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Crise migratoire : moins de 0,1% des migrants Syriens demandent un permis de travail en Turquie

Même si l’UE affirme que l’expulsion des demandeurs d’asile syrien est atténuée par la possibilité nouvelle d’y travailler légalement, rares sont ceux qui demandent un permis de travail.

D’après le journal britannique The Guardian, les chiffres officiels fournis au personnel humanitaire à la fin du mois de mars montrent que sur les 2,7 millions de Syriens en Turquie aujourd’hui, seuls 0,074% ont été embauchés conformément à la nouvelle loi sur le travail, adoptée il y a deux mois.

Cependant, depuis son entrée en vigueur, aucune information sur le nombre de permis de travail distribués n’a été fournie.

Davantage de demandeurs d’asile pourraient faire une demande de permis de travail dans les mois à venir, rapporte le Guardian. Mais les chiffres montrent que la nouvelle loi n’a, pour le moment, quasiment pas modifié la situation des réfugiés en ce qui concerne l’emploi. C’est peut-être que parce que, en l’appliquant, les entrepreneurs turcs seraient obligés de payer aux réfugiés un salaire minimum. 

L’accord entre l’Union européenne et la Turquie visant à renvoyer en Turquie les réfugiés arrivant en Grèce, a été défendu par l’UE, en vertu de la force prétendue du nouveau droit turc du travail pour procurer aux migrants un droit à travailler et aussi, parce qu’Ankara s’est engagé à respecter les règles internationales sur la protection des réfugiés.

Selon le même journal, l’aspect le plus problématique de la nouvelle loi consiste à ce que les demandeurs d’asile ne peuvent pas faire la demande d’un permis de travail avant d’avoir reçu un contrat officiel de la part d’un employeur potentiel. Beaucoup d’entre eux comptent sur la main-d’œuvre bon marché constituée par les demandeurs d’asile qu’ils peuvent payer à des niveaux inférieurs au salaire minimum.

Pour ou contre ?

Les demandeurs d’asile et les entreprises qui les aident à faire les demandes de permis ont critiqué la situation indiquant que, pour les migrants, le risque d’être exploités restait malgré tout trop important.

A noter que l'Organisation internationale du travail (OIT) a indiqué que la loi était considérée comme un progrès, même si elle n’allait pas assez loin. «Au final, c’est une excellente occasion et un pas important fait par le gouvernement», a expliqué le directeur de l'OIT en Turquie Numan Özcan.

«Ce n’est pas un permis général pour tout le monde. Dans certains secteurs, cela va marcher mieux que dans d’autres. [Mais] pour l’instant ces gens n’avaient pas la possibilité de travailler légalement et aujourd’hui ils ont cette possibilité», a-t-il poursuivi.

Néanmoins, le nombre stupéfiant de Syriens cherchant du travail en Turquie veut dire que même si certains demandent à ce que leurs droits soient respectés lorsqu’ils travaillent, les employeurs ne s’y conformeront pas tous parce qu’un autre demandeur d’asile sera disposé à travailler à un tarif inférieur à celui au salaire minimum légal, a commenté un travailleur.

«La loi n’a rien changé», a fait savoir au Guardian Mohamed Deeb Aqra, un travailleur âgé de 48 ans qui ne travaille pas selon les nouvelles normes légales. «Si je demande un contrat, il [mon patron] me licenciera. Il y a tant de Syriens qui cherchent un travail, que je peux être facilement remplacé».

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