Pressenti pour être un sérieux outsider dans la course à la présidentielle de 2022, Arnaud Montebourg a certainement douché certaines espérances le 9 juin. Lors d'un entretien pour Le Parisien, il a ainsi affirmé sur son éventuelle candidature : «En l’état actuel, je ne suis pas candidat, car je n’ai pas les ressources personnelles et financières pour l’être.»
«Je n’ai pas de parti et ne suis pas soutenu par le gotha», regrette l'ancien ministre de l'Economie et du Redressement productif sous François Hollande.
Après avoir mis entre parenthèses sa vie politique en 2017, pour se consacrer à l'entrepreneuriat made in France, tout portait à croire qu'Arnaud Montebourg envisageait avec sérieux sa présence sur la ligne des prétendants. Auteur d'une tribune le 7 juin 2021 dans Le Monde, il lançait même l'injonction d'«unir le bloc populaire pour briser la tenaille entre les blocs bourgeois et réactionnaire».
Dans l'interview accordée au Parisien, il tempère toutefois son abandon à l'Elysée, se déclarant être «parfaitement disponible pour peser sur les événements, participer à toutes formes de solutions ouvrant une alternative à ce duel mortifère [Emmanuel Macron face à Marine Le Pen] qui amène la France dans l’impasse et dans la confrontation intérieure». Car pour lui, il ne fait aucun doute : «Si le pays reste sur la pente actuelle, Marine Le Pen sera présidente.» Il invite dès lors la gauche à se donner «à elle-même un grand coup de pied dans les fesses», dont il déplore qu'elle ait «quitté le récit national en abandonnant les classes moyennes et populaires».
Dans ce même propos, il offre une piste pour envisager une victoire face au duel Emmanuel Macron/Marine Le Pen : «Il faut renouer avec les questions économiques – reprendre notre souveraineté, sociales et regarder en face des problèmes comme le contrôle de l’immigration et la sécurité.» Et pour Arnaud Montebourg, pas question de refaire une simple union de la gauche pour espérer l'emporter. «Il faut réinventer le Conseil national de la Résistance qui unirait les forces sociales et économiques, car nous sommes dans la tempête et le chaos menace», argumente-t-il, confessant qu'il «échange» avec des politiques de gauche comme de droite.
Mais s'il ne se sent pas en mesure de porter ces projets-là, qui voit-il comme incarnation ? Certainement pas le mieux placé dans les actuelles enquêtes d'opinion, Jean-Luc Mélenchon. «Il adopte une attitude de destruction sectaire de la gauche», canarde l'ancien député de Saône-et-Loire qui souhaite que l'élu des Bouches-du-Rhône renonce pour 2022. Car s'il convient que «le mélenchonisme [...] a pu être une solution en 2017», il est désormais, selon son appréciation, «devenu le blocage de la gauche».
Le défi montebourgeois est donc de taille à dix mois du premier tour de la présidentielle : trouver une incarnation au-dessus des clivages qui bénéficierait donc de finances et d'une structure suffisantes pour battre campagne. A moins qu'Arnaud Montebourg n'ait profité de cet entretien pour faire un appel du pied en sa faveur...
Bastien Gouly