Vladimir Poutine est reçu ce 28 septembre à Ankara par Recep Tayyip Erdogan. Une visite d'une journée qui marque le réchauffement des relations entre les deux pays après la grave crise diplomatique provoquée par la destruction, en novembre 2015, d'un bombardier russe par la Turquie à la frontière syrienne.
Lors de cette rencontre à Ankara, les deux dirigeants «s'entretiendront des relations bilatérales entre la Turquie et la Russie, ainsi que des questions régionales […] à commencer par la Syrie et l'Irak», selon l'administration présidentielle turque.
La Turquie et la Russie, qui soutiennent des camps opposés en Syrie, ont mis leurs divergences de côté ces derniers mois pour tenter de parvenir à un règlement mettant fin au conflit syrien qui a fait des centaines de milliers de morts depuis 2011.
Moscou et Téhéran, alliés de Damas, et Ankara, qui soutient les rebelles, ont conclu le 15 septembre à Astana un accord pour déployer ensemble des forces de maintien de l'ordre dans la zone de désescalade d'Idleb, dans le nord-ouest de la Syrie, et dans certaines parties des régions de Lattaquié, Hama et Alep. Selon le Kremlin, Vladimir Poutine a insisté, lors d'un entretien téléphonique avec son homologue turc le 25 septembre, sur le fait que la mise en œuvre des «zones de désescalade» en Syrie était susceptible d'ouvrir la voie à un règlement politique du conflit.
Le référendum kurde au programme de la rencontre
L'autre dossier régional brûlant est le référendum d'indépendance du Kurdistan irakien, auquel Ankara s'est vivement opposé, craignant que la création d'un tel Etat n'encourage les velléités indépendantistes de l'importante minorité kurde de Turquie. Le président Erdogan a menacé cette semaine d'imposer des sanctions contre Erbil, affirmant que les Kurdes d'Irak «ne trouver[aient] plus rien à manger, ni de quoi se vêtir». Il a notamment évoqué la possibilité de «fermer les vannes» de l'oléoduc qui permet aux autorités kurdes irakiennes d'exporter leur pétrole, via le port turc de Ceyhan.
La Russie, en revanche, qui compte d'importants intérêts économiques au Kurdistan, s'est montrée plus réservée, affirmant considérer «avec respect les aspirations nationales kurdes». Moscou considère toutefois que «les disputes entre Bagdad et Erbil doivent être résolues par le dialogue, avec pour objectif de trouver une formule de coexistence au sein de l'Etat irakien», selon le ministère russe des Affaires étrangères.
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Les S-400 de la discorde
La visite de Vladimir Poutine à Ankara intervient en outre deux semaines après l'annonce par Recep Tayyip Erdogan de la conclusion définitive d’un contrat majeur avec la Russie portant sur l'achat de systèmes de défense antiaérienne S-400. Le président turc a affirmé qu'un contrat portant sur l'acquisition de S-400 par la Turquie avait été signé et qu'une caution avait été versée, mais la question du financement reste encore à régler.
Le sous-secrétaire d'Etat turc chargé de l'industrie de la défense a d'ailleurs reconnu cette semaine que la livraison des S-400 prendrait au moins deux ans.
Cette nouvelle, en plein climat de tensions entre Ankara et plusieurs pays occidentaux, à commencer par les Etats-Unis et l'Allemagne, a suscité les critiques de Washington. Alors que Bruxelles et l’OTAN ont reconnu que la Turquie avait le droit souverain de décider de ses livraisons militaires, le Pentagone s’est montré plus inquiet. Les représentants du Pentagone ont notamment souligné que, de leur avis, un système de défense antiaérienne intégré dans les infrastructures de l’OTAN serait meilleure pour protéger la Turquie.
Une critique vivement rejetée par le dirigeant turc. «Nous sommes les maîtres de notre maison», a-t-il déclaré, ajoutant que la Turquie allait agir «de manière autonome». Le Kremlin a également rejeté ces inquiétudes. «Personne n’a le droit de critiquer la Russie et la Turquie pour une coopération militaro-technique effectuée en conformité avec le droit international et qui n’est dirigée contre aucun pays tiers», a déclaré le 27 septembre le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov.