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«Trahison» ou «volonté de dialoguer» ? En Espagne et en Europe, les indépendantistes réagissent

Les indépendantistes espagnols apprécient de façons diverses le discours de Carles Puigdemont. En Ecosse et en Flandre, les mouvements séparatistes jugent eux la prudence du président catalan constructive.

Le discours prononcé le 10 octobre par Carles Puigdemont, le président de la région de Catalogne, tentait de concilier volonté d'indépendance et nécessité de dialoguer avec Madrid. Très attendue par les indépendantistes et écoutée avec attention par les mouvements séparatistes d'Europe, la déclaration a suscité des réactions très contrastées.

En Catalogne, si de nombreux partisans de l'indépendance n'ont pas caché une vive déception après le discours, la plupart des formations politiques maintiennent le cap et ne renoncent pas leur objectif à court terme. La Candidature d'unité populaire (CUP), parti indépendantiste de gauche considéré comme l'un des plus favorables à la création d'un Etat catalan, a réagi rapidement après la fin du discours de Carles Puigdemont sur Twitter : «Nous demandons au président d'arrêter une date limite pour les négociations [avec Madrid].»

Prenant acte de la suspension des effets du référendum annoncée par Carles Puigdemont, la CUP semble donc décidée à jouer la carte de la fermeté tout en acceptant l'idée d'une négociation avec Madrid. Or, les signes envoyés par le gouvernement espagnol, y compris après le discours de Carles Puigdemont, laissent penser qu'il a décidé de ne rien céder.

C'est cette fermeté de la part de Madrid qui pousse d'autres mouvements indépendantistes à critiquer plus violemment la position adoptée par Carles Puigdemont. Ainsi, l'organisation de jeunesse Arran, membre de la gauche indépendantiste, s'est montrée beaucoup plus sévère. Qualifiant le discours de Carlos Puigdemont de «trahison inadmissible», l'organisation estime que le président du Parlement catalan «remet en cause le vote populaire».

En Ecosse et en Flandres, on salue la volonté de dialoguer

La crise catalane constitue la première tentative d'indépendance unilatérale au sein de l'Union européenne. A ce titre, son dénouement est guetté avec grande attention par plusieurs autres mouvements indépendantistes, et notamment en Ecosse et en Flandre. La déclaration de Carles Puigdemont leur apparaît comme un choix prudent et raisonnable.

«Nous avions des bouteilles de champagne au frigo pour une fête, mais nous ne les avons pas sorties, frappés par cette brusque déception», a confié Bernard Daelemans, l'un des dirigeants du Mouvement populaire flamand (VVB, un courant indépendantiste transpartisan), à RT. Néanmoins, la décision prise par Carles Puigdemont de tempérer, est saluée comme un acte mesuré dans un contexte de violences. «La pression était terrible de la part de Madrid, et si vous ajoutez à cela les risques de violences, alors je comprends que Carles Puigdemont veuille privilégier le dialogue», a estimé Bernard Daelemans.

En Ecosse, où le référendum de 2014 n'a pas éteint l'espoir d'organiser une nouvelle consultation et d'accéder à l'indépendance, le discours de Carles Puigdemont était écouté avec attention. Moins que le fond du discours, c'est le contexte dans lequel celui-ci était prononcé qui a marqué les partisans d'une indépendance écossaise. «Il y a clairement eu une unanimité à travers l'Europe, peu importe les partis et peu importe les opinions sur l'indépendance catalane, pour condamner la violence avec laquelle Madrid a géré la situation», estime Jonathon Shafi, représentant de la Campagne d'indépendance radicale, un mouvement indépendantiste écossais de gauche. S'il salue la volonté de dialogue affichée par Barcelone, il craint que le processus d'indépendance ne soit «long et complexe».

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