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Turquie : un projet de loi vise à priver les élus «terroristes» de leur immunité parlementaire

Alors que des critiques de l’opération militaire contre les Kurdes se font entendre au Parlement turc, les députés du parti au pouvoir ont proposé de changer la Constitution du pays afin de poursuivre en justice les élus «soutenant le terrorisme».

La collecte de signatures a débuté la semaine dernière en faveur de l’amendement de l’article 83 de la Constitution selon lequel «un député qui est soupçonné d’avoir commis un crime avant ou après son élection ne peut pas être arrêté, interrogé, placé en détention ou jugé à moins qu’il n’en soit autrement décidé par l’Assemblée générale».

D’après le Premier ministre turc Ahmet Davutoglu, la levée de l’immunité vise les «soi-disants législateurs qui soutiennent le terrorisme et les terroristes», en faisant référence, apparemment, aux membres du Parti démocratique des peuples (HDP), troisième groupement politique du Parlement en termes de nombre de sièges et critique de la politique du gouvernement envers la population kurde.

«La Turquie mène la plus grande et complète lutte contre le terrorisme jamais [réalisée] alors que certains législateurs, avant ou après leur éléction, ont fait des déclarations soutenant le terrorisme, quelques-uns ont même fourni de facto du soutien et de l’aide. Certains législateurs ont appelé à la violence, provoquant l’indignation du public», selon l’agence Reuters citant le texte du projet.

Alors que l’Assemblée nationale turque se compose de 550 députés, les 316 élus du parti de la justice et du développement (AKP), au pouvoir en pays depuis 2002, ont déjà signé la proposition.

En janvier dernier, un procureur turc a ouvert une enquête sur Selahattin Demirtas et Figen Yuksekdag, tous deux à la tête de la formation politique pro-kurde du HDP. Cette procédure est intervenue suite à une déclaration de Recep Tayyip Erdogan selon laquelle ils devraient «payer» pour leurs remarques en faveur d'une plus grande autonomie pour les Kurdes. «Les déclarations des dirigeants du HDP sont des crimes constitutionnels. Il y a des enquêtes ouvertes par les procureurs contre eux. Ceux-ci devraient être poursuivis», a-t-il indiqué à l'époque.

Ces derniers mois, Erdogan a multiplié les arrestations et les poursuites judiciaires contre les partisans de la cause kurde, avocats, intellectuels, journalistes ou élus, considérés comme des «complices» des «terroristes».

Ces mesures ont suscité de nombreuses critiques, aussi bien en Turquie qu'à l'étranger, parmi les détracteurs du chef de l'Etat turc, accusé de dérive autoritaire.

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