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En Allemagne, un lycée interdit les prières «provocantes» dans ses murs et suscite un tollé

Un établissement scolaire allemand a demandé à ses enseignants de relever le nom des élèves musulmans en train de prier, jugeant la pratique «provocante». L'initiative a relancé la controverse sur la neutralité religieuse à l'école en Allemagne.

Le lycée Johannes Rau de la ville de Wuppertal, dans l'ouest de l'Allemagne, a décidé de faire respecter la laïcité et la neutralité religieuse dans son enceinte. Constatant une augmentation des prières musulmanes, et jugeant la pratique «provocante», l'établissement scolaire allemand a demandé à ses enseignants de rapporter les cas d'élèves musulmans en train de prier.

Le quotidien allemand Der Westen a pu se procurer la circulaire rédigée le 16 février à l'intention des professeurs et qui appelle ces derniers à la vigilance.

«Depuis plusieurs semaines, nous avons observé, de plus en plus souvent, que des élèves, filles et garçons, priaient dans l'enceinte de l'établissement, de façon à le montrer aux autres, notamment en effectuant des ablutions dans les toilettes ou en déroulant des tapis de prière», constate le proviseur du lycée dans la lettre, précisant : «Ce n'est pas autorisé».

L'équipe enseignante est en outre désormais tenue d'identifier les élèves et de faire remonter les informations à l'administration du lycée. La lettre recommande toutefois dans un premier temps de rappeler ces élèves à l'ordre avec «tact».

L'initiative a suscité un tollé dans la région de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, notamment sur les réseaux sociaux. Certains utilisateurs, indignés, en concluent ainsi que la liberté religieuse serait illusoire en Allemagne. «Pourquoi ne peuvent-ils pas prier ?», s'étonne un utilisateur de Facebook cité par la Deutsche Welle, «ici, dans un pays si profondément religieux, devenu aussi tolérant et ouvert aujourd'hui».

Un autre internaute s'indigne : «C'est ça la liberté religieuse en Allemagne».

Le multiculturalisme allemand en question

La controverse a même dépassé les frontières de l'Allemagne. «Comme c'est méchant de la part de l'Allemagne», s'indigne un utilisateur de Twitter, «les faire venir puis les empêcher de prier, j'espère qu'ils réclament tous une indemnisation».

L'existence de cette lettre a été confirmée et assumée par le rectorat de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, qui souligne que la circulaire ne concerne que les prières «ostentatoires». «L'interdiction de prier de façon provocante dans une école publique vise à encourager une coexistence pacifique et d'assurer la paix scolaire» et s'appuie précisément sur des considérations de liberté religieuse, passant avant tout par le respect de la neutralité.

La question de la place de l'islam dans la société est devenue centrale dans le débat public en Allemagne, alors que les élections législatives se tiendront en septembre.

La vague d'agressions sexuelles, notamment à Cologne le 1er janvier 2016, puis les attentats de l'été 2016 ainsi que l'attaque au camion du marché de Noël de Breitscheidplatz à Berlin en décembre, ont provoqué un véritable électrochoc dans la population. L'implication de migrants dans ces événements a eu pour conséquence une remise en cause du modèle «multiculturel» allemand et l'exacerbation du clivage entre opposants et partisans de l'accueil sans limite des immigrés.

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