Membre du gouvernement le plus à droite de l'histoire d'Israël, le nouveau ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir a visité ce 3 janvier l'esplanade des Mosquées à Jérusalem-Est, accompagné de membres des forces de sécurité israéliennes et alors qu'un drone survolait le lieu saint.
Après son départ, la situation sur l'esplanade était calme et des fidèles et visiteurs ont pu y accéder sans encombre, a constaté une journaliste de l'AFP. Troisième lieu saint de l'islam et site le plus sacré du judaïsme sous le nom de «Mont du Temple», l'esplanade des Mosquées est située dans la Vieille ville de Jérusalem, dans le secteur palestinien occupé et annexé par Israël.
Itamar Ben Gvir, connu pour ses diatribes anti-palestiniennes, avait annoncé son intention de se rendre sur le lieu saint, et le groupe palestinien Hamas, au pouvoir à Gaza et bête noire d'Israël, avait averti qu'une telle visite risquerait d'être «un prélude à une escalade».
«Le gouvernement israélien dont je suis membre ne cèdera pas à une organisation vile et meurtrière», avait rétorqué Itamar Ben Gvir sur Twitter. «Si le Hamas pense que les menaces vont me dissuader, qu'il comprenne que les temps ont changé», avait-il ajouté.
Visite critiquée du Hamas à Washington en passant par le rabbinat
En vertu d'un statu quo historique, les non-musulmans peuvent se rendre sur le site à des heures précises mais ne peuvent pas y prier. Or, ces dernières années, un nombre croissant de juifs, souvent nationalistes, y prient subrepticement, un geste dénoncé comme une «provocation» par les Palestiniens et des pays arabes.
«Notre peuple palestinien continuera de défendre ses lieux saints et la mosquée Al-Aqsa», a lancé un porte-parole du Hamas, Hazem Qassem, qualifiant de «crime» la visite d'Itamar Ben Gvir.
Il s'agit d'une «provocation sans précédent», a de son côté estimé le ministère palestinien des Affaires étrangères à Ramallah, en Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël.
Itamar Ben Gvir, qui s'était auparavant rendu sur le site en tant que député, plaide pour que les juifs soient autorisés à entrer et prier sur l'esplanade, ce à quoi le rabbinat israélien s'oppose. «Que diront les gens quand ils verront un ministre, juif pratiquant, qui bafoue la position du rabbinat», avait écrit Yitzhak Yossef, grand rabbin séfarade, dans une lettre adressée à Itamr Ben Gvir.
Plusieurs pays arabes ont également condamné cette visite. La Jordanie a dénoncé une «provocation» laissant présager «une escalade». Les Emirats arabes unis ont appelé à «mettre un terme aux violations graves et provocatrices» sur le site. L'Arabie saoudite, la Ligue arabe et l'Organisation de la coopération islamique l'ont également condamnée.
De son côté, l'ambassadeur des Etats-Unis en Israël, Tom Nides, a souligné que «l'administration Biden avait clairement fait savoir au gouvernement israélien qu'elle s'opposait à toute mesure qui pourrait nuire au statu quo dans les lieux saints», selon un porte-parole du bureau américain des affaires palestiniennes.
«La plus irresponsable»
En 2000, la visite d'Ariel Sharon, alors à la tête de l'opposition de droite, sur l'esplanade, avait entraîné des heurts sanglants entre Palestiniens et policiers israéliens, marquant le début de la seconde Intifada (soulèvement palestinien, 2000-2005).
En mai 2021, après des violences sur l'esplanade et ailleurs à Jérusalem-Est, le Hamas avait tiré des salves de roquettes sur Israël, conduisant à une guerre de 11 jours avec l'armée israélienne.
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou n'a pas commenté la visite lors de la réunion du cabinet ce 3 janvier. «Voilà ce qui arrive lorsqu'un Premier ministre faible est forcé de donner des responsabilités à la personne la plus irresponsable du Moyen-Orient dans l'endroit le plus explosif du Moyen-Orient», a commenté sur Twitter le chef de l'opposition, Yaïr Lapid.
Itamar Ben Gvir est en faveur de l'annexion par Israël de la Cisjordanie, où vivent environ 2,9 millions de Palestiniens et 475 000 Israéliens. Ces derniers habitent dans des colonies jugées illégales par le droit international.
Il prône également le transfert vers les pays voisins d'une partie des Arabes israéliens, descendants des Palestiniens restés sur leurs terres après la création d'Israël en 1948.