Homme providentiel pour une partie de la Turquie, despote en devenir pour l'autre, le président Recep Tayyip Erdogan a remporté de peu dimanche un référendum constitutionnel destiné à asseoir son pouvoir, neuf mois après avoir échappé à un putsch.
En quête d'un plébiscite, le «Reïs» (le Chef) comme ses partisans le surnomment, avait jeté toutes ses forces dans la bataille, galvanisant les foules aux quatre coins de la Turquie. Mais la courte victoire obtenue ce 16 avril et que l'opposition conteste montre à quel point la Turquie est coupée en deux après 15 ans de gouvernement de l'AKP.
Le projet de révision de la loi fondamentale validé par une majorité de Turcs octroie au président des prérogatives considérablement élargies, qu'aucun dirigeant n'a eues depuis le fondateur de la République, Mustafa Kemal. Pour les sympathisants de Recep Tayyip Erdogan, cette réforme est nécessaire pour assurer la stabilité au sommet de l'Etat. Mais ses détracteurs accusent l'actuel président de dérive autocratique et de remodeler la Constitution pour assouvir sa soif de pouvoir.
Âgé de 63 ans, Recep Tayyip Erdogan a vécu l'une des années les plus mouvementées de sa longue carrière politique, avec notamment un putsch manqué, une dégradation des relations avec l'Europe et une vague d'attentats qui a ensanglanté la Turquie. Pendant la campagne, le président turc aura déployé ses qualités de tribun hors pair qui ont largement contribué à sa longévité politique, faisant des discours truffés de poésie nationaliste et d'extraits du Coran.
Galvanisé par sa victoire, Recep Tayyip Erdogan a annoncé dans la foulée qu'il entendait désormais rétablir la peine de mort en Turquie et éventuellement organiser un référendum à ce sujet si l'opposition s'y refusait. Au même moment, l'opposition annonçait qu'elle contestait les résultats du référendum et qu'elle engagerait une procédure, dénonçant notamment des «manipulations».