France

Tir de LBD sur un manifestant à Paris en janvier 2020 : le policier mis en examen

Le policier qui avait fait usage de son lanceur de balles de défense (LBD) «en dessous de la distance préconisée» sur un manifestant a été mis en examen le 28 avril. L'agent plaide une légitime défense «proportionnée» concernant un autre tir.

Un policier a été mis en examen fin avril pour «violences volontaires» après des tirs de LBD potentiellement non réglementaires, à Paris en janvier 2020, pendant une manifestation contre la réforme des retraites. Un de ces tirs, quasiment «à bout portant», a été réalisé sur deux manifestants, a-t-on appris le 21 juin de source proche du dossier.

Le parquet de Paris a ouvert une enquête, confiée à l'IGPN, la police des polices, à la suite d'une vidéo virale montrant un policier, rue Saint-Lazare à Paris, armé d'un lanceur de balles de défense (LBD). On le voit tirer sur la foule à environ un mètre de distance, faisant tomber à terre un homme.

Dans une déclaration à l'AFP, la préfecture de police a évoqué une vidéo «parcellaire» et «sortie de son contexte» et justifié l'emploi «de moyens intermédiaires, lacrymogènes et LBD» face à des «personnes violentes».

Une seconde vidéo, tournée six minutes plus tard au même endroit, montre le même policier des compagnies de sécurisation et d'intervention (CSI) en train d'effectuer un tir de LBD sur un homme, Peter B., situé à une dizaine de mètres. On l'entend ensuite crier : «T'en veux encore ?» Touché, le manifestant a porté plainte. Dans une autre vidéo, le numéro d'identification personnel RIO du policier, obligatoire mais pas toujours arboré, est visible.

Une juge d'instruction, saisie en novembre 2020, a mis en examen le 28 avril le policier, Ludovic C., âgé de 33 ans, pour «violences volontaires par personne dépositaire de l'autorité publique» avec arme. 

Une légitime défense «proportionnée» selon le policier

Lors d'un interrogatoire le 28 mai consulté par l'AFP, le policier a évoqué une manifestation «très rude» avec des «Black Blocks [...] très virulents». Concernant le premier manifestant, il a néanmoins reconnu que son tir était «en dessous de la distance préconisée» pour les cartouches qu'il utilisait, soit au minimum 10 mètres, mais il a assuré qu'il avait été fait en situation de légitime défense et était «proportionné», car le manifestant «voulait blesser les collègues».

A propos de Peter B., situé à une dizaine de mètres et qui semble sur la vidéo donner un coup de pied dans un palet de grenade lacrymogène, Ludovic C. a expliqué vouloir «stopper la menace» : les gaz lacrymogènes peuvent «créer des détresses respiratoires». Ludovic C. a de ce fait évoqué une «riposte proportionnée». Sollicités par l'AFP, Arié Alimi, avocat de Peter B., et Thibault de Montrial, avocat de Ludovic C., n'ont pas souhaité apporter de commentaire.

Arme non létale et controversée, le LBD est accusé d'avoir provoqué de graves blessures pendant les mobilisations des Gilets jaunes.

Ludovic C. a indiqué devant la juge avoir été «recherché, menacé de mort, [lui] et [sa] famille» suite à ces tirs «fortement médiatisés». Mis aux arrêts pendant «un mois» par sa hiérarchie «par mesure de sécurité», le policier a déclaré avoir «repris rapidement», avant d'être «muté dans l'intérêt de [son] service» dans le sud de la France, où il exerce actuellement sur la voie publique, «suite à une autre affaire, l'interpellation du rappeur Ademo de PNL», à laquelle il a participé. Les images de l'arrestation mouvementée de ce rappeur, plaqué au sol en septembre, ont largement circulé sur les réseaux sociaux. 

Poursuivi pour «outrage» et «rébellion», Ademo a été relaxé début mai pour des raisons procédurales par le tribunal correctionnel de Paris.