omises pendant le décompte», des «restrictions» visant des observateurs internationaux ou encore la «présence de personnels non-autorisés, souvent des policiers, qui sont parfois intervenus dans le processus».

Recep Tayyip Erdogan a remporté 24 juin un nouveau mandat de cinq ans dès le premier tour des élections, pour lequel ses prérogatives de président seront considérablement renforcées après une réforme constitutionnelle adoptée l'an dernier.

Par ailleurs, les purges massives qui ont touché des opposants et des journalistes après une tentative manquée de putsch en juillet 2016 ont suscité l'inquiétude de l'Europe.