Au lendemain du déclenchement de l'offensive par ses forces militaires, Ilham Aliev s'est exprimé pour la première fois dans un communiqué publié ce 20 septembre par ses services, relatant un entretien téléphonique qu'il a eu la veille avec le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken.
«Le chef de l'Etat [azerbaïdjanais] a affirmé que les mesures anti-terroristes seraient interrompues si [les troupes du Haut-Karabagh] déposent les armes et sont désarmés», selon le communiqué. «La population civile et les infrastructures ne sont pas ciblées, seules les cibles militaires légitimes sont détruites», a-t-il assuré.
Selon lui, des représentants des Arméniens vivant dans le Haut-Karabagh ont été invités au dialogue «plusieurs fois» par la présidence azerbaïdjanaise pour «discuter de la question de [leur] réintégration» à l'Azerbaïdjan, «mais ils ont refusé».
Ilham Aliev souligne que l'armée azerbaïdjanaise a lancé cette opération après la mort le 19 septembre dans cette région de «civils et policiers» dans l’explosion de mines, accusant des «saboteurs» arméniens d'avoir posé ces engins explosifs.
Il a aussi affirmé que les «soi-disant élections présidentielles» organisées le 9 septembre par les séparatistes arméniens étaient «la continuation de provocations délibérées contre la souveraineté de l'Azerbaïdjan» et avaient également contribué au lancement de l'offensive.
Bakou revendique la prise de 60 positions arméniennes
Depuis le 19 septembre, les combats ont fait au moins 29 morts, selon les deux adversaires. Les séparatistes ont signalé 27 morts, dont deux civils, et plus de 200 blessés, tandis qu'environ 7 000 habitants de 16 localités ont été évacués. L'Azerbaïdjan a rapporté que deux civils avaient péri dans les zones sous son contrôle.
Les séparatistes ont affirmé que plusieurs villes du Haut-Karabagh, dont sa capitale Stepanakert, étaient ciblées par des «tirs intensifs», qui visent aussi des infrastructures civiles.
Les affrontements ont lieu sur toute la ligne de contact de ce territoire. Les Azerbaïdjanais affirment avoir eu recours à l'artillerie, à des roquettes, à des drones d'attaque et à des avions. Soixante positions arméniennes y ont été conquises, a annoncé Bakou.
La Russie évacue des civils, dont 1 049 enfants
A New York, le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres a appelé «dans les termes les plus forts, à un arrêt immédiat des combats, à la désescalade et au respect plus strict du cessez-le-feu de 2020 et des principes du droit international humanitaire», selon un communiqué publié le 19 septembre au soir par son porte-parole Stéphane Dujarric.
En marge de l'Assemblée générale des Nations unies, la France a de son côté réclamé une réunion «d'urgence» du Conseil de sécurité pour prendre acte de l'offensive selon elle «illégale» et «injustifiable» menée par Bakou.
La Russie a également exhorté à «cesser immédiatement l'effusion de sang, à mettre un terme aux hostilités et à arrêter les pertes civiles», dans un communiqué de son ministère des Affaires étrangères. Le ministère russe de la Défense a rapporté le 20 septembre avoir évacué près de 2 000 civils des zones à risque, dont 1 049 enfants.
La présidence azerbaïdjanaise avait déjà appelé le 19 septembre en soirée les troupes sécessionnistes du Haut-Karabagh à déposer les armes. Elle a proposé, en cas de capitulation, des pourparlers «avec les représentants de la population arménienne du Karabakh à Yevlakh», une ville azerbaïdjanaise à 295 km à l'ouest de Bakou.
Auparavant, les autorités de cette région avaient réclamé un cessez-le-feu immédiat et des négociations.
Erevan accuse Bakou de «nettoyage ethnique»
Quant à l'Arménie, qui a dénoncé une «agression de grande ampleur» à des fins de «nettoyage ethnique», elle a assuré ne pas avoir de troupes au Haut-Karabagh, laissant entendre que les séparatistes étaient seuls face aux soldats azerbaïdjanais. L'Arménie considère que c'est à la Russie, garante d'un cessez-le-feu datant de 2020 avec des forces de la paix sur le terrain, d'agir pour «stopper l'agression azerbaïdjanaise».
Les tensions s'aggravent depuis des mois autour de ce territoire qui a déjà été au cœur de deux guerres entre Erevan et Bakou. La première avait duré de 1988 à 1994, celle de l'automne 2020 s'était arrêtée au bout de six semaines.
Le Premier ministre arménien Nikol Pachinian, auquel l'opposition reproche d'avoir été responsable de la défaite de 2020, a dénoncé des appels à un «coup d'Etat» dans son pays, où des heurts ont opposé des manifestants le qualifiant de «traître» et exigeant sa démission.