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La Pologne irrite ses voisins en envisageant d'intégrer des monuments étrangers sur ses passeports

L'Ukraine et la Lituanie ont exprimé leur mécontentement face au nouveau projet de Varsovie de faire représenter sur les passeports polonais des monuments se trouvant sur leurs territoires.

Le ministère des Affaires étrangères ukrainien a exprimé à l’ambassadeur polonais à Kiev son mécontentement en raison du projet porté par les autorités de Pologne, de faire représenter sur les nouveaux passeports du pays un mémorial controversé situé dans la ville ukrainienne de Lviv.

Selon le communiqué diffusé par le ministère et cité par les agences, Kiev estime que ces intentions constituent un «geste inamical». «L’Ukraine est contre la politisation de certains faits historiques qui nuiraient au développement du partenariat stratégique entre l’Ukraine et la Pologne», a indiqué le 8 août la diplomatie ukrainienne.

Pour célébrer le centenaire de son indépendance en 2018, Varsovie prévoit de lancer une nouvelle version du passeport polonais qui comprendra des représentations de monuments historiques liés aux moments importants de l’histoire du pays.

Parmi ces images figure notamment une chapelle faisant partie d’un mémorial dédié aux Polonais et situé à Lvov, sur le territoire de l’Ukraine actuelle. Les combattants ainsi honorés sont morts pendant le conflit de 1918-1919 entre la Pologne et l'Etat autoproclamé d’Ukraine occidentale. Alors que la Pologne venait d'obtenir son indépendance à l'issue de la Première guerre mondiale, une partie de ses territoires comprenait une région historiquement peuplé par des Ukrainiens. Cette région avait alors décidé de proclamer son indépendance mais le conflit qui s’en était suivi avait conduit à la défaite des Ukrainiens et à une occupation militaire polonaise de cette région jusqu’à 1939.

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Ce n’est d’ailleurs pas le seul sujet qui envenime actuellement les relations entre l’Ukraine et la Pologne. En 2016, le sénat polonais a proclamé le 11 Juillet Journée nationale de mémoire des victimes du massacre perpétré par les nationalistes ukrainiens contre des citoyens de la Deuxième république de Pologne en Volhynie (ouest de l’Ukraine), qui a fait environ 100 000 morts. Ce massacre, perpétré en février 1943 par des nationalistes ukrainiens et des divisions ukrainiennes SS, est officiellement considéré comme génocide par Varsovie. Cette qualification suscite l'indignation de Kiev qui estime qu’il s’agissait de la lutte de l'Ukraine pour son indépendance.

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La Lituanie : une histoire commune compliquée avec la Pologne

Dans son nouveau passeport, la Pologne pourrait également représenter un autre monument controversé : la porte de l’Aurore, se trouvant à Vilnius, la capitale de la Lituanie. Une intention jugée «inacceptable» par la partie lituanienne qui a remis à l’ambassadeur polonais en Lituanie une note de protestation.

«Il n’est pas normal d’utiliser les images provenant d'autres pays, surtout lorsque l’on connait les pages difficiles de notre histoire», a déclaré le chef de la diplomatie lituanienne, Linas Linkevicius. Le haut responsable lituanien a expliqué avoir prévenu la partie polonaise que pour la Lituanie «une telle chose n’avait pas le droit d’exister», et a manifesté son espoir que Varsovie renoncerait à son projet.

La porte de l’Aurore est un lieu de pèlerinage reconnu par les catholiques comme par les orthodoxes, et constituait une partie des fortifications de Vilnius, elle contient toujours l’icône de Notre-Dame de la Porte de l'Aurore, considérée par les Polonais comme l'une des reliques les plus importantes de leur nation, mais actuellement sur le territoire lituanien. Vilnius, ville fondée au Moyen-Age sous le grand-duché de Lituanie, a été une grande partie de son histoire sous le contrôle de l’Etat polonais, avant d'être intégré à l'URSS .

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