Les militants opposés à l'immigration du projet «Defend Europe» ont annoncé le 18 août que la mission du navire C-Star, qu'ils avaient loué, prenait fin après une semaine effective de mission au large de la Libye. La page Facebook française du groupe Génération identitaire, à l'origine du projet, a qualifié cette mission dans un communiqué de «succès politique, succès médiatique, succès militant».
«Voici seulement deux mois, de très nombreux navires d'ONG croisaient au large des côtes libyennes comme des taxis attendant leurs clients. En ce 17 août, il n'en reste plus qu'un seul. Inutile. Ridicule. Car il n'a plus de clients», peut-on lire dans le communiqué.
Parti en mer début juillet 2017 de Djibouti, le navire C-Star n'a en réalité passé que quelques jours au large de la Libye, sa route ayant été semée d’embûches administratives, de mouvements de résistance à sa présence et de problèmes techniques. Il a en effet été bloqué par les autorités égyptiennes à Suez, puis à Chypre, en raison du débarquement d'une partie de son équipage non-militant, ayant profité de l'escale pour abandonner leur poste et... demander l'asile politique sur place. Plus tard encore, une manifestation d'opposants et d'un syndicat avait empêché le ravitaillement du navire en Tunisie, ce qui avait bloqué le C-Star pendant cinq jours.
La mission effective du navire, enfin, a essentiellement consisté à poursuivre les bateaux d'organisations non gouvernementales (ONG) en leur répétant en boucle par radio : «Nous vous demandons de quitter la zone de secours.»
Pas d'embarcations de migrants interceptée, mais des ONG signalées aux gardes-côtes libyens, selon les identitaires
Joint par téléphone par RT France, un responsable de la section française de Génération identitaire a accusé certaines ONG actives en Libye de collaborer directement avec les passeurs de clandestins, récupérant les embarcations à quelques milles nautiques de la côte libyenne : «Les passeurs embarquent des migrants en réfléchissant à bien répartir quelques femmes et quelques enfants dans toutes les embarcations, conscients de la présence de médias sur les bateaux des ONG, pour ne pas choquer l'opinion publique européenne.» Et de poursuivre : «Les [ONG] ramènent directement [les migrants] en Europe, contrairement à ce que voudrait la loi internationale maritime, à savoir les ramener dans les ports les plus proches en Libye ou en Tunisie.»
Le responsable a par ailleurs assuré que le C-Star avait reçu directement les remerciements et le soutien de gardes-côtes libyens, notamment lorsque le navire identitaire leur aurait livré la position du bateau Golfo Azzurro, de l'ONG «Proactiva Open Arm». Pour autant les autorités libyennes auraient enjoint aux identitaires de quitter leurs eaux, comme à tout autre navire étranger.
Par ailleurs, le responsable de l'organisation identitaire rapporte que le C-Star n'a croisé la route d'aucune embarcation de migrants.
Malgré ces déboires, les identitaires considèrent que les retombées médiatiques liées à leur mission et le débat public qui en a découlé ont fait avancer leur cause dans l'opinion publique européenne. «Toute l'Europe sait désormais que ces prétendues ONG étaient pour certaines les complices actifs des mafias de passeurs de clandestins et, pour d'autres, leurs idiots utiles», peut-on lire plus loin dans le communiqué de Génération identitaire. Une semaine plus tôt, un des responsables de l'opération avait déclaré dans une vidéo publiée sur internet que la mission était «déjà un succès».
Reflux des ONG à la demande de la marine libyenne
En tout état de cause, le 11 août, la marine libyenne avait publié un communiqué à destination des navires étrangers (et particulièrement des ONG), interdisant la navigation sans autorisation dans les eaux libyennes. Certains navires de ces ONG naviguaient en effet parfois si près des côtes de Libye, que la terre était visible depuis leur pont. Depuis cette annonce, la plupart des organisations d'aide aux migrants ont respecté cette demande et ont éloigné leurs navires des côtes libyennes, certaines estimant leurs opérations dans la zone désormais trop dangereuses pour leurs équipages. Quelques jours plus tôt, l'équipage du navire affrété par «Proactiva Open Arms» avait même affirmé avoir été menacé par les garde-côtes libyens, qui auraient effectué plusieurs tirs de sommation.
L'Italie, qui recueille la majeure partie des flux d'immigration clandestine en Méditerranée, a elle aussi durci les mesures envers les ONG humanitaires depuis août, demandant aux organisations de signer un «code de conduite», préconisant notamment la présence d'un policier à bord de chaque navire de secours. Une mesure très critiquée, mais qui avait été néanmoins acceptée par la plupart des ONG présentes en Méditerranée, tandis que d'autres, comme Médecins sans frontières, avaient refusé de signer le texte.