La communauté internationale accuse Damas d'avoir utilisé des armes chimiques pour frapper le village de Khan Cheikhoun, tuant 72 personnes selon le controversé Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). Face à ces accusations, la Défense russe s’est dite prête à présenter des preuves irréfutables que l’aviation syrienne avait en réalité visé un entrepôt où les rebelles stockaient des matériaux chimiques.
«D’après les données du contrôle russe de l’espace aérien en Syrie, le 4 avril de 11h30 à 12h30 [heure locale], l’aviation syrienne a frappé un entrepôt d'armes chimiques et d'équipement militaire des terroristes, situé dans l’est du village rebelle de Khan Cheikhoun», a déclaré le porte-parole de la Défense russe, Igor Konachenkov.
«Dans cet entrepôt se trouvaient des ateliers pour la production de bombes chargées d'explosifs toxiques. Depuis ce grand atelier, les terroristes envoyaient des munitions contenant des substances chimiques en Irak. Leur utilisation a été prouvée maintes fois par les organisations internationales, ainsi que par les autorités irakiennes», a-t-il poursuivi. Ces mêmes munitions chimiques avaient été utilisées par des rebelles lors de l'attaque chimique d'Alep en 2016, a fait savoir le porte-parole de la Défense russe, qui avait participé à l'enquête de l'année dernière.
Hasan Haj Ali, commandant du groupe rebelle de l'Armée de libération d'Idlib a nié la version russe. D'après lui, aucune position militaire n'aurait été touchée ce jour-là.
«Tout le monde a vu l'avion lorsqu'il bombardait avec du gaz», a-t-il affirmé à l'agence Reuters.
«De même, tous les civils dans la zone savent qu'il n'y a pas de positions militaire là bas, ni de fabrique [d'armes]. Les différentes factions de l'opposition ne sont pas capables de fabriquer ces substances», a-t-il assuré.
Le 4 avril, l'OSDH a annoncé qu'au moins 58 personnes, dont onze enfants, avaient été tuées dans la province d'Idlib lors de frappes aériennes. Dans la matinée du 5 avril, le bilan s’est alourdi à 72 personnes. Témoins et médecins déclarent avoir vu de l'écume sortir de la bouche des victimes, caractéristique d'une intoxication chimique. Le communiqué russe confirme que ces civils ont été victimes des mêmes symptômes que ceux observés après l'attaque chimique d'Alep.
Si le principal groupe de l'opposition syrienne, la Coalition nationale syrienne, a accusé Bachar el-Assad d'être responsable de ces morts, Damas réfute toute utilisation d'armes toxiques. Le gouvernement syrien précise que ces déclarations concernant les frappes opérées dans la province d'Idlib font partie d'«une campagne de propagande des rebelles contre l'armée syrienne».
«Nous récusons totalement toute utilisation de matériau chimique ou toxique à Khan Cheikhoun. L'armée n'en a jamais utilisé et n'en utilisera nulle part», lit-on dans le communiqué de l'armée syrienne.
Quelques heures après l’attaque, l'agence britannique Reuters avait accusé l’armée russe et syrienne, en se basant sur les déclarations de l'OSDH : «des avions appartenant à la Russie ou au gouvernement syrien ont largué des munitions chimiques sur le village de Khan Cheikhoun dans la province d'Idlib», écrivait l'agence.
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«Les avions russes n'ont mené aucune frappe dans la zone de Khan Cheikhoun, dans la province d'Idlib. En annonçant l'implication d'avions russes dans un bombardement à l'arme chimique de Khan Cheikhoun, l'agence britannique Reuters a réussi à déformer les premières informations propagées par sa source, l'Observatoire syrien des droits de l'homme, qui n'avait rien dit à ce sujet», a précisé Igor Konachenkov.
L’agence britannique n’a pas été la seule a accuser Bachar el-Assad d’avoir procédé à une attaque chimique. «Aujourd'hui, les nouvelles [en provenance de Syrie] sont horribles. De toute évidence, la responsabilité principale repose sur le régime syrien», a déclaré la chef de la diplomatie européenne Federica Mogherini. Le ministre britannique des Affaires étrangères, Boris Johnson, a qualifié quant à lui d'«horribles» les rapports faisant état d'«une attaque à l'arme chimique» en Syrie, y voyant «toutes les caractéristiques d'une attaque du régime de Bachar el-Assad».