France

L'Académie française prête à saisir la justice pour mettre fin à la carte d'identité bilingue

Le cénacle des gardiens de la langue française a fait part de son intention de contester la nouvelle carte d'identité, écrite en français et en anglais, devant le Conseil d'Etat. La modification des pièces d'identité découle d'un règlement européen.

L'Académie française s'est dite prête à saisir le Conseil d'Etat pour faire supprimer des mentions en anglais sur le futur modèle de la carte d'identité, a indiqué sa secrétaire perpétuelle Hélène Carrère d'Encausse au Figaro, le 5 janvier. «Longtemps, l'Académie a réagi par des déclarations et des communiqués qui étaient écoutés. Aujourd'hui, toutes les paroles se valent. Une autre forme d'intervention s'imposait», a déclaré au quotidien celle qui préside l'institution garante de la langue en France.

Un bilinguisme contraire à la Constitution

L'Académie estime qu'en ajoutant par exemple surname à côté de «nom» ou given names à côté de «prénoms», le modèle conçu par le gouvernement – généralisé en août 2021 – contrevient à l'article 2 de la Constitution, qui dispose que «la langue de la République est le français». Selon Hélène Carrère d'Encausse, ce choix «met à mal un principe essentiel». «Qui a décidé de mettre à égalité le français et l'anglais dans ce document ?», s'est-elle interrogée.

Par ailleurs, si un règlement européen oblige à traduire «carte d'identité» dans au moins une autre langue officielle de l'Union européenne, le texte ne prévoit pas d'autres traductions imposées. Par conséquent, selon Le Figaro, l'Académie a mandaté un cabinet d'avocats qui a écrit au Premier ministre Jean Castex «pour lui demander d'abroger la disposition créant la nouvelle carte nationale d'identité», sans obtenir de réponse jusque-là. Le quotidien précise que cette demande s'appuie sur une jurisprudence du Conseil d'Etat de 1999, selon laquelle il est possible d'abroger un règlement, même européen, à condition que «ce règlement ait été illégal dès la date de sa signature». Si le Conseil d'État venait à donner raison à l'Académie, le gouvernement serait donc contraint d'annuler le décret du 13 mars 2021 annonçant la nouvelle forme de la carte d'identité.

«Bravo !», a salué sur Twitter le député les Républicains Julien Aubert, se montrant plus enthousiaste que le leader des Patriotes, Florian Philippot, selon qui, même si la démarche est bonne, «le Conseil d’Etat enverra balader l’Académie car ce bilinguisme est demandé par la directive européenne à l’origine de cette nouvelle carte !».

Le Figaro précise que l'Italie et la Pologne ont suivi l'exemple français de tout traduire, et que l'Espagne a fait le choix de l'anglais uniquement pour le titre. L'Allemagne a elle opté pour une triple traduction en allemand, anglais et français.