L'ancien employé de la NSA devenu lanceur d'alerte, Edward Snowden, aurait pu agir sous «influence russe», selon Gerhard Schindler, chef du Service fédéral de renseignement extérieur allemand (BND). C'est du moins ce qu'il affirme dans une interview publiée dans l'édition du 15 avril du magazine Focus.
«Il est tout à fait remarquable que [Snowden] ait publié ses fichiers spécifiquement sur la coopération entre la NSA et le BND ou avec les services secret britannique GCHQ», fait-il remarquer.
En mai dernier, Gerhard Schindler avait affirmé que le renseignement allemand était «dépendant de la NSA, et non l'inverse», rapporte Der Spiegel. Il avait également ajouté que son agence deviendrait inutile sans la présence de la NSA sur le sol allemand.
Les derniers chanceliers allemands espionnés
Hans-Georg Maassen, directeur de l'agence de sécurité intérieure de l'Allemagne (BfV), a fait valoir dans la même interview que les fuites de Snowden ont présenté un point de vue «unilatéral» sur la surveillance de masse car la Russie n'apparaît pas dans ces révélations. «Il est intéressant de noter qu'il n'y avait pas de publications sur des pays comme la Chine ou la Russie, qui sont [les] principaux objectifs des activités de renseignement de la NSA».
Il a laissé entendre que les fuites étaient «la tentative la plus importante depuis la Seconde Guerre mondiale de briser les relations entre l'Europe occidentale et les Etats-Unis». Une partie importante des révélations d'Edward Snowden font la lumière sur les activités du BND contre l'Europe et ses partenaires de l'OTAN, avec ou sans demande de la NSA.
Ses fuites ont également révélé que la NSA a espionné les conversations téléphoniques des trois derniers chanceliers allemands pendant plus de 10 ans. L'agence a également ciblé les principaux ministres allemands et les grandes entreprises européennes comme le géant technologique Siemens ou European Aeronautic Defence and Space Company (EADS).
Des fuites orchestrées ?
Ces fuites massives pourraient avoir été soigneusement élaborées et orchestrées de l'extérieur, selon Hans-Georg Maassen. Il y a des «preuves que le Kremlin utilise chaque occasion pour discréditer l'Allemagne», a-t-il affirmé. Moscou recourt à la «désinformation, l'infiltration, à la recherche d'influence, la propagande et la dégradation», a-t-il ajouté.
La Russie tente également de recruter des députés ainsi que des employés de fondations politiques ou même des membres du Bundestag, toujours selon Hans-Georg Maassen. Cependant, en avril 2015, les médias allemands ont rapporté que le BND avait plus de 2 000 personnes sur sa propre liste de surveillance, des politiciens locaux figurant parmi eux, avec leurs numéros de téléphone, leur correspondance par mail étant surveillée régulièrement.
Le BND a espionné ses partenaires américains
Les données de surveillance recueillies par le BND chaque mois sont transmises à la NSA, selon des informations du quotidien Die Zeit qui datent du mois de mai dernier, citant des fichiers confidentiels du renseignement allemand.
De nombreuses opérations à grande échelle du BND ont également visé des administrations étatiques européennes, des organes de l'Union européenne, des sociétés transnationales ainsi que des fonctionnaires allemands et des entreprises.
Les écoutes en Europe ont été faite principalement au nom de l'homologue américain du BND, mais ironiquement, l'intelligence allemande a également espionné ses partenaires américains.
Le magazine Der Spiegel a rapporté que le BND avait notamment le ministère de la Défense du Royaume-Uni, la NASA, l'US Air Force, le Département du Trésor et même la hotline du département d'Etat dans le collimateur. Après les fuites d'Edward Snowden sur le BND, une commission d'enquête parlementaire a été mise en place pour sonder les activités de la NSA en Allemagne.
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