«Incompétence», «racailles», «honte absolue», «faillite», «flop de l'organisation»... Au lendemain de l'organisation par Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), le 28 mai, de la finale de la Ligue des champions de football entre le Real Madrid et Liverpool (1-0), l'événement restera dans les mémoires.
Alors que la soirée s'annonçait sous les meilleurs auspices, elle a finalement donné lieu à des scènes de chaos autour du Stade de France, le coup d'envoi ayant même été retardé de plus de 30 minutes en raison d'individus qui tentaient de s'introduire de force dans l'enceinte, mais également dans la capitale, où la police a fait usage de gaz lacrymogènes et procédé à 105 interpellations.
De nombreux politiques et observateurs du milieu du ballon rond ont vertement critiqué l'organisation de l'événement.
«La France est donc incapable d'organiser une finale de Ligue des champions et de filtrer rationnellement des supporters. Un sommet d'incompétence, une faillite absolue», a expliqué le journaliste Vincent Duluc sur Twitter.
Son confère Daniel Riolo a lui évoqué, sur le même réseau social, une «honte absolue». «Je crois que les supp[orters] de Liverpool ou du Real n’y sont pour rien… j’en reviens pas de cette honte absolue … agressions dehors des supp[orters] des deux clubs…», a-t-il fait valoir.
De son côté, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin avait fait savoir au moment du match, toujours sur Twitter, que «des milliers de "supporters" britanniques, sans billet ou avec des faux billets [avaient] forcé les entrées et, parfois, violenté les stadiers».
Une version des faits remise en cause par l'ancien candidat à la présidentielle Eric Zemmour. «Auront été accusés "les supporters de Liverpool", puis "des supporters sans billet" avant que la vérité éclate brutalement : des racailles sautent par-dessus les barrières et agressent autour du Stade de France», a-t-il dénoncé sur le même réseau social, reprenant le message de Gérald Darmanin.
L'ancienne candidate du Rassemblement national à la présidentielle Marine Le Pen a elle critiqué Gérald Darmanin «incapable de maintenir l’ordre face à la racaille, qui est en train de gâcher ce qui devrait être un événement populaire. Il est temps de remettre la France en ordre».
Interrogée au Grand Jury RTL-Le Figaro-LCI, elle a expliqué avoir ressenti «un sentiment d'humiliation» après avoir pris connaissance des incidents. «Nous sommes regardés par le monde entier et l'intégralité des capitales qui ont vu cela ont constaté que la France n'était plus dans la capacité d'organiser de grandes manifestations sans que celle-ci dégénèrent», a-t-elle ajouté, précisant : «Il y a eu quasiment des émeutes qui se sont déclenchées et, encore une fois, d'après les dires des reporters étrangers [...] ce sont des bandes de voyous [...] de ce département [la Seine-Saint-Denis] hors-contrôle.»
Présent lui sur BFMTV, le leader de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, a mis en lumière une «image [...] lamentable». «Elle est inquiétante parce qu’on voit clairement qu'on n'est pas préparés pour des événements du type Jeux Olympiques», a-t-il déploré.
Le président du mouvement Debout la France, Nicolas Dupont-Aignan, a lui estimé que de tels débordements étaient une «honte pour la France». «Un journaliste espagnol : "J'ai assisté à beaucoup de finales de Ligue des champions. Ce qui se passe au Stade de France, je n'avais jamais vu ça. Il y a des groupes de Français autour du stade qui attaquent et volent les supporters"», a-t-il ajouté sur Twitter.
Mais Stéphane Troussel, le président de la Seine-Saint-Denis, a lui dénoncé sur Twitter «l'extrême-droite, mensongère et dégoûtante, se précipite une fois de plus sur son objet de haine favori : la Seine-Saint-Denis». «Avec Mathieu Hanotin [le maire de Saint-Denis] nous demandons une commission d’enquête rapide et transparente sur les manquements qui ont conduit aux débordements au Stade de France. Il est inacceptable que la Seine-Saint-Denis et ses habitant.e.s en soient les boucs émissaires», a-t-il conclu.
Initialement prévue à Saint-Pétersbourg, la finale de la Ligue des champions avait finalement été délocalisée après le déclenchement de l'offensive militaire russe en Ukraine. Selon nos confrères de L'Equipe, Emmanuel Macron avait lui même été «très actif, auprès de l'UEFA, dans l'obtention de la finale de la Ligue des Champions».
L'instance du football européen avait même remercié le chef de l'Etat français dans sa communication officielle comme le rapportait RMC le 25 février dernier : «L'UEFA tient à exprimer ses remerciements et sa gratitude au président de la République française Emmanuel Macron pour son soutien personnel et son engagement à relocaliser le match.»
Un épisode sur lequel est revenu le journaliste Romain Molina. «Pour rappel, Emmanuel Macron était très fier d'avoir obtenu l'organisation de la finale de la Ligue des Champions pour le "rayonnement" de la France», a-t-il rappelé sur Twitter après les premiers débordements en marge de la finale.
Car force est de constater que pour ce qui est du «rayonnement», le coup semble raté. Interrogé par BFMTV le 29 mai, l'ancien député LR des Yvelines Henri Guaino a regretté que «l'image du pays ne sort[e] pas grandie». «C'est l'image de l'Occident dans son ensemble qui est impactée [...] Cette violence est le symptôme d'un malaise profond dans nos sociétés, [...] et on n'arrive plus à contenir cette violence», a-t-il ajouté.
Dans un communiqué de presse mis en ligne le 29 mai, le ministère des Sports a fait savoir qu'une réunion se tiendrait le 30 mai à 11h en présence du préfet de police de Paris ainsi que celle de l'UEFA, de la Fédération française de football, du Stade de France, de la Préfecture de Seine-Saint-Denis et de la mairie de Saint-Denis afin «d'en tirer toutes les leçons pour éviter que de tels événements se reproduisent pour [les] futurs grands événements sportifs internationaux».
La presse étrangère a elle aussi largement critiqué l'organisation de l'événement. «Stade de Farce», titrait par exemple le tabloïd anglais The Sun alors qu'Alfred Relano, résident d'honneur du quotidien sportif espagnol As dénonçait lui des «hordes de barbares sans ticket d'entrée» qui «ont créé un scandale sans nom aux portes du stade, qui aurait bien pu provoquer une catastrophe». Enfin, le quotidien italien le Corriere dello Sport insistait sur le «flop de l'organisation», ajoutant : «Une mauvaise soirée en conclusion d'une triste saison pour la France, où se sont multipliés dans les stades les problèmes de sécurité et d'ordre public.»