Le Mouvement 5 étoiles (M5S, anti-système) a conclu le 24 mars un accord avec la coalition de droite, dont fait partie la droite anti-immigration de la Ligue, pour faire élire l'un des siens à la présidence de la Chambre des députés, en votant en échange pour une proche de Silvio Berlusconi au Sénat.
Roberto Fico, 43 ans, du M5S, a été élu avec 422 voix sur 620 votants et Elisabetta Alberti Casellati, 71 ans, une avocate qui avait rejoint Silvio Berlusconi dès l'entrée en politique du magnat des médias en 1994, a recueilli 240 voix sur les 319 votants.
Cette ouverture du M5S aux négociations avec les représentants de la vieille classe politique, de même que les failles béantes mises au jour cette semaine au sein de la coalition de droite, laissent ouvert tout un faisceau de possibilités lors des consultations en vue de la formation d'un futur gouvernement, qui doivent débuter en avril.
La coalition de droite, arrivée en tête avec 37% et désormais dominée par la Ligue (droite anti-immigration) de Matteo Salvini, et le M5S, devenu le premier parti du pays avec 32% sous l'égide de Luigi Di Maio, revendiquent le pouvoir.
Aucun camp n'a de majorité au Parlement et pour l'instant, ils se disent simplement prêts à discuter avec quiconque serait disposé à adopter leur programme, tandis que le Parti démocrate (PD, centre gauche) refuse de servir de «béquille» à qui que ce soit.
Après deux ou trois tours dominés par les votes blancs le 23 mars, il n'a fallu qu'un seul vote le lendemain au Sénat comme à la Chambre des députés.
Les scores confirment que la majeure partie des deux camps ont respecté les consignes dans les deux chambres, un choix raillé par nombre d'élus du PD, qui ont rappelé l'aversion affichée jusqu'à présent par le M5S à l'égard de Silvio Berlusconi, accusé d'une grande partie des maux de l'Italie.
Le nom d'Alberti Casellati a été proposé juste avant le vote du 24 mars, à l'issue d'une réunion de réconciliation des chefs de partis de la coalition de droite, après un coup de force dans la soirée du 23 mars de Matteo Salvini qui avait lâché le candidat jusqu'à présent défendu par la coalition afin de proposer un nom que le M5S puisse accepter.
Chapitre suivant : le gouvernement
Même si elle a passé ces dernière années au Conseil supérieur de la magistrature, au-dessus de la mêlée, Alberti Casellati a été secrétaire d'Etat de Silvio Berlusconi dans les années 2000, d'abord à la Santé, où elle a fait embaucher sa fille, puis à la Justice, où elle a défendu les lois destinées à soulager Silvio Berlusconi de la pression des juges.
Parallèlement, certains élus de droite ont dû avoir du mal à voter pour Roberto Fico, ancien militant de gauche qui a été parmi les premiers à suivre Beppe Grillo, le fondateur du M5S et qui est devenu la référence des défenseurs des idéaux et des principes originels du mouvement.
Candidat malheureux au perchoir en 2013, il figurait parmi les favoris cette semaine mais le M5S ne l'a présenté lui aussi que le 24 mars, quand la droite a mis son veto à un premier nom.
Dans son discours de prise de fonction, en l'absence des élus de droite ayant voté pour lui, ce Napolitain a prévenu que son «premier objectif» serait de «diminuer les coûts de la politique», alors que le M5S milite contre les avantages des parlementaires.
«Le chapitre suivant sera le gouvernement : un casse-tête encore plus complexe, dominé par le soupçon que l'alliance en gestation entre le M5S et la Ligue ne vise pas la stabilité mais, de nouveau, les urnes», soulignait le 24 mars, le Corriere della Sera, premier quotidien du pays.
Les élections législatives du 4 mars ont constitué un choc électoral profond en Italie, avec la victoire des forces anti-système, eurosceptiques et anti-immigration, pour l'instant divisées.
Après avoir affirmé qu'aucune alliance n'était possible entre eux, Matteo Salvini et Luigi Di Maio ont cependant montré cette semaine que la communication fonctionnait entre eux, au grand dam de Silvio Berlusconi.
L'une des hypothèses pourrait être un accord provisoire entre la Ligue et le M5S, le temps d'adopter une réforme électorale en vue de nouvelles élections dès l'automne.