Le 20 octobre 2011, sept mois après le déclenchement de l'opération militaire de l'OTAN en Libye en soutien aux insurgés, Mouammar Kadhafi trouve la mort.
Ce jour-là, alors qu'il quittait la ville de la Syrte, ultime bastion des forces loyalistes, le convoi du chef d'Etat est contraint de modifier son itinéraire afin d'éviter des tirs d'avions de l'OTAN. Le véhicule du dirigeant libyen tombe alors dans une embuscade des rebelles, qui capturent ce dernier vivant. Le lendemain, toutefois, son décès est annoncé par un haut responsable militaire du Conseil national de transition (le CNT, coalition rebelle).
Dans un rapport publié en 2012, se basant sur des vidéos témoignant de l'évènement, l'ONG Human Right Watch est revenu sur les conditions de la mort du chef de la «Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste», à la suite du guet-apens : «Les vidéos montrent que Mouammar Kadhafi a été capturé vivant mais qu’il saignait profusément d’une blessure à la tête qui aurait été provoquée par les éclats d’une grenade lancée par l’un de ses propres gardes et aurait explosé au beau milieu d’eux.»
Attention ces images peuvent choquer
Par la suite, relate l'organisme humanitaire, le dirigeant libyen a été victime de tortures, avant d'agoniser dans une ambulance : «Ces vidéos montrent Mouammar Kadhafi se faisant rudement passer à tabac par les forces de l’opposition et recevant des coups de baïonnette aux fesses, entraînant de nouvelles blessures et de nouveaux saignements. Au moment où il est filmé en train d’être chargé dans une ambulance à moitié dénudé, il semble sans vie», détaille le rapport.
Le 21 octobre, les rebelles ont publiquement exposé la dépouille de Mouammar Kadhafi dans la ville de Misrata, au côté de celle d'un de ses fils, Moatassem, mort la veille.
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Hillary Clinton : «Nous sommes venus, nous avons vu, il est mort !»
Un certain nombre de responsables et de personnalités politiques occidentaux se sont félicités de la disparition de Mouammar Kadhafi. Hillary Clinton, alors secrétaire d'Etat américaine, n'avait pas caché sa joie : «Nous sommes venus, nous avons vu, il est mort !», avait lâché la chef de la diplomatie américaine sur la chaîne CBS, avant d'éclater de rire.
Le président de la République française, Nicolas Sarkozy, l'un des fers de lance de l'intervention otanienne en Lybie, avait quant à lui salué la «disparition» de l'ancien colonel comme une «étape majeure» pour la libération du peuple libyen, qui mènerait à «la réconciliation dans l'unité et la liberté». Le locataire de l'Elysée avait néanmoins tenu à préciser : «On ne doit jamais se réjouir de la mort d'un homme, quel que soit ce qu'il ait fait.»
Bien qu'applaudissant la chute du régime, le philosophe Bernard Henri-Lévy, qui avait plaidé auprès de Nicolas Sarkozy en faveur de l'opération militaire, s'était ému des photographies du corps martyrisé de l'ex-dirigeant lybien, qui avaient été diffusées à la suite de son décès : «Il y a, dans cette scène de lynchage, une sauvagerie qui me révolte et que rien n’excuse.»
Ne prenant pas autant de pincettes, Angela Merkel avait déclaré : «L'Allemagne est soulagée et très heureuse» de la mort de Mouammar Kadhafi. Se faisant érudit, le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi avait quant à lui déclamé : «Sic transit gloria mundi» («Ainsi passe la gloire du monde»).
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Campagne de Nicolas Sarkozy, chaos libyen... : l'héritage de la chute de Kadhafi
Cinq ans après sa mort, le fantôme du chef d'Etat libyen continue de hanter les deux rives de la Méditerranée. En Libye, le chaos hérité de la chute de Mouammar Kadhafi est on ne peut plus vivace : le gouvernement d'union nationale (GUN) basé à Tripoli et le gouvernement dit de Tobrouk se partagent le pouvoir, tout en essuyant les assauts de groupes rebelles, dont les djihadistes de l'Etat islamique (EI). Signe de l'échec de l'opération de l'OTAN à accoucher d'une situation stable dans le pays : la présence, en 2016, de forces militaires occidentales en Libye.
Le 20 juillet 2016, le président de la République François Hollande avait ainsi reconnu que la France menait «des opérations périlleuses de renseignement en Libye», à la suite du décès de trois militaires dans le pays. Toujours en 2016, le commandant des troupes de la ville, cité par le quotidien britannique The Times, avait fait savoir que les forces spéciales britanniques et américaines étaient en mission sur place.
En France, la mort de Mouammar Kadhafi pèse également toujours sur la vie politique : d'une part, les conséquences désastreuses de l'intervention de l'OTAN, conduite notamment par Paris, sont régulièrement rappelées aux candidats de la primaire à la droite Nicolas Sarkozy (qui était alors chef d'Etat) et Alain Juppé (qui était son ministre des Affaires étrangères).
D'autre part, l'ex-président de la République continue de faire l'objet de soupçons concernant le financement par l'ancien dirigeant libyen de sa campagne électorale de 2007. Pour certains de ses détracteurs, sa volonté de renverser Mouammar Kadhafi aurait notamment eu pour finalité de faire taire ce dernier, qui avait menacé, avant sa mort, de révéler des preuves d'un tel soutien financier.
Fin septembre, le site Mediapart avait fait état de l'existence d'un carnet ayant appartenu à un dignitaire libyen, dans lequel serait consigné le versement à Nicolas Sarkozy de 6,5 millions d'euros, attribué à des membres du gouvernement de Mouammar Kadhafi.