France

Divisions chez LREM après les propos d'Elisabeth Moreno soutenant le port du hijab dans le sport

Soutenant une revendication d'une association controversée qui défend le port du voile islamique dans les compétitions, la secrétaire d'Etat Elisabeth Moreno a été critiquée par un député de la majorité. S'est suivie une passe d'armes sur Twitter.

Sur LCI le 10 février, la secrétaire d'Etat chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes, Elisabeth Moreno, a été bien en mal sur plusieurs questions concernant le port du voile.

Confessant que le voile n'était «pas un outil d'émancipation», elle a tout de même manié le «en même temps» macronien. Elle était ainsi invitée à réagir sur l'action politique des «hijabeuses», un collectif de joueuses de football «revendiquent le droit au port du voile islamique [...] lors des compétitions de football, pratique interdite pour l'instant par le règlement de la Fédération française de football».

«Ces filles font du sport, le sport c'est de l'émancipation», a déclaré Elisabeth Moreno. «Si les filles veulent jouer au football en étant voilées, en quoi c'est impossible ?», interroge-t-elle. «Les empêcher de [faire du football] parce qu'elles portent un voile, d'abord ce n'est pas la loi», a-t-elle aussi argumenté, considérant le terrain de football comme un espace public. 

La membre du gouvernement a de fait affirmé qu'il ne fallait pas «discriminer» et que si une loi interdisait aujourd'hui aux clubs et associations sportives de faire du «prosélytisme», elle a martelé que les femmes étaient libres de porter un voile sur un terrain.

Une position qui a fait monter au créneau l'ancien Premier ministre Manuel Valls, ancien député proche de la macronie : «Le sport libère le corps, le voile l’enferme. Les "hijabeuses" sont des militantes dont le but est la banalisation du voile dans l’espace public. Ne soyons pas naïfs, la provocation est évidente. La liberté, le féminisme et les valeurs de la République sont ainsi dévoyées.»

La majorité parlementaire divisée sur les propos d'Elisabeth Moreno

Le député de La République en marche (LREM) François Jolivet est également parti à l'offensive. L'élu a exprimé sur Twitter son «profond désaccord avec Elisabeth Moreno», constatant qu'elle «n'aurait sans doute pas voté la loi de 2004 sur l’interdiction des signes religieux dans les établissements scolaires». «Les propos de la ministre sont décadents et ne représentent pas le travail engagé depuis 2017 contre le séparatisme», a-t-il ajouté.

François Jolivet a reçu l'appui de la parlementaire LREM Sereine Mauborgne (qui l'a retweeté) et du député Les Républicains (LR) Julien Aubert qui s'est dit pour sa part «rassuré de voir qu’il reste des républicains au sein de LREM et des députés courageux».

Avec célérité, Elisabeth Moreno a rétorqué sur Twitter à François Jolivet : «Calmez-vous, ça va bien se passer». Une référence à la réplique, fortement critiquée, adressée par Gérald Darmanin à la journaliste Apolline de Malherbe.

Elisabeth Moreno a également souligné auprès de l'élu de l'Indre que «la bataille de la majorité, c'[était] la liberté des femmes». «Elle vous l’a d'ailleurs rappelé lors de l'examen de la "Loi sport" en rejetant tous vos amendements qui auraient eu pour seul effet d’assigner les femmes à résidence», a-t-elle conclu sur les réseaux sociaux.

Cette réponse n'a pas plu à plusieurs personnalités comme l'essayiste Raphaël Enthoven. «Est-ce trop demander aux ministres de répondre sans mépris à ceux qui leur font des objections ?», a-t-il notamment commenté.

Elisabeth Moreno a reçu le soutien du député LREM Raphaël Gérard qui a aussi pris la défense de ces footballeuses : «Stigmatiser, isoler, exclure au nom de l'universalisme ne produit qu'un seul effet : le communautarisme que ceux-là mêmes qui le dénoncent prétendent éradiquer. Comme vous Elisabeth Moreno, je veux que chacun(e) trouve sa juste place et la reconnaissance dans la République.»

Lors de cet entretien sur LCI, Elisabeth Moreno avait aussi demandé à ce qu'il n'y ait pas de «prosélytisme sur le voile», demandant de sanctionner uniquement, par exemple, les parents qui forceraient leurs enfants mineures à se voiler et non les parents dont les enfants voudraient eux-même le porter.

Affirmant que des femmes portaient ce voile «par choix», elle a estimé que sa bataille était donc «de protéger celles que l'on force à porter le voile». A la question de savoir comment faire la différence entre celles qui sont contraintes et celles qui portent le voile librement, Elisabeth Moreno a martelé qu'il fallait «arrêter de considérer que les femmes n'[étaient] pas capables de choisir et que toutes celles qui le port[ai]ent [étaient] forcées de le faire».