Jack Dorsey a annoncé ce 26 octobre 2017 sur Twitter, le réseau social qu'il a fondé en 2006, que RT n’accéderait plus aux campagnes de promotion de ses contenus, comme le font tous les autres médias.
«Twitter a pris la décision d'interdire l'accès à l'achat de publicité à tous les comptes liés à RT et Sputnik», a déclaré dans un communiqué Twitter. Le réseau social se base sur le rapport du renseignement américain de début janvier 2016, qui, recourant à la preuve tautologique, estimait que les médias russes avaient «piraté» l'élection présidentielle... parce que les agences américaines en étaient sûres.
Ce rapport, dont les auteurs ne veulent pas publier les preuves supposées, en invoquant des raisons de sécurité, fait, plus de neuf mois plus tard, toujours jurisprudence pour les tenants d'une théorie de l'ingérence – médiatique ? informatique ? éditoriale ? – de la «Russie», des «hackers» ou encore des «trolls» russes dans le processus démocratique américain en 2016.
Margarita Simonian, rédactrice en chef monde de RT, a pour sa part rappelé ce même jour que c'est Twitter qui avait approché RT en 2016 afin d'offrir ses services – évidemment payants – de mise en avant des contenus éditoriaux, à l'instar d'autres médias. Celle-ci a mis en ligne, sur Twitter, deux extraits de la proposition commerciale faite à RT, traité en prospect comme un autre, après l'approche de RT par des équipes de marketing dès avril 2016. Lors des réunions, les commerciaux de Twitter produisaient des Powerpoints afin de vanter les mérites de leur plateforme. En substance, plus RT dépenserait d'argent, plus le média toucherait de lecteurs...
Une capture d'écran révèle même – ironie – que Twitter estime qu'en achetant le pack proposé (1 823 tweets faisant la promotion... d'articles, facturés 274 000 dollars), RT contribuerait à une couverture «équilibrée» de la campagne électorale américaine.
«Produire un point de vue objectif sur l'élection américaine, avec l'avantage technologique de Twitter de diffuser le message en temps réel», promettaient les vendeurs. Un an plus tard, cette même campagne permet à Twitter d'inférer que RT aurait influencé l'issue de l'élection présidentielle américaine de 2016...
Je dois reconnaître que je ne pensais pas que Twitter était géré par les services secrets américains, [...] mais Twitter vient de le reconnaître lui-même
«Je dois reconnaître que je ne pensais pas que Twitter était géré par les services secrets américains, il me semblait que dire cela relevait de la théorie du complot mais Twitter vient de le reconnaître lui-même. C’est très dommage. Il est surtout dommage que les médias américains en Russie, maintenant, vont probablement sentir la douceur des mesures de rétorsion russes», a également déclaré la rédactrice en chef monde de RT.
Avec ce qui ressemble à un art consommé du retournement de veste, et sous la pression de la commission du Sénat américain sur l'ingérence russe, devant laquelle Facebook a également dû rendre des comptes, Twitter se range donc aux minces arguments des agences de renseignement américaines, quitte à se dédire complètement.