Décidément, il reste difficile de suivre la politique erratique d'Emmanuel Macron sur le dossier gazaoui. Alors que le président français avait martelé dans une interview accordée à L'Humanité le 19 février qu'«une démocratie ne peut pas faire ce qu’Israël est en train de faire», le site Disclose nous apprend que Paris a autorisé, en catimini, la livraison de plus de 100 000 cartouches à l'armée israélienne, et ce, en pleine offensive de Tsahal à Gaza.
En effet, l'enquête, qui date du 25 mars, nous apprend que la France a bien envoyé «une cargaison d’armements destinée à Israël» provenant d'un hangar appartenant à Eurolinks, une société marseillaise spécialisée dans la fabrication d’équipements militaires. Les clichés, pris le 23 octobre par Marsactu, montrent l’inscription en anglais «10 000 liens M27 pour des munitions de 5,56 millimètres [10 000 links M27 for 5.56 mm Ammo]». Ces équipements militaires permettent des tirs en rafale pour les fusils automatiques légers à l'instar des M249 et FN Minimi.
Toujours selon la même source, le destinataire de cette cargaison n'est autre que la société IMI Systems, basée à Ramat Hasharon, au nord de Tel-Aviv. L'entreprise a été vendue en 2018 au fleuron de l'armement israélien Elbit.
Des cartouches utilisées lors du «massacre de la farine»
Disclose rapporte également que ces armes israéliennes ont été utilisées lorsqu'un regroupement de Gazaouis tentait de réceptionner l'aide humanitaire le 29 février dernier. Plusieurs experts de l’ONU ont condamné le «massacre de la farine», qui a fait au moins 112 morts et plus de 760 blessés.
Concernant la vente d'armes françaises à Israël, le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, avait déclaré dans un article de Mediapart le 24 janvier que Paris exportait «des équipements militaires à Israël afin de lui permettre d’assurer sa défense, comme l’article 51 de la Charte des Nations unies lui en donne le droit», sans plus de précisions. Selon le dernier rapport sur les exportations d'armement de la France, Paris a vendu pour 208 millions d’euros de matériel militaire à Israël sur dix ans, dont 25,6 millions en 2022.
Le 20 mars, la porte-parole du gouvernement Prisca Thévenot affirmait : «Nous ne livrons des armes que dans le cadre de composants défensifs pour le Dôme de fer.»
En apparence, Paris a évolué
La position de l'Élysée a grandement évolué depuis le 7 octobre, se faisant peu à peu de plus en plus critique à l'égard d'Israël, à mesure que s'accentuaient les représailles de Tsahal dans la bande de Gaza, alors que les puissances régionales, mais aussi la Russie et la Chine, ont depuis le début du conflit appelé à une pacification.
Le 24 octobre dernier, lors de son déplacement en Israël, le chef d'État français avait soumis la proposition de former une coalition contre le Hamas dans la même forme que celle contre l'État islamique en Syrie et en Irak. Il s'est avéré, selon des informations de Libération, que cette idée émanait non pas de hauts diplomates, mais de Bernard-Henri Lévy lui-même.
Au fur et à mesure du conflit à Gaza, Paris a appelé à maintes reprises à un cessez-le-feu et à la libération des otages. Le président français a même téléphoné au Premier ministre israélien pour lui faire part de son désaccord sur une probable opération terrestre à Rafah, dans le sud de l'enclave gazaouie.