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Une «police» syrienne rebelle liée aux djihadistes : la BBC fait-elle de la «propagande russe» ?

Le gouvernement britannique a annoncé la suspension d'une aide financière à la Police syrienne libre après que la BBC a révélé qu'il existait une certaine proximité entre cette organisation et des groupes djihadistes.

Les médias de masse seraient-ils en train de changer leur storytelling sur le conflit en Syrie ? Dans une enquête titrée «Les djihadistes pour lesquels vous payez», la BBC se penche ce 4 décembre dans son magazine Panorama  sur les relations troublantes qu'entretient la Police syrienne libre (Free Syrian Police, FSP), financée par le ministère des Affaires étrangères du Royaume-Uni et d'autres pays occidentaux, avec des organisations terroristes.

Londres dans l'embarras 

Présente uniquement dans les territoires contrôlés par l'opposition à Bachar el-Assad, la FSP s'est rendue coupable, selon la BBC, de plusieurs exactions, notamment lors de la libération d'Alep-Est en décembre 2016 par l'armée syrienne avec l'appui de l'aviation russe. En outre, la chaîne de télévision met en avant l'exécution, en 2014, de deux femmes par lapidation à Sarmin dans la province d'Idleb, en présence de membres de la FSP.

Sans attendre la diffusion de l'enquête de la BBC, le Foreign Office a suspendu le programme de financement. «Nous prenons très au sérieux toute accusation de coopération avec des groupes terroristes et des violations des droits de l'homme», a fait valoir un porte-parole du Foreign Office.

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Financement occidental du terrorisme ?

Toujours d'après la BBC, le Foreign Office britannique a collecté des fonds auprès de six puissances occidentales qu'elle a ensuite reversés à l'ONG Adam Smith International (ASI). Cette ONG a ensuite versé à son tour quelque 30 millions de livres par an depuis 2014 à la FSP, dont le nom n'est pas sans rappeler celui de l'Armée syrienne libre (Free Syrian Army). Ce même argent aurait ensuite irrigué la nébuleuse de groupes armés, longtemps présentés dans les médias comme des rebelles «modérés». Mais, en l'espèce, selon la BBC, des groupes djihadistes armés affiliés au Fatah al-Cham, anciennement Front al-Nosra.

En avril 2017, au moment où Boris Johnson avait octroyé une rallonge de quelque 4 millions d'euros à l'ASI, la BBC avait publié sur son site un reportage élogieux dédié à la FSP, intitulé : «La Police syrienne libre lâche les armes pour aider sa communauté». Quoi de plus courageux pour une force de police naissante, peut-être destinée à prendre le relais de la police syrienne régulière au cas où Bachar el-Assad venait à être éliminé ? «Notre force sera dans notre faiblesse», déclarait alors le chef cette nouvelle force de police alternative, le général Adeeb al-Shallaf. «Un homme grand avec une présence considérable», écrivait l'auteur de l'article.

L'ONG Adam Smith International sur le gril

La rencontre entre le responsable de la FSP et l'équipe de la BBC avait d'ailleurs été organisée en Turquie, dans un lieu sécurisé et sous l'égide de l'ASI. Fondée en 1992, cette ONG est une véritable tête de pont opérationnelle de la politique étrangère du Royaume-Uni, un simple coup d'œil sur son site en témoigne. De l'Europe de l'Est post-soviétique à l'Irak, en passant par l'Afghanistan et la Libye, l'ASI a pour mission de mettre en œuvre l'économie de marché et également, charité néo-libérale oblige, d'ouvrir ces mêmes pays au secteur et aux entreprises privés.

Face au tollé médiatique qui s'annonce, l'ONG a vivement réfuté les accusations de la BBC. «Nous avons géré efficacement l'argent des contribuables afin de combattre le terrorisme, ramené la sécurité aux communautés syriennes et atténué les risques considérables liés aux opérations dans une zone de guerre», a déclaré un porte-parole de l'ASI, cité par The Telegraph.

«Propagande russe» ?

Susceptible de changer la façon dont elle relate la guerre civile qui a ravagé la Syrie, la BBC se penchera-t-elle lors d'un prochain sujet sur l'organisation controversée des Casques blancs syriens, elle-aussi financée par le Royaume-Uni ? Lors d'une conférence de presse consacrée à ce groupe qui se présente comme humanitaire, le 28 novembre 2017 en Suisse, la journaliste indépendante Vanessa Beeley avait souligné la proximité de certains de ses membres avec des organisations djihadistes. Elle avait été accusée par la branche suisse de l'ONG Reporters sans frontières (RSF) de faire de la «propagande russe», cette dernière allant jusqu'à réclamer l'annulation de la conférence.

Alexandre Keller

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