Où en sont les différents pays du monde en matière d'égalité entre hommes et femmes ? Difficile de répondre à cette question de manière tranchée. Plusieurs indicateurs se proposent d'établir un bilan de la situation, comme le classement annuel des pays publié par Forum économique mondial (World Economic Forum-WEF).
Il se concentre sur quatre critères principaux : l'éducation, la santé, la politique et l'économie. Première constatation : sur les 144 pays analysés, aucun ne peut se targuer d'une égalité parfaite entre les individus des deux sexes dans tous les domaines. Autre élément flagrant : parmi les dix Etats les mieux classés en 2016, six se situent en Europe et les quatre premiers, respectivement l'Islande, la Finlande, la Norvège et la Suède, sont tous des pays d'Europe septentrionale, caractérisés par un niveau de PIB élevé.
L'égalité n'est pas qu'une affaire de PIB
Le classement précise que l'égalité d'accès aux soins ou à l'éducation tend à s'accroître lorsque l'accès à ces services est globalement garanti, quel que soit le sexe. Autrement dit, plus il est difficile de faire des études ou d'accéder aux soins de santé, plus les femmes tendent à en être écartées. Conséquence implicite d'un tel constat : l'un des meilleurs moteurs de l'égalité hommes-femmes reste le développement économique.
Confirmant cette analyse, on observe que les dernières places sont majoritairement occupées par des pays d'Afrique ou d'Asie en voie de développement : le Yémen arrive dernier, précédé respectivement du Tchad, de l'Arabie saoudite, de la Syrie et du Pakistan. L'économie n'explique cependant pas tout. L'analyse du WEF souligne également l'influence «des structures religieuses» sur l'égalité entre les sexes dans ces pays à très forte majorité musulmane.
La corrélation entre développement économique et égalité hommes-femmes reste d'ailleurs à relativiser. Ainsi, le Rwanda se classe 5e, les Philippines 7e et le Nicaragua 10e... Loin devant des pays au PIB élevé comme le Luxembourg (34e), l'Australie (46e) ou encore le Japon (111e). Au regard de ces données, la France semble faire pâle figure, n'obtenant que la 17e place du classement, derrière l'Allemagne (13e), mais devant le Royaume-Uni (20e) ou les Etats-Unis (45e).
Derrière les chiffres, la diversité des situations
Si les classements ont l'avantage d'attirer l'attention, ils ne sont pas pour autant exempts d'ambiguïtés, en raison notamment de la difficulté à établir des points de comparaison objectifs entre des pays aux cultures et aux situations économiques très différentes. En effet, parmi les éléments pris en compte par le WEF pour procéder à ce classement, certains ne semblent que partiellement pertinents dans une perspective comparative.
A titre d'exemple, le critère du «nombre de femmes au gouvernement» permet certes de comparer de manière relativement équitable des démocraties parlementaires classiques. Mais elle rend plus difficilement compte de la réalité du pouvoir dans certaines monarchies, à l'instar de l'Arabie saoudite, où les femmes commencent désormais à accéder à des rôles d'influence.
Ainsi, si la situation dans ces pays reste parfois difficile pour les femmes, l'analyse des dynamiques permet de mettre en lumière les progrès effectués. Autre exemple : on comprend que le «taux de participation des femmes à l'économie» soit plus faible dans des pays où les secteurs primaire et secondaire demeurent très prépondérants par rapport à des économies fortement tertiarisées.
Ainsi, pour se faire une idée de la situation de chaque Etat, il est intéressant de se pencher sur les évolutions propres à chacun d'entre eux. Le rapport du WEF propose depuis quelques années un classement complémentaire décrivant les «améliorations», selon les pays. On y découvre que le Nicaragua, le Népal, la Bolivie, la Slovénie et la France sont les cinq pays qui ont connu la plus forte réduction des inégalités hommes-femmes en 2016.
Un regard sur ce classement permet notamment d'évaluer les tendances en cours. Contrairement à ce que l'on pourrait croire, il n'y a pas d'amélioration en vue. En 2016, le rapport du WEF indiquait : «les progrès se sont inversés, après avoir atteint leur pic en 2013». Or, le danger d'un tel recul est bel et bien d'alimenter un cercle vicieux, comme le soulignent les conclusions de l'étude : l'inégalité accrue entre hommes et femmes menace de «gâcher un nombre alarmant de talents et ainsi de priver certaines économies de possibilités concrètes de développement».