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Allemagne : une mamie activiste chasse les graffitis néo-nazis dans les rues de Berlin

Armée uniquement d'une bombe de peinture, d'un dissolvant pour vernis et d'un grattoir, une grand-mère berlinoise arpente les rues de son quartier depuis 30 ans à la recherche d'autocollants ou de graffitis néo-nazis à recouvrir ou à détruire. 

«J'ai juste effacé la haine jusqu'à ce que tout ait disparu. C'était un sentiment fantastique. Cette pollution mentale avait disparu !», s'est remémorée Irmela Mensah-Shramm devant des journalistes de la chaîne américaine de télévision CNN.

Selon les propos de cette septuagénaire berlinoise, son combat a commencé il y a une trentaine d'années après la découverte d'un autocollant en soutien au criminel de guerre nazi Rudolf Hess dans un arrêt de bus. Epouvantée, Irmela Mensah-Shramm avait fini par lacérer le sticker à coup de clé après avoir constaté que personne n'avait pris cette initiative avant elle. 

Depuis ce jour, la grand-mère allemande n'a pas arrêté. Selon ses dires, son action personnelle aurait permis d'effacer, arracher ou recouvrir près de 65 000 autocollants et 130 000 tags en 30 ans de «carrière». 

La grand-mère chasseuse de graffiti conserve par ailleurs une collection de clichés photographiques de la propagande d'extrême droite qu'elle a détruite après toutes ces années. Ces «archives» sont d'ailleurs parfois utilisées à des fins pédagogiques, par exemple par le Musée historique allemand. 

«Les gens me disent que je suis intolérante, que je ne respecte pas la liberté d'expression de l'extrême droite, mais je leur réponds : "la liberté d'expression a des limites, elle finit là où commence la haine et le mépris pour l'humanité"», a-t-elle poursuivi face aux caméras de CNN.

Mensah-Shramm se définit elle-même comme une Polit-Putze, une «nettoyeuse politique» en français. Précisant la raison qui anime son engagement, elle a notamment expliqué : «Je suis vraiment préoccupée par cette propagande de haine et je veux prendre position. Pas avec des mots creux. Mais faire quelque chose. Je pourrais regarder cette croix gammée et ce graffiti "Nazi Kiez" [le nom du quartier à Berlin], dire "oh, c'est horrible" et continuer à marcher comme si de rien n'était.»

Plusieurs fois confrontée aux forces de l’ordre, Irmela Mensah-Shramm n’a jamais été poursuivie en justice. Elle a néanmoins été menacée en octobre 2016 d'une amende de 1 800 euros pour ses graffitis en forme de cœurs tagués à répétition. 

Malgré les menaces écrites sur les murs à son encontre et les agressions dont elle a été victime, l'activiste n'entend toutefois pas mettre un terme à ses activités. Selon elle, les migrants syriens sont désormais une des cibles principales des actions de l'extrême droite allemande depuis la décision d'Angela Merkel d'ouvrir les frontières et d'accueillir près de 900 000 demandeurs d'asile en Allemagne. 

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