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Erodgan qualifie le Hamas de «groupe de libérateurs», Israël fustige des «mots provocateurs»

Dans un virulent discours au Parlement, le président turc a pris la défense du Hamas, fustigé l’«inhumanité» de l’armée israélienne et l’«hypocrisie» des Occidentaux. Il a également renoncé à ses projets de déplacement en Israël. Le Qatar et la reine Rania de Jordanie ont aussi regretté la posture occidentale.

Devant les élus de son parti, Recep Tayyip Erdogan a annoncé ce 25 octobre qu'il renonçait à tous ses projets de déplacement en Israël, stigmatisant l'incapacité des Occidentaux à arrêter la guerre à Gaza.

«Nous avions le projet de nous rendre en Israël, mais c'est annulé. Nous n'irons pas», a déclaré le chef de l'Etat, qui avait rencontré le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou pour la première fois en septembre à New York. «J'ai serré la main de cet homme, nous avions de bonnes intentions, mais il nous a abusés», a-t-il poursuivi dans un discours virulent, devant des députés enflammés, scandant «à bas Israël» et «Allah Akbar !» (Dieu est grand).

«Les relations auraient pu être différentes, mais cela n'arrivera plus, malheureusement», a ajouté le président turc. «Vous ne trouverez aucun autre Etat dont l'armée se conduise avec une telle inhumanité», a-t-il continué à propos des bombardements menés par Israël à Gaza en représailles à l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre qui a fait 1 400 morts, selon les Israéliens. Les représailles israéliennes à Gaza ont causé la mort de 6 546 personnes, dont au moins 2 704 enfants, selon le ministère de la santé du Hamas.

Pour Israël, «Hamas = groupe Etat islamique»

«Le Hamas n'est pas un groupe terroriste, c'est un groupe de libérateurs qui protègent leur terre», a estimé le chef d’Etat turc. Des propos qui ont provoqué l’indignation de l’Etat hébreu.

«Même la tentative du président turc de défendre l'organisation terroriste et ses mots provocateurs ne changeront rien aux horreurs que le monde entier a vues, ni à ce fait sans équivoque : Hamas = groupe Etat islamique», a dénoncé le ministère israélien des Affaires étrangères dans un communiqué. 

Le président turc s'en est également pris «aux puissances occidentales» qui «versent des larmes pour Israël et ne font rien d'autre», stigmatisant leur «incapacité à arrêter Israël».

«Que ceux qui ont mobilisé le monde en faveur de l’Ukraine ne se soient pas prononcés contre les massacres à Gaza est le signe le plus flagrant de leur hypocrisie», a-t-il souligné. Le président turc a ensuite appelé à la fondation d'une «Palestine indépendante» et à une conférence entre Israël et les Palestiniens, proposant que la Turquie agisse comme «garant» de tout accord futur.

La diplomatie qatarie dénonce aussi les biais occidentaux

«Il n'est pas permis de condamner le meurtre de civils dans un contexte et de le justifier dans l'autre», a déclaré ce 25 octobre le chef de la diplomatie du Qatar lors d’une conférence de presse avec son homologue turc à Doha.

Cheik Mohammed ben Abdulrahmane Al-Thani, qui est également Premier ministre, a assuré que les deux pays rejetaient toute politique de «deux poids, deux mesures [...] lorsqu'il s'agit de vies humaines».  Le ministre turc des Affaires étrangères, Hakan Fidan, a déclaré que «l'incapacité de certains pays d'Amérique et d'Europe à condamner et à empêcher le désastre à Gaza» constituait «une politique de deux poids, deux mesures très grave».

Le Qatar et la Turquie, qui sont des défenseurs de la cause palestinienne et disposent de canaux de communication avec le Hamas, travaillent avec des partenaires régionaux pour désamorcer le conflit, a indiqué Mohammed ben Abdulrahmane Al-Thani.

L’Occident «complice» des souffrances à Gaza, accuse la reine de Jordanie

Parallèlement, se disant «choquée» de la «réaction» des pays occidentaux, la reine Rania de Jordanie a également dénoncé «le silence dans le monde» sur la situation dans la bande de Gaza depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas. «Les peuples du Moyen-Orient [...] sont choqués et déçus par la réaction du monde face à la catastrophe qui se déroule actuellement. Au cours des deux dernières semaines, nous avons constaté qu'il y avait deux poids, deux mesures», a-t-elle déclaré lors d'une interview exclusive à CNN, diffusée ce 25 octobre.

«Lorsque le 7 octobre a eu lieu, le monde a immédiatement et sans équivoque soutenu Israël et son droit à se défendre et a condamné l'attaque qui s'est produite», a-t-elle ajouté. «Ce que nous voyons depuis quelques semaines, c'est le silence dans le monde», a dit la reine de Jordanie, elle-même issue d'une famille d'origine palestinienne. «C'est la première fois dans l'histoire moderne qu'il y a une telle souffrance humaine et que le monde n'appelle même pas à un cessez-le-feu», a-t-elle déploré, qualifiant le monde occidental de «complice».

Cessez-le-feu : dialogue de sourds à l’ONU

Plusieurs projets de résolution appelant à un cessez-le-feu humanitaire à Gaza ont été rejetés au Conseil de sécurité de l’ONU par les pays occidentaux, Etats-Unis en tête. La situation dans l’enclave gazaouie, où vivent plus de deux millions de personnes, assiégées depuis deux semaines par l’armée israélienne, est jugée «catastrophique» par plusieurs agences onusiennes.

«Comment pouvez-vous conclure un accord de cessez-le-feu avec quelqu'un qui a juré de tuer et de détruire votre propre existence», a lancé à l’ONU, le 24 octobre, le chef de la diplomatie israélienne en réponse à l’appel du secrétaire général des Nations unies à un cessez-le-feu humanitaire. «Après le massacre du 7 octobre, il n'y a pas de place pour une approche équilibrée. Le Hamas doit être rayé de la surface de la planète !» a, par la suite, déclaré le ministre israélien sur les réseaux sociaux.