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Candidate à la présidentielle russe, Sobtchak déclare la Crimée ukrainienne et se fait brocarder

La «Paris Hilton russe», qui vient de se déclarer candidate à la présidentielle, a donné sa première conférence de presse. Ses déclarations sur la Crimée n'ont pas fait l'unanimité chez elle.

«Du point de vue de la loi internationale, la Crimée est ukrainienne. Point. Après, il faut discuter.» Cette déclaration qui n’est pas passée inaperçue a été prononcée par Ksenia Sobtchak, lors de sa toute première conférence de presse en qualité de candidate à l'élection présidentielle russe qui se tiendra en mars 2018. Ex-star de la télé-réalité reconvertie en opposante politique, fille d'Anatoli Sobtchak, parrain politique de Vladimir Poutine, elle a annoncé, la semaine dernière, sa candidature, sans étiquette, aux prochaines élections présidentielles.

La candidate estime elle-même qu’elle a très peu de chances de gagner, en prétendant toutefois incarner un vote «contre tous» qui n’existe plus depuis 2006. Mais elle s'est exprimée sur la Crimée, dont elle juge que le rattachement à la Russie constitue une violation des engagements pris par Moscou.

«Nous avons violé notre parole, le mémorandum de Budapest de 1994. […] Maintenant, il faut en discuter. C’est un grand problème», a estimé Sobtchak. Le mémorandum évoqué par la candidate a été signé pas l’Ukraine, les Etats-Unis, le Royaume-Uni et la Russie. Il octroie à Kiev des garanties de souveraineté et de sécurité en échange de sa signature du Traité de non-prolifération des armes nucléaires. Le Kremlin estime que le traité n’est applicable qu’en cas de menace contre la souveraineté ukrainienne, et que la Russie a respecté ses engagements.

Ksenia Sobtchak a conclu son intervention sur la question de la Crimée en estimant que «le plus important» pour la Russie et l’Ukraine était de restaurer leur amitié «à tout prix».

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Controverses

La déclaration de la candidate «contre tous» a pour le moment mobilisé l'opposition d'une partie de l’establishment politique russe contre elle. Son possible rival à la présidentielle, le chef du Parti libéral-démocratique russe, le nationaliste Vladimir Jirinovski a ainsi estimé que de ses propos relevaient d’un «crime».

Mais c’est depuis la Crimée que se sont élevées les réactions les plus vives. Les députés de la Douma d’Etat représentant la Crimée et Sébastopol ont estimé que sa déclaration était «une menace pour la sécurité nationale», et ont accusé la candidate de ne pas comprendre les désirs et les besoins des habitants de la péninsule. Le vice-premier ministre de la Crimée Dmitri Polonski, lui, l’a appelé à s’abstenir d'un «populisme bon marché».

Pour que la candidature de Ksenia Sobtchak soit officiellement validée par la commission électorale, elle doit rassembler 100 000 signatures. Dans ce contexte, les considérations sur la légitimité du rattachement de la Crimée à la Russie par voie de référendum pourraient-elles lui coûter cher ? En effet, selon une étude du Centre d'étude de l'opinion publique de Russie (VTsIOM) réalisée en mars 2017, 97 % des Russes perçoivent la Crimée comme une partie de la Russie. Une augmentation du pourcentage déjà très élevé, de 95 % en 2016 et de 89 % en 2015, selon la même organisation. D'après un autre sondage réalisé par le Centre analytique Levada en 2017, 64% des Russes estiment que le rattachement de la Crimée à la Russie a été bénéfique pour le pays, malgré la réaffectation d’une partie du budget social aux besoins de la péninsule.

La Crimée a fait sécession de l'Ukraine après les événements de Maïdan à Kiev en 2014, et a été rattachée à la Russie en mars 2014 à l'issue d'un référendum non reconnu par la communauté internationale. 96% de la population de la péninsule s'est alors exprimée pour le rattachement. Moscou a, à plusieurs reprises, déclaré que le scrutin s’était déroulé conformément au droit international et à la charte de l’ONU.

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