France

«Imbroglio», «un pays qui nous humilie»: l'opposition au diapason sur la situation au Mali

Après l'expulsion de l'ambassadeur de France au Mali, les oppositions majoritairement favorables à un désengagement progressif de ce pays d'Afrique de l'Ouest, ont obtenu la future organisation d'un débat au Parlement.

«Le Parlement évidemment mérite d'être parfaitement informé [et] le gouvernement organisera un débat [sur] ce sujet extrêmement important», a annoncé le 2 février le Premier ministre Jean Castex au Sénat, face aux critiques exprimées par l'opposition sur le dossier malien, exacerbées après l'expulsion par les autorités maliennes de l'ambassadeur de France à Bamako.

La France a perdu une influence folle en Afrique

Engagée militairement contre le terrorisme au Mali et au Sahel depuis 2013, notamment avec la force Barkhane, «la France a perdu une influence folle en Afrique», a estimé Marine Le Pen, pour qui le comportement du Mali doit susciter «une réponse extrêmement ferme» de la part de Paris.

La candidate RN, qui considère que «si le gouvernement malien souhaite faire appel à d'autres Etats pour assurer sa défense, il en va de sa souveraineté», a de nouveau suggéré le 1er février de «mettre fin à l'aide internationale à destination du Mali».

Nos soldats meurent pour un pays qui nous humilie

«Nos soldats meurent pour un pays qui nous humilie», avait dénoncé la veille son concurrent Eric Zemmour. Une situation qui intervient en effet dix jours après la mort d'un soldat français le 22 janvier au Mali dans une attaque au mortier, le 53e tué au combat au Sahel depuis 2013.

Nous finissons dans un imbroglio qui n'est pas digne

De son côté, l'insoumis Jean-Luc Mélenchon a exprimé le «chagrin» que lui inspirait la situation. «Nous avons perdu plus de 50 personnes là-bas, nous finissons dans un imbroglio qui n'est pas digne», a-t-il regretté lors d'une récente rencontre avec l'Association des journalistes de défense (AJD).

Depuis longtemps hostile à la présence de troupes françaises au Mali, le candidat LFI a considéré que «tout cela [était] très mal engagé et qu'il faut se retirer de là».

Le candidat PCF Fabien Roussel a également plaidé pour «sortir» du Mali «de manière progressive».

Yannick Jadot, le candidat EELV, a aussi préconisé que les soldats français au Mali soient maintenus «dans les camps, les casernes».

A droite, la candidate LR Valérie Pécresse a critiqué un manque d'anticipation de l'exécutif. «Il ne faut pas quitter le Sahel mais la question de notre maintien au Mali est clairement posée», a-t-elle déclaré ce 2 février, martelant que la France n'avait «pas vocation à rester dans un pays qui ne veut pas» de sa présence.

La candidate PS Anne Hidalgo a pour sa part mis en avant la nécessité de «maintenir» une présence militaire au Mali, pour la «sécurité» de la France, même si elle a estimé qu'il fallait «adapter» cette présence.

La France sur la voie d'un désengagement militaire au Mali

Le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, a rappelé le 1er février que la France avait «progressivement réduit la voilure» et qu'elle allait «continuer à le faire» puisque les forces Barkhane devraient être réduites de plus d'un cinquième de leurs effectifs d'ici l'été 2022.

«D'ici la mi-février on va travailler avec nos partenaires pour voir quelle est l'évolution de notre présence sur place [et] prévoir une adaptation», a précisé Gabriel Attal, tandis que Berlin a aussi affirmé, quasi simultanément, que l'engagement militaire des Européens au Mali devait être réévalué.

Les relations entre les autorités françaises et maliennes n'ont cessé de se détériorer depuis que les colonels au pouvoir – qu'ils ont pris par la force en août 2020 – ont décidé de repousser la date prévue des élections qui auraient ramené les civils à la tête du Mali. Ils ont fait valoir qu'il était actuellement impossible d'appeler les Maliens aux urnes du fait de l'insécurité qui persiste depuis 2012 sur un territoire dont les deux tiers échappent au contrôle des autorités. Les militaires au pouvoir réclament le temps de mener à bien des réformes essentielles selon eux et d'organiser des élections incontestables. Outre la France, la Cédéao (Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest) a réagi à cette décision, en infligeant de sévères sanctions au Mali.

De son côté, le chef de la diplomatie française Jean-Yves Le Drian a, le 28 janvier, reproché à Bamako de «faire appel à une milice privée russe proche de Poutine qui se sert directement sur les ressources propres du Mali», malgré un récent démenti du gouvernement malien concernant un déploiement de la société de sécurité privée Wagner. En décembre dernier, le ministère russe des Affaires étrangères avait pour sa part accusé les Occidentaux «d'hystérie» à ce sujet, rappelant en outre que «les entreprises militaires privées ne sont pas contrôlées par les autorités [russes]».