Le vice-Premier ministre du gouvernement de la Fédération de Russie Alexsandr Novak – ancien ministre de l'Energie – a déclaré le 2 octobre qu'il était techniquement possible de réparer les gazoducs Nord Stream 1 et 2, après les dommages subis par ceux-ci la semaine précédente en raison d'un acte de sabotage. «Il y a des possibilités techniques pour restaurer l'infrastructure, cela nécessite du temps et les financement appropriés. Je suis sûr que les moyens appropriés seront trouvés», a-t-il affirmé sur la chaîne russe Rossia 1.
L'Agence danoise de l'énergie du Danemark avait annoncé le 2 octobre que la pression était stable dans Nord Stream 1, suggérant que le gaz ne fuyait plus, après avoir indiqué la veille que le gaz ne s'échappait plus de Nord Stream 2, qui contenait du gaz même s'il n'a jamais été mis en service. Citant les services de sécurité allemands, le quotidien Der Tagesspiegel affirmait de son côté que les infrastructures pourraient être mises définitivement hors d'usage si elles n'étaient réparées rapidement, en raison de la corrosion provoquée par la circulation d'eau salée dans les canalisations.
Alexsandr Novak a cependant souligné qu'il fallait dans un premier temps établir les responsabilités dans cette affaire et identifier les auteurs du sabotage ayant entraîné un total de quatre fuites sur les installations. Il a ainsi rappelé qu'un cortège de pays avait fait part de leur franche opposition à la mise en service de ces infrastructures. «Les Etats-Unis et l'Ukraine, ainsi que la Pologne à une occasion ont déclaré que cette infrastructure ne fonctionnerait pas, qu'ils feraient tout pour s'en assurer», a-t-il pointé, faisant notamment référence aux propos de Joe Biden tenus en février 2022 selon lesquels toute intervention russe en Ukraine amènerait à la fin de Nord Stream 2.
Un acte de sabotage imputable aux Anglo-saxons, selon Moscou
Interrogé sur le même sujet en conférence de presse ce 3 octobre, le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov a confirmé la faisabilité technique d'une réparation : «On comprend [que Nord Stream 1 et 2] doivent être restaurés, et qu’en général on pourrait reconstruire n’importe quoi.»
Il a néanmoins précisé que cette question d'une réparation des infrastructures restait «en suspens», développant son propos : «Il n’est pas évident de savoir sur quelle coopération internationale nous pourrions compter dans une telle situation, étant donné l’attitude antagoniste et hystérique de l’Occident pris dans son ensemble, à l’égard de notre pays. Et nous devrons bien sûr examiner les endroits des fuites et comprendre ce qui s’est passé là-dessous, comprendre l’ampleur de la catastrophe.»
Le 30 septembre, les renseignements russes ont déclaré détenir des éléments appuyant la thèse d'une implication occidentale dans les dommages causés aux gazoducs Nord Stream qui, selon un rapport remis par le Danemark et la Suède à l'ONU, ont été déclenchés par une charge explosive de grande envergure. Le même jour, lors de son discours au Kremlin, le président russe Vladimir Poutine a directement accusé les Occidentaux d'être à l'origine des explosions ayant provoqué les fuites importantes dans les gazoducs concernés, construits pour acheminer le gaz russe en Europe. «En organisant des explosions sur les gazoducs internationaux qui longent le fond de la mer Baltique, ils ont en réalité commencé à détruire l'infrastructure énergétique européenne», a fustigé Vladimir Poutine lors d'un discours au Kremlin, imputant ce «sabotage» aux «Anglo-saxons».
Questionné sur l'identité des coupables lors de sa conférence de presse du 3 octobre, Dmitri Peskov a développé : «Il y a certainement une partie ou des parties qui, en l’absence de fonctionnement de ces tuyaux de gazoduc, ont la possibilité de vendre une grande quantité de leur GNL à un prix plus élevé. C’est la première chose. Et cette partie est bien connue. Ce sont les États-Unis. Et il y a aussi des pays qui ont la capacité militaro-technologique d’effectuer un tel acte de sabotage. Là aussi, tous les spécialistes savent bien quels sont ces pays.» Le porte-parole a en outre souligné que les pays qui n'avaient aucun intérêt dans ce sabotage étaient d'une part les pays européens, «privés [...] d'une voie d’approvisionnement en gaz», et d'autre part les pays vendeurs, dont la Russie.
Le 28 septembre, le Parquet général russe avait annoncé l'ouverture par le FSB d'une enquête pour «acte de terrorisme international» après le sabotage présumé des gazoducs. Dans son communiqué, l'institution soulignait que «la Fédération du Russie a[vait] subi un grave préjudice économique du fait de ces actes».
Si les chancelleries occidentales n'ont pas accusé formellement Moscou d'être à l'origine du sabotage présumé, certains pays, dont la Pologne, ont suggéré que les dégradations pourraient être liées au conflit ukrainien, dans le cadre du bras de fer énergétique entre Moscou et l'Union européenne. Le président américain Joe Biden a promis le 30 septembre d'envoyer des moyens sous-marins sur le site des explosions «pour déterminer ce qui s'est exactement passé», tandis que l'Allemagne, la Suède et le Danemark ont annoncé le lancement d'une enquête conjointe sur ces explosions sous-marines. L'OTAN avait dénoncé le 29 septembre des actes de sabotage «délibérés, inconsidérés et irresponsables» commis contre les gazoducs, tout en assurant qu'elle se défendrait contre l'utilisation de l'énergie à des «fins coercitives».