Jeudi 9 décembre
Interrogé au sujet du référendum sur l'indépendance de la Nouvelle-Calédonie, Emmanuel Macron a rappelé la position qu'il avait tenu lors d'un déplacement à Nouméa. «Je crois avoir dit que la France serait moins belle sans la Nouvelle-Calédonie : ça me semble clair et ça ne sonne pas l'abandon», a-t-il notamment répondu.
«Le rôle du président de la République n'est pas d'être dans un camp», a-t-il poursuivi.
Interrogé sur les tensions internationales générées par le dossier ukrainien, Emmanuel Macron a évoqué «un conflit qui demeure gelé». «Est-ce que les Européens ont la possibilité de changer cela eux-seuls ? Non, ça dépend de la bonne volonté des autres parties», a-t-il déclaré avant d'évoquer sa volonté de réengager un processus politique en lien avec les présidents ukrainien et russe.
Le chef de l'Etat a par ailleurs tenu à saluer le fait que le président américain ait récemment «jugé utile de se coordonner avec ses partenaires européens avant d'avoir parlé au président Poutine».
Emmanuel Macron a également affirmé que l'objectif commun des Européens et des Américains était avant tout d'«être au côté de l'Ukraine pour assurer sa sécurité». «Il faut continuer à engager un dialogue exigeant avec la Russie», a-t-il poursuivi.
Interrogé sur l'évolution de l'euroscepticisme dans le paysage politique, le président de la République a tenu a souligné son attachement à l'UE en faisant référence à la pandémie de Covid-19.
«Ne serions nous pas européens, bon courage pour les vaccins», a-t-il déclaré en expliquant que la France ne disposait pas sur son sol de site de production pour les vaccins à arn messager. «Moi je suis fier d'être européen quand je regarde la crise sanitaire : nous nous sommes battus, nous avons innové, nous avons trouvé des vaccins, nous avons acheté des vaccins», a-t-il entre autres ajouté.
«D'abord, ne politisons pas l'olympisme, ensuite, gardons l'exigence qui convient pour que tous les athlètes à travers le monde soient protégés», a répondu Emmanuel Macron, interrogé sur le boycott par certains pays des Jeux olympiques de Pékin.
«Nous avons [avec le Royaume-Uni] des relations qui sont actuellement difficiles parce que le gouvernement [britannique] ne fait pas ce qu'il dit», a affirmé Emmanuel Macron en référence au conflit sur la pêche entre Paris et Londres.
Evoquant par ailleurs la question des migrations entre la France et l'Angleterre, le président de la République a souligné qu'il s'agissait d'une question humanitaire. «Ce sont des hommes et des femmes qui veulent rejoindre le sol britannique [...] parce qu'il y a toujours un système opaque qui existe depuis les années 80, où le modèle économique britannique repose sur le travail illégal des étrangers», a-t-il en outre déclaré.
Sur le volet Défense, Emmanuel Macron a fait référence à l'affaire des sous-marins : «Puis-je ignorer que les Britanniques ont été, semble-t-il, les ardents promoteurs d'un contrat qui a délibérément combattu une vision française en indo-Pacifique pour construire une vision alternative et exclusive [...] Tout ça ne sont pas des signes flagrants d'amitié», a-t-il déclaré.
Interrogé par le journaliste Fréderic Haziza sur une palette de sujets abordés par Eric Zemmour dans le cadre de sa campagne, Emmanuel Macron a d'abord répondu qu'il ne lui appartenait pas de «qualifier ou de disqualifier un candidat à une élection à venir».
«Notre pays est un vieux pays fait de valeurs, de cultures, de combats [...]. Aimer la France et respecter les Français c'est respecter la dignité de chaque Française et de chaque Français, et ce faisant, respecter la dignité de notre nation, je n'ai pas d'autres commentaires à faire», a-t-il cependant poursuivi.
«Depuis deux ans, nous avons enrayé une baisse de notre industrie qui datait de douze années», s'est félicité Emmanuel Macron auprès d'un journaliste qui l'interrogeait sur une concurrence entre des industries française et européenne.
«Nous défendrons la France mais parfois il y aura des gros projets européens qui iront sur tel ou tel site qui n'est pas forcément français [...] Nous ne pouvons pas considérer que l'Europe se réduit à la France», a-t-il par ailleurs déclaré défendant avec un sourire la formule du «en même temps».
Interrogé sur l'issue possible des différends qui persistent entre Bruxelles et Varsovie sur la question de l'état de droit, Emmanuel Macron a estimé qu'il fallait être «très dur avec les dirigeants politiques et les actes qui ne sont pas conformes à nos principes» mais qu'il fallait en même temps «tout faire pour, quand même, garder cette Europe unie».
«[Viktor Orban] est un adversaire politique mais c'est [aussi] un partenaire européen autour de la table [...]. Quelles que soient nos sensibilités politiques, nous devons travailler ensemble [...] Mon devoir c'est de porter la voix de la France mais [aussi] d'aider à construire des compromis utiles pour l'Europe et la France», a répondu Emmanuel Macron à un journaliste qui l'interrogeait sur ses attentes à l'occasion de sa prochaine rencontre avec le Premier ministre hongrois.
Evoquant le programme Erasmus, Emmanuel Macron a déclaré : «Allons plus loin, réfléchissons à un service civique de six mois ouvert à tous les jeunes de moins de 25 ans pour un échange universitaire, un apprentissage, un stage ou une action associative.»
«L'histoire européenne n'est pas seulement l'addition de 27 histoires nationales, elle a une cohérence, une unité que chacun pressent mais qui ne se donne pas encore à voir pleinement», a affirmé Emmanuel Macron avant d'annoncer la relance d'«un grand travail sur l'histoire de l'Europe».
«Le revisionnisme s'installe dans certains pays, révisionnisme historique utilisé par des puissances qui veulent remettre en cause nos valeurs, notre histoire, revoir leur propre rôle», a-t-il dénoncé.
Evoquant «les valeurs de l'Europe», Emmanuel Macron a abordé la question de l'Etat de droit qui nourrit parfois des tensions entre des pays membres de l'UE et Bruxelles.
«Ces questions ne doivent pas opposer l'est et l'ouest de notre continent, [il s'agit] d'un combat politique existentiel pour notre union», a-t-il assuré, se montrant favorable à la création de nouveaux instruments «pour aider à faire vivre [les] libertés démocratiques».
Emmanuel Macron a ici prôné la mise en place d'«un fond de soutien européen au journalisme indépendant et d'investigation».
Prônant une Europe plus sociale avec des emplois qui rémunèrent mieux, Emmanuel Macron a mis en garde contre une UE qui «ne protège pas mieux les plus faibles».
Evoquant «un marché sans règle où ne se retrouvent plus les classes moyennes et populaires», il a souligné : «C'est cette Europe-là qui a nourri le Brexit.»
«Nous allons avancer sur plusieurs sujets, d'abord sur la directive européenne qui définit les salaires minimums dans l'UE», a encore déclaré le chef de l'Etat.
Emmanuel Macron entend contribuer à «une Europe numérique». «Les dix premières capitalisations mondiales aujourd'hui voient huit entreprises de la tech mais aucune européenne, c'est ça la réalité du capitalisme mondial», a déploré le chef de l'Etat, appelant à la création d'«un vrai marché du numérique» à travers un agenda pour attirer les talents et les financements.
Evoquant le modèle de croissance européenne qu'il entend porter, Emmanuel Macron a énuméré les attentes de l'UE en matière de lutte contre le changement climatique, expliquant qu'il fallait accompagner les entreprises européennes sur leurs engagements dans le domaine, et préserver leur compétitivité face à des concurrents non-européens.
«Les acteurs économiques européens ne peuvent pas être les victimes de leurs efforts pour la planète», a-t-il déclaré en annonçant la mise en place de «clauses miroir».
«Aller plus loin dans l'intégration d'une Europe financière» : Emmanuel Macron a fait savoir qu'il entendait relancer un cadre budgétaire et financier à l'échelle de l'UE.
Emmanuel Macron a appelé à définir «un nouveau modèle européen de croissance» basé sur «la production» et «la solidarité». «Nous organiserons le 10 et 11 mars en France un sommet exceptionnel des 27 [pour] définir ce nouveau modèle», a-t-il ici déclaré.
Evoquant «les dépendances technologiques» de l'Europe dans des domaines comme le numérique, Emmanuel Macron a déclaré : «Nous devons penser et agir en Européens [afin de construire] une souveraineté technologique en Europe».
«Nous avons une responsabilité particulière à l'égard des Balkans occidentaux. Nous devons y mener une politique de réengagement [...] pour lutter contre les interférences, contre les manipulations, qui sont le fait de puissances régionales qui, à travers les Balkans, cherchent à déstabiliser l'Europe», a déclaré le président de la République comme un prérequis à «une Europe de paix pour les prochaines 50 années».
«Nous devons, nous européens, aller au bout de [notre] solidarité à l'égard des Africains», a déclaré Emmanuel Macron dans sa présentation des relations entre l'UE et le continent africain. Il a ici évoqué les questions de santé, du climat et de la sécurité : «La France est particulièrement impliquée mais nous souhaitons européaniser un partenariat de sécurité entre l'Afrique et l'Europe», a-t-il par notamment déclaré.
Abordant la question de la mobilité, Emmanuel Macron a exprimé sa volonté d'«organiser l'immigration choisie, qu'elle soit scientifique culturelle, académique».
L'actuel locataire de l'Elysée a également défendu le concept d'une défense européenne. «Il nous faut entrer dans une phase plus opérationnelle», a-t-il entre autres insisté.
«Que nous soyons membres de l'OTAN ou non [...], nous avons des menaces communes et des objectifs communs. Nous allons porter des ambitions communes en termes d'industrie de défense», a-t-il affirmé, exprimant sa volonté de définir une organisation européenne sur «le domaine maritime, le spatial et le cyber».
Evoquant la gestion des migrations, Emmanuel Macron a fait savoir qu'il entendait «harmoniser les règles en matière d'asile et d'accompagnement des réfugiés ou des migrants». Le chef de l'Etat a ici mis en garde contre le manque de coopération entre les Etats membres de l'UE ces dernières années.
Emmanuel Macron a annoncé la mise en place d'«un pilotage politique» de Schengen afin notamment d'être en mesure de «renforcer les contrôles aux frontières». «C'est la condition préalable à la libre circulation au sein de Schengen», a-t-il souligné.
«Nous devons passer d'une Europe de coopération à l'intérieur de nos frontières à une Europe puissante dans le monde, pleinement souveraine», a fixé comme objectif le président de la République.
«Une Europe souveraine, c'est être capable de protéger nos frontières», a-t-il poursuivi avant d'utiliser le terme de «guerre hybride» pour évoquer les récente tensions à la frontière biélorusso-polonaise.
Pendant sa présentation de l'emblème de la présidence française de l'Union européenne, le secrétaire d’Etat chargé des Affaires européennes, Clément Beaune, a vanté «une Europe des symboles, de l'identité et de la proximité».
«C'est un moment historique, la France a cette responsabilité de porter des ambitions pour l'Europe […]. Nombreux sont ceux qui voudraient s'en remettre aux seules nations. L'unité européenne est leur complément indispensable», a déclaré Emmanuel Macron en début d'intervention, avant de laisser s'exprimer le secrétaire d’Etat chargé des affaires européennes Clément Beaune. Celui-ci a notamment dit vouloir aller de l'avant face «aux replis et aux renoncements».
A trois semaines du début de la présidence française du Conseil de l'Union européenne, prévue le 1er janvier 2022, Emmanuel Macron présente ce 9 décembre ses priorités pour ce mandat au cours d'une conférence de presse à l'Elysée.
Avant de répondre aux questions des journalistes, le chef de l'Etat français a prévu d'expliquer l'importance qu'il accorde à cette présidence semestrielle tournante des 27, la treizième que va exercer la France depuis les années 1950, et la première depuis 2008. Emmanuel Macron a préparé sa conférence de presse en échangeant avec les deux têtes de l'UE : la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen en début de semaine, et le président du Conseil européen Charles Michel lors d'un déjeuner ce 9 décembre.
Le président français avait déjà annoncé le 6 décembre que les priorités de la présidence française – dite PFUE – tourneraient autour de trois axes : «relance, puissance et appartenance». Il avait ainsi souligné l'importance de la «nécessaire» relance économique en «réponse à la crise» sanitaire, avant de défendre le besoin de renforcer la puissance de l'UE en la rendant plus autonome, notamment militairement.
«La souveraineté européenne renforce la souveraineté de la France», avait-il assuré, reprenant cette notion contestée. Il avait enfin regretté que le «sentiment d'appartenance» des Français à l'UE se soit «étiolé» ces dernières années.
Tensions autour de l'Ukraine et visite en Hongrie
La présidence française de l'UE intervient dans un contexte international tendu, en particulier sur la question ukrainienne. Les 27 peinent à faire entendre leur voix sur le sujet, alors que le président américain Joe Biden a menacé son homologue russe Vladimir Poutine de «fortes sanctions» économiques s'il envahissait l'Ukraine. Des accusations battues en brèche par Moscou qui demande de son côté des garanties sur un gel de l'expansion de l'OTAN à l'Est.
L'agenda européen d'Emmanuel Macron est par ailleurs chargé dans les prochains jours, avec la réception du nouveau chancelier allemand Olaf Scholz, qui va faire son premier déplacement international à Paris le 10 décembre. Le président français est ensuite attendu le 13 décembre en Hongrie, où il rencontrera le Premier ministre Viktor Orban, dernier pays de l'UE qu'il visite dans le cadre de son quinquennat. Il sera le premier président français à se rendre à Budapest depuis Nicolas Sarkozy en 2007.
Emmanuel Macron «participera à un sommet avec les Premiers ministres des pays de Visegrad» (Hongrie, Pologne, République tchèque et Slovaquie), selon le porte-parole du chef du gouvernement hongrois. La relation entre Emmanuel Macron et Viktor Orban a été émaillée par de multiples oppositions depuis 2017, notamment sur le dossier sensible de l'accueil des migrants.
Le Premier ministre hongrois a d'ailleurs reçu plusieurs adversaires politiques du président français, à savoir Marine Le Pen, et plus récemment Eric Zemmour.