France

Jérôme Rivière et Damien Rieu rallient Eric Zemmour, le RN relativise l'importance de ces pertes

Eric Zemmour a reçu le soutien, coup sur coup, de Jérôme Rivière, chef de la délégation du RN au Parlement européen, et de Damien Rieu, attaché de Philippe Olivier, proche conseiller de Marine Le Pen. Leur parti minore l'impact de ces ralliements.

Deux bonnes pioches d'affilée pour Eric Zemmour dans la main de sa concurrente : après le ralliement, le 19 janvier, de Jérôme Rivière, président de la délégation du Rassemblement national au Parlement européen, le polémiste a été rejoint le 20 janvier par Damien Rieu, jusqu'alors assistant parlementaire de l'eurodéputé Philippe Olivier, proche conseiller de Marine Le Pen. «J'ai pris la décision de rejoindre à mon tour la campagne d'Eric Zemmour», a annoncé Damien Rieu dans un communiqué diffusé sur Twitter

La fusée Eric Zemmour a réussi à créer une dynamique inédite dans l'histoire politique

«J'ai toujours été un électeur et un militant du FN puis du RN [...]  Mais depuis quelques années, je constate que malgré tous nos efforts et tous nos espoirs, nous n'arrivons plus à mobiliser nos électeurs», a-t-il développé, en évoquant des résultats stagnants, voire en régression, ainsi que des militants et des cadres qui «n'y croient plus». Face à ce désarroi, et alors qu'une «course contre la montre» est engagée pour éviter «la disparition programmée de notre pays», il existe une solution toute indiquée, selon Damien Rieu. «Partant de zéro et en quelques mois seulement, en menant le combat des idées et en dénonçant le Grand remplacement, la fusée Eric Zemmour a réussi à créer une dynamique inédite dans l'histoire politique», s'enthousiasme-t-il, soulignant que le parti Reconquête ! créé par l'ex-journaliste alignait déjà 80 000 adhérents et «avait enfin brisé la digue des Républicains».

Son arrivée a été saluée par Eric Zemmour, qui a lui souhaité la «bienvenue dans la Reconquête», ajoutant : «Comme toujours, ton insolence et ton courage ont choisi le bon combat !».

De la même manière, Jérôme Rivière a loué le choix de son cadet sur le réseau social, affirmant que «c’est bien avec la candidature d'Eric Zemmour que nous en finirons avec le piège tendu par Mitterrand pour diviser le peuple de droite, conservateurs et populistes».

Le 19 janvier, l'ex-chef du groupe RN au Parlement européen avait développé des arguments similaires à ceux de Damien Rieu auprès du Parisien : «J’ai longtemps cru que les élections régionales [de 2021] seraient la dernière marche avant d’atteindre le succès présidentiel», a-t-il confié à quotidien, constatant que «l’incapacité que le RN a montrée à gagner ces élections régionales est la démonstration flagrante que Marine Le Pen n’est pas en situation de gagner l’élection présidentielle».

Jugeant impensable, compte tenu de la situation «trop inquiétante» de la France, de participer à une campagne présidentielle «en étant résigné à un échec», il a accusé Marine Le Pen d'avoir à la fois transformé le RN en «radeau de la Méduse» et d'ignorer «certaines évidences comme le Grand remplacement». Devenu «une organisation extrêmement fermée», le RN serait selon Jérôme Rivière incapable de gagner l'élection et de former une majorité large, en réalisant l'«union des droites» théorisée par Eric Zemmour. «Je suis le seul candidat qui peut faire l’union des droites. Valérie Pécresse ne le veut pas et Marine Le Pen ne le peut pas», a encore rappelé ce dernier sur BFM TV, le 19 janvier. Une dynamique qui s'appuie aussi sur le précédent ralliement de l'ancien porte-parole des Républicains, Guillaume Peltier, le 9 janvier.

«Aigreur» et «duplicité» à l'origine des départs, balaye le Rassemblement national

En marge d'un déplacement à Fréjus (Var) le 20 janvier, Marine Le Pen a minimisé le départ du président du groupe RN au Parlement européen. «Il y aura zéro impact politique parce que Jérôme Rivière avait zéro impact politique au RN, donc je ne crois pas qu’il en ait en dehors du RN», a-t-elle déclaré, évoquant une «aigreur» de l'élu qui «espérait des postes au sein du RN que je considérais qu’il ne pouvait obtenir». A propos de Damien Rieu, l'entourage de la candidate interrogé par l'AFP a jugé que son départ révélait sa «duplicité», reproche également adressé à Jérôme Rivière. Lors d'une conférence de presse, la candidate a reproché leur comportement aux deux hommes : «On fait ça sans prévenir la présidente du mouvement qui vous a fait élire. […] On ne prévient pas son député quand on est assistant [...]. Je pense qu’en politique aussi on peut agir avec droiture», a estimé Marine Le Pen.

«Quand on veut tuer son chien, on dit qu'il a la rage», a réagi Jérôme Rivière sur RMC aux critiques concernant son transfert, expliquant celles-ci par le «choc politique» causé par son départ. Ces ralliements constituent quoi qu'il en soit une mauvaise nouvelle pour Marine Le Pen – mais la plaie ouverte sur le flanc du RN pourrait-elle s'élargir ? Le journaliste de l'Opinion Paul Laubacher a estimé que le ralliement de Damien Rieu à Eric Zemmour était une «vraie prise de guerre de Zemmour au RN», car «Rieu est un soldat, un réel influenceur, [...] un relais important chez les "natios". De plus, Rieu est un proche de Marion Maréchal» relève-t-il, le soutien de cette dernière étant ardemment espéré par les partisans d'Eric Zemmour. Damien Rieu s'était notamment fait remarquer pour avoir mené des actions très médiatisées avec le mouvement Génération identitaire, dissous en mars 2021.

«J’ouvre le chemin», a indiqué pour sa part Jérôme Rivière dans son entretien au Parisien, en appelant d’autres élus à le rejoindre. «Je sais que d’autres parlementaires RN suivront dans les semaines qui viennent», a-t-il prophétisé. Même s'il a assuré sur RMC : «Emmanuel Macron est notre seul et unique adversaire», la primaire interne à la droite radicale vire à la guerre ouverte. L'eurodéputé Philippe Olivier, qui n'a pas commenté directement le départ de son assistant Damien Rieu, a ainsi qualifié le déplacement d'Eric Zemmour à Calais de «lunaire».